Accord historique, répliques mesquines

Paul Vergès appelle les élus réunionnais au sens des responsabilités

25 janvier 2007

Paul Vergès a donné hier, à l’Hôtel de Région, une conférence de presse afin de revenir sur l’accord historique signé la semaine dernière. Comment ne serait-il pas étonné de voir un certain nombre d’acteurs politiques réunionnais, au lieu de commenter l’importance du contrat, se concentrer sur le seul péage ?

Paul Vergès a rappelé que La Réunion reçoit traditionnellement de l’argent de l’Union européenne et de l’Etat français. De l’institution bruxelloise, il obtient les fonds au travers du Document Unique de Programmation (ou DOCUP) qui, à partir de 2007, change d’appellation et devient le Programme Opérationnel Européen (POE). Le gouvernement français, quant à lui, finance La Réunion par le biais de ce qui s’appelait, jusqu’en 2006, le Contrat de plan Etat-Région et qu’on nomme dorénavant le Contrat de projet 2007-2013.
La grande victoire obtenue la semaine dernière a consisté à obtenir du gouvernement Villepin deux financements exceptionnels en dehors du Contrat de projet : la route du Littoral et le tram-train. Pour Paul Vergès, l’un ne pouvait aller sans l’autre. En effet, il faut, selon lui, prendre en compte l’urgence de la situation.
A la fin 2006, il y avait environ 340.000 voitures dans l’île. La croissance du parc automobile est, annuellement, d’environ 30.000 véhicules. Or, un rapide calcul permet de se rendre compte que, si on n’agit pas conjointement sur l’extension des routes et sur la modification des habitudes de transport, on court à l’asphyxie. En effet, 30.000 nouvelles voitures d’environ 5 mètres représentent, mise bout à bout comme dans un bouchon, 150 kilomètres. Or, le nombre annuel de kilomètres de routes nouvelles est largement inférieur à cette longueur. L’urgence réside encore dans le fait que, entre le moment où l’on prend une décision et la livraison d’une route, au moins 10 ans s’écoule.
C’est pourquoi la route du Littoral ne pouvait être envisagée sans son pendant : le tram-train. Celui-ci va modifier considérablement la culture de l’automobile à La Réunion.
Paul Vergès a alors critiqué ceux qui se lamentent sur le fait que, sur ce projet, tout l’argent va au Nord. En effet, c’est la CIREST de Virapoullé, dans l’Est, qui a refusé l’extension de Sainte-Marie à Saint-Benoît. Du côté du Sud, c’est la CIVIS qui a rejeté que le tram-train fasse la liaison de Saint-Paul à Saint-Joseph. Le projet que Paul Vergès souhaiterait porter, à terme, consisterait à proposer qu’une telle infrastructure aille de Saint-Benoît à Saint-Joseph. Selon sa formule : « Les hommes passent, les besoins persistent ».

Deux chantiers deux fois plus créateurs d’emplois

Ces 2 chantiers considérables vont être 2 fois plus créateurs d’emplois que la route des Tamarins qui, déjà, propose 1.500 emplois directs et 1.500 emplois induits. La route des Tamarins, c’est 1 milliard d’euros et une livraison au début 2009. La route du Littoral, c’est 930 millions d’euros pour une fin des travaux en 2016. Pour mémoire, on rappelle que la route du Littoral va être payée à hauteur de 394 millions par l’Etat, 191 millions par la Région, 130 millions par l’Europe et 215 millions d’euros pris en charge par une société privée qui se financera par le biais d’un péage. Enfin, le tram-train, c’est un début du chantier en 2008 et un achèvement en 2013 pour 1,3 milliard d’euros. L’Etat finance 435 millions d’euros, la Région 780 millions et l’Europe 100 millions.
Paul Vergès a bien mis en évidence qu’en Métropole, l’Etat ne donne plus rien pour tous les projets de tram. Et là, combien a accordé le gouvernement ? La bagatelle de 435 millions d’euros !
En outre, il a témoigné d’une grande confiance puisqu’il a accepté que le Conseil régional ait la maîtrise d’ouvrage.

Le péage ne dépassera pas 1 euro

Revenant sur la polémique autour du péage. Paul Vergès admet volontiers que l’Etat ne paie pas tout et qu’un tel financement fait partie du plan retenu. Cependant, il défend cette solution par 5 arguments. Tout d’abord, les automobilistes paient tous les jours un péage : temps perdu, essence dépensée, moindre activité économique. Deuxièmement, un tel moyen de financement est utilisé partout dans le monde : que ce soit à Millau, au tunnel du Prado à Marseille. Or, qui a fait une quelconque remarque sur le coût du péage de Millau ? Troisièmement, payer un tel écot favoriserait la pratique du covoiturage, comme c’est le cas en Californie où des automobilistes se sont mis largement à cette pratique à partir du moment où la seule ligne non congestionnée du trafic était accordée aux voitures pleines. Quatrièmement, le péage ne dépassera pas 1 euro. Cinquièmement, cette solution de paiement ne sera mise en place qu’en 2017. A ce moment-là, 1 euro vaudra moins que son cours actuel.
D’après les informations qu’il a, Paul Vergès est sûr que Nicolas Sarkozy, s’il est élu, financera les 2 projets. Pour ce qui est de Ségolène Royal, il pense que les chances de soutien sont relativement importantes. C’est pourquoi il n’a pas compris la réaction de Gilbert Anette et de Jean-Claude Fruteau à ce sujet.
Enfin, très sensible au thème de la Mémoire, Paul Vergès a souhaité qu’un musée du tram-train et de la route du Littoral soit réalisé. Il tient à ce que les réactions des acteurs politiques de La Réunion soient conservées afin que ceux-ci soient un peu plus responsables de l’importance de la vision à long terme de leur mandat, et non des batailles à courte vue qui ne font pas avancer les grands chantiers que nécessite La Réunion.

M. D.


Pourquoi cette réaction des élus de La Réunion ?

Les politiques à courte vue jouent sur la peur, le court-terme et souhaitent donner immédiatement raison à un électorat, sans se préoccuper prioritairement de la pertinence de la décision qu’il faut prendre. Paul Vergès s’est demandé l’utilité d’une telle polémique sur le péage qui donne une image passéiste de quelques acteurs politiques réunionnais à La Réunion. Il a rappelé avec insistance que, pour exposer la situation des transports dans l’île, il faut partir de 2025. A ce moment, avec un département qui comptera 1 million d’habitants et plus de 500.000 voitures, l’asphyxie sera bien totale, si on suit les politiques qui se focalisent sur le court terme. Il faut agir, a-t-il souligné, et dès maintenant !

Gilbert Annette parle-t-il en son nom ou avec l’accord de Ségolène Royal ?
Paul Vergès s’est demandé si le responsable du Parti Socialiste à La Réunion avait bien évalué le poids de sa déclaration. En effet, l’ancien maire de Saint-Denis a critiqué dernièrement l’accord conclu entre Dominique de Villepin et le président du Conseil régional à propos du péage accordé à une concession privée. Selon ses dires, il faudrait que l’Etat assume la totalité de cet engagement, soit 215 millions d’euros. Paul Vergès a alors demandé si Gilbert Annette parlait avec l’autorisation de Ségolène Royal. Il estime qu’une telle déclaration a été faite sans que celle-ci ait été consultée. Néanmoins, il en a profité pour demander publiquement quelle est la position de Ségolène Royal sur ce point. Interrogé par un journaliste qui lui demandait quelle serait sa consigne de vote si la candidate socialiste refusait de soutenir ces 2 grands chantiers, Paul Vergès a répondu :
« Si Ségolène dit non, je n’appellerai pas à voter pour elle. Mais je suis persuadé qu’elle n’a pas été consultée à ce sujet ».

MD


Commentaire

RFO escroc !

Hier soir, rendant compte de la conférence de presse de Paul Vergès, Télé-Réunion a renoué avec un genre que l’on croyait appartenir au passé de FR3-mentèr.
À la suite de la signature du protocole d’accord État-Région, vendredi dernier, Gilbert Annette et Jean-Claude Fruteau, emboîtant le pas à Jean-Paul Virapoullé et Cyrille Hamilcaro, ont déclaré que, concernant la route littorale, la responsabilité de l’État étant totale, c’était à lui et à lui seul de payer l’intégralité des travaux et que, par voie de conséquence, la Région n’avait pas à mettre le moindre euro pour cette route.
Se référant aux prises de position publiques du Député européen Jean-Claude Fruteau et de Gilbert Annette, représentant officiel de Mme Royal à La Réunion, Paul Vergès a dit avoir la conviction que Mme Royal n’était pas informée des déclarations de son représentant officiel à La Réunion.
Pourquoi Paul Vergès a-t-il la conviction que Mme Royal ne sait rien des prises de positions que tentent de lui faire endosser MM. Annette et Fruteau ?
Tout simplement parce que les déclarations de ces deux personnages ne peuvent s’interpréter que de deux façons.

Mme Royal, dans l’éventualité d’une victoire, devenue chef de l’État déciderait :

1 - de suivre le raisonnement de son représentant officiel à La Réunion et, revendiquant la responsabilité exclusive de l’État sur la route littorale, déciderait non seulement de prendre en charge les 215 millions d’euros actuellement manquants mais, pour épouser totalement les positions de Gilbert Annette et Jean-Claude Fruteau, prendrait également à la charge de l’État la part des 800 millions d’euros que la Région s’est engagée à mobiliser sur ce chantier ;

2 - de ne pas respecter le principe de continuité de l’État et remettrait en cause les termes de l’accord. Cet accord ainsi anéanti, tout serait à reprendre à partir de zéro et ce qui aurait pour effet de retarder la livraison de la nouvelle route du Littoral au-delà de 2017.

Chacun le voit bien, c’est tout l’un ou c’est tout l’autre, ou alors, si ce n’est ni l’un, ni l’autre, cela signifierait que M. Annette, représentant officiel de Mme Royal, et M. Fruteau causent la bouche ouverte, tentant de ravir à Jean-Paul Virapoullé son rôle de “chargeur de l’eau”.

Telles sont les conclusions auxquelles nous sommes bien obligés de parvenir.

Pour sa part, Paul Vergès a dit et répété, y compris devant les caméras et micros de RFO, qu’il avait la conviction que Mme Royal ignorait tout des déclarations de son représentant officiel à La Réunion. Mais, si, pure hypothèse, Mme Royal reprenait à son compte les déclarations de G. Annette et J-Cl. Fruteau, alors, en sa qualité de Président de la Région, il en informerait les Réunionnais.
Tels sont les faits.
Mais, pour Télé-Réunion, cette information ne lui apparaissait sans doute pas suffisante car voici les propos qu’elle a imputés à Paul Vergès.
Dans ce cas, Paul Vergès appellerait au vote sanction en faisant voter pour le candidat de droite comme il l’a déjà fait pour Jacques Chirac en 1995 .

Premier mensonge : Paul Vergès n’a pas parlé de vote sanction. Second mensonge : Paul Vergès n’a jamais dit que, dans cette hypothèse, il appellerait à voter pour le candidat de droite. Troisième gros mensonge : en 1995, Paul Vergès n’a jamais appelé à voter pour Jacques Chirac.
Conclusion : par cette accumulation de mensonges, tous plus énormes les uns que les autres, RFO-Télé, “service public d’information”, a renoué avec une tradition d’escroquerie intellectuelle dont tous les Réunionnais espéraient qu’elle s’était guérie. Et pour une rechute, la station du Barachois a fait très fort ! Aura-t-elle la décence de rétablir la vérité ? Réponse demain.

Jean Saint-Marc



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