Visite ministérielle

Pas d’annonce, mais on promet un suivi rigoureux

24 septembre 2007

Après une journée à parler exclusivement de pêche, le Ministre de l’Agriculture, Michel Barnier, consacrait le dernier jour de sa visite aux affaires agricoles. La presse l’attendait impatiemment sur l’exploitation d’un jeune maraîcher cafriplainois, Sébastien Bellemène, qui s’oriente vers l’agriculture raisonnée.

Le ministre débute sa deuxième journée de visite à Saint-Pierre par la découverte du site de transformation des viandes porcines et bovines, puis se rend au pôle de protection des plantes du CIRAD. Au Tampon, sur l’exploitation de la famille Bellemène, les convives du déjeuner champêtre s’empressent d’arriver et finissent par s’impatienter d’entrevoir le ministre de l’Agriculture.
Un agriculteur me confie qu’il veut remettre au ministre en main propre un dossier pour que les chiens errants arrêtent de saccager son troupeau de moutons. D’autres sont là parce qu’il faut bien être vu, et que les élections approchent à grands pas. En tout cas, la famille UMP est bien représentée. Nassimah Dindar, René-Paul Victoria, Didier Robert bien sûr, plusieurs conseillers municipaux et généraux soignent leur place. C’est à qui sera le plus en vu auprès du ministre, voire même le plus familier avec lui. Le ministre arrive enfin, escorté par les forces de l’ordre, suivi deux ces deux conseillers, du Préfet Maccioni, du Président de la Chambre d’Agriculture. Après le serrage de mains, les petits commentaires futiles, le Ministre Barnier commence la visite jugée exemplaire de l’exploitation de la SCEA “Les Terrasses de jasmin”.

Défendre les produits péï de l’agriculture raisonnée

La famille Bellemène jubile. C’est la reconnaissance ultime d’un travail de longue haleine. Cette reconnaissance vaut également pour tous ceux qui défendent l’agriculture durable, et même ceux qui vont encore plus loin, en proposant des produits de l’agriculture biologique. Le Ministre Barnier veut s’afficher comme « le ministre de l’Agriculture durable et de la pêche durable ». Il en fait son credo. Sébastien Bellemène a pris les devants en reprenant l’exploitation familiale et en se lançant dans l’agriculture raisonnée.
Il prévoit même d’agrandir son exploitation de 1.000 mètres carrés de serres plus solides. Pour ce jeune issu de la formation hôtelière, il a fallu s’investir, ce qui explique ce stage de spécialisation sur les cultures sous abris qu’il a brillamment mené en Hollande. Il aura encore fallu 2 ans pour que son projet devienne réalité, cela malgré des démarches administratives lourdes. Aujourd’hui, il espère même disposer d’un terrain au Petit Tampon pour y installer des serres encore, mais surtout une table d’hôte. Samedi, Sébastien Bellemène, moult fois félicité par Michel Barnier, recevait avec 10 autres agriculteurs son attestation de qualification au titre de l’Agriculture raisonnée, un label qui atteste de la qualité de ses produits.
Le jeune agriculteur croit quant à lui à la place de la recherche pour toujours améliorer la qualification de ses produits. Il se réjouit donc des propos tenus par le ministre, qui assure de son soutien à la recherche, devenue la priorité.
Bernard Guidez, Président national du réseau FARRE, appelle quant à lui à une recherche publique soutenue, ce qui ne signifie pas que les initiatives privées doivent se prémunir de dynamiser leurs recherches. A bon entendeur...

Le pari gagnant

Certes, on a voulu présenter au ministre l’excellence des structures et des exploitations réunionnaises. Le ministre sera à plusieurs reprises interpellé. Un dossier complet sur les chiens errants. « Chez moi, en Savoie, ce ne sont pas des chiens qui tuent nos troupeaux, mais des loups », répond-il, transmettant le dossier à un de ses conseillers.
A la tribune officielle, le député-maire du Tampon pose la question de l’irrigation et de la tarification de l’eau, pas seulement pour sa commune, mais bien pour toute la micro-région Sud. Il revient également sur les problèmes engendrés par l’élargissement de l’Europe, notamment en termes de diminution des interventions européennes, ce qui contraindrait bien des petits exploitants réunionnais, pour qui il s’érige en défenseur. Le nouveau député reprend le flambeau de son prédécesseur TAK en ce qui concerne la place que doit prendre l’aéroport de Pierrefonds, « un outil au service de notre agriculture et de la filière agroalimentaire ». « Nos agriculteurs doivent pouvoir aborder la question de la conquête de nouveaux marchés à l’export en étant rassurés sur notre engagement pour le développement de cette plateforme aéroportuaire de proximité (...). L’avenir de notre agriculture et des filières d’élevage dépend pour beaucoup de notre capacité à être performants aussi sur les marchés nationaux et européens », poursuit-il.
Les conseillers prennent note des recommandations des orateurs successifs et transmettent des notes au ministre. Michel Barnier prône des nouvelles pratiques dans un mouvement général pour la lutte intégrée bio, donc pour une gestion de l’eau. Il se félicite aussi du pari réussi de la diversification. « C’est un pari gagnant que celui de la diversité, et que celui de la qualité », déclare-t-il. Michel Barnier assurait du soutien de son ministère pour poursuivre cette réussite, qui ne se fera pas sans résoudre le problème de l’export. La conquête des marchés nationaux et européens sera soutenue, mais le ministre entend appuyer toutes actions de coopération agricoles dans la zone. Les producteurs réunionnais sont appelés à se pencher sur les opportunités du marché malgache.
Michel Barnier revient par ailleurs sur l’importance de la recherche pour développer l’agriculture, et sa visite au pôle de protection de plantes du CIRAD lui fait dire que les Réunionnais ont bien compris l’utilité de la recherche. L’Etat donnera les moyens. A quelle hauteur ? Il n’y aura pas d’annonce lors de ce déjeuner champêtre, seulement quelques déclarations réconfortantes. Le ministre s’empressera de goûter les saveurs réunionnaises avant de reprendre la route à la découverte de notre agriculture, et des problèmes rencontrés par les acteurs des filières agricoles.

Bbj


An plis ke sa ...

Les Jeunes Agriculteurs attendaient de pied ferme le ministre au Pôle Canne des Casernes à Saint-Pierre. Ils refusent la Convention Canne (voir ci-contre). Pour autant, et cela sera rappelé par le ministre, cette Convention Canne est le meilleur cadre pour le devenir immédiat de la canne. Nicolas Alaguirissamy, des Jeunes Agriculteurs, ne l’entend pas de la même façon. La Convention Canne aurait été signée sans l’aval de plus de 50% des organisations syndicales représentatives. Si le prix de la tonne de canne est bloqué jusqu’en 2014, le salaire de l’agriculteur diminue. Pourquoi accepter de perdre de l’argent, en effet ? Selon les Jeunes Agriculteurs, l’évidence voudrait que l’on annule la présente Convention Canne et qu’une nouvelle Convention prenne en considération l’ajustement annualisé du prix de la canne, en fonction des coûts de production. Il est vrai que le prix des intrants n’est pas déterminé pour 2008.


Zot la di ...

• Didier Robert, Député-maire du Tampon

« Le Tampon, c’est aussi le pari d’une diversification qui rencontre un certain nombre de succès autour des activités maraîchères, fruitières ou horticoles. Le dynamisme de ces secteurs, nous le devons au courage de nos agriculteurs qui exercent un métier difficile et souvent ingrat. Leur grand mérite, Monsieur le Ministre, est de ne jamais baisser les bras. Tout à tour victimes de la sécheresse ou des fortes pluies, des cyclones tels que Diwan l’an dernier ou Gamède cette année encore, ils ont su, malgré tout, à chaque fois, remettre en état leur outil de travail. Mais cela s’est fait aux prix de lourdes pertes qui finissent par fragiliser beaucoup d’exploitations ».
« L’adoption du décret Produits Pays est un élément de plus qui vient renforcer une démarche qualité dans laquelle se sont engagés les acteurs du monde réunionnais. Son application devrait constituer pour nos producteurs et nos consommateurs un gage de qualité, de fraîcheur, de traçabilité et d’authenticité. C’est une bonne mesure qui devrait venir conforter l’ensemble des filières ».

• Michel Barnier, Ministre de l’Agriculture

« L’eau, ce n’est pas un bien gratuit et inépuisable, et donc il faut apprendre à la gérer dans toutes ses dimensions ».
« Je suis quelqu’un qui accorde plus d’importance au suivi qu’à l’annonce ».


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