La Déclaration finale adoptée par la session extraordinaire du Conseil de la COI

Prise en compte de la spécificité de La Réunion

14 novembre 2007, par Manuel Marchal

La déclaration adoptée le 10 octobre 2007 aux Seychelles par les pays de la Commission de l’Océan Indien réunis en session extraordinaire propose de considérer l’Article 299-2 du Traité d’Amsterdam qui permet à La Réunion de bénéficier de mesures spécifiques tenant compte de sa situation particulière. Cette prise en compte s’inscrit dans les négociations d’un Accord de partenariat spécifique entre l’Union Européenne et Maurice, Madagascar, les Comores et les Seychelles.
Autrement dit, si un APE est signé entre l’Union Européenne et nos quatre voisins, la fragilité de l’économie réunionnaise sera prise en compte. Voici de larges extraits de cette déclaration, dont certaines expressions sont soulignées par la Rédaction.

Ce que proposent Maurice, Madagascar, les Comores, les Seychelles en présence de La Réunion à l’Union Européenne :

« Les Ministres de l’Union des Comores, de la République de Madagascar, de la République de Maurice et de la République des Seychelles (le Groupe CMMS), en présence du Président du Conseil régional de La Réunion, tous pays membres de la Commission de l’Océan Indien (COI) : (...)

Réaffirmant que l’APE est un instrument pour le développement durable des pays ACP ainsi qu’un instrument pour la promotion de l’intégration régionale et pour l’intégration harmonieuse de ces pays dans l’économie mondiale.

Réaffirmant leur engagement à la conclusion d’un APE entre le groupe AfOA et l’Union Européenne ;

(...)

Considérant l’article 35(3) de la Déclaration XXVIII de l’Accord de Cotonou (AC) ainsi que l’Annexe III du Protocole 1 de cet Accord reconnaissant la spécificité des États insulaires dont les handicaps structurels permanents entravent le développement durable ;

Considérant également l’Article 299 alinéa 2 du Traité instituant l’Union Européenne reconnaissant le besoin d’adopter des mesures spécifiques concernant les Régions Ultrapériphériques qui prévoit la possibilité de leur accorder un traitement différencié dans le cadre de la politique commerciale de l’Union Européenne ;
(...)

Reconnaissant, d’une part, l’état d’avancement des négociations des APEs entre l’AfOA (pays ACP d’Afrique orientale et australe dont font partie Maurice, Madagascar, les Comores et les Seychelles - NDLR) et l’Union Européenne, et d’autre part, les risques existants de ne pas conclure les négociations dans les délais prescrits qui pourraient avoir une conséquence néfaste dans les relations commerciales entre les pays de l’AfOA et l’Union Européenne ;

1. Décident de constituer au sein de l’AfOA un sous-groupe (CMMS - Comores, Madagascar, Maurice, Seychelles) afin d’accélérer le processus de négociation et la conclusion d’un APE dans les délais prescrits ;

2. Décident de s’assurer que tout APE prendra en considération les spécificités des îles de l’Océan Indien ainsi que leurs besoins de développement durable ;

3. Décident d’adopter à titre conservatoire et dans l’hypothèse où les négociations AFOA-UE n’aboutiraient pas avant le 31 décembre 2007, une offre collective du groupe CMMS sur l’accès au marché et une position commune sur l’aspect développement de l’APE, y compris les ressources additionnelles afférentes afin d’aider les CMMS à mieux s’adapter à la situation que posent la libéralisation du commerce et la réforme économique ;

4. Décident de se réunir à la fin du mois d’octobre 2007 pour un constat sur l’état d’avancement des négociations de l’APE au sein de l’AfOA, et prendre, en conséquence, les mesures qui s’imposent dans le but d’éviter toute rupture dans les relations commerciales entre le CMMS et l’UE ;

5. Demandent au secrétariat de la COI d’explorer et de proposer les mesures appropriées pour canaliser les ressources pour le financement de l’ajustement des CMMS liées à la mise en œuvre de l’APE et aux contraintes que pose leur insularité ;

6. Décident également de développer une coopération renforcée avec La Réunion, Région Ultrapériphérique de l’UE. »


Commentaire

Le co-développement solidaire pour tous

Six mois après l’offre de l’Union Européenne aux pays ACP, les négociations piétinent toujours dans le groupe régional AfOA (Afrique orientale et australe). Une des raisons invoquées est l’appartenance de nombreux pays de ce groupe à celui des PMA (pays dits "les moins avancés").
Les PMA bénéficient déjà d’un accès sans quota, ni droit de douane au marché européen. C’est d’ailleurs ce que rappelle l’Union Européenne dans son communiqué en date du 4 avril 2007 (voir ci-contre).
Pour Maurice et les Seychelles, la signature d’un Accord de partenariat économique est une question vitale pour leur économie. En effet, l’accord régissant les relations commerciales entre ces pays et l’Union Européenne prend fin le 31 décembre prochain (Accord de Cotonou).
Pour pouvoir continuer à bénéficier d’un accès préférentiel au marché et pour ne pas être en concurrence directe avec les PMA au coût de production bien moins élevé, Maurice et les Seychelles doivent prendre l’initiative pour qu’un APE soit signé avant la fin de l’année.
Par ailleurs, il est essentiel que l’APE ne signifie pas une mise en concurrence des producteurs de la région. Cette préoccupation partagée va déboucher sur la rencontre des Seychelles, le 10 octobre dernier.
La déclaration finale du Conseil des ministres de la COI débouche sur un acte fondateur du co-développement solidaire de Madagascar, Maurice, les Comores, les Seychelles et La Réunion. Ce document souligne en effet que l’APE spécifique à la COI dynamisera l’intégration régionale et contribuera au développement durable.
C’est donc un large progrès par rapport à l’offre de l’Union Européenne. Car ce qui n’apparaît pas dans le communiqué de Bruxelles daté d’avril, à savoir la prise en compte des spécificités de La Réunion, est écrit en toute lettre dans la déclaration finale de la session extraordinaire de la COI :
« Considérant également l’Article 299 alinéa 2 du Traité instituant l’Union Européenne reconnaissant le besoin d’adopter des mesures spécifiques concernant les Régions Ultrapériphériques qui prévoit la possibilité de leur accorder un traitement différencié dans le cadre de la politique commerciale de l’Union Européenne », les représentants de Madagascar, de Maurice, des Comores et des Seychelles, en présence du président de la Région Réunion, « décident également de développer une coopération renforcée avec La Réunion, Région Ultrapériphérique de l’UE ».
Sur cette base, la signature d’un Accord de partenariat économique entre, d’une part, Madagascar, Maurice, les Comores et les Seychelles, et d’autre part, l’Union Européenne veut dire que les intérêts de La Réunion, d’une part, membre de la COI, et d’autre part, Région Ultrapériphérique de l’Union Européenne, sont préservés. Car il sera tenu compte des facteurs qui font que La Réunion a droit au statut de Région Ultrapériphérique. De plus, ce sont les pays ACP de la région qui reconnaissent à La Réunion le droit à un traitement spécifique.
À la place de la concurrence sauvage, l’APE concernant la COI mise sur l’équilibre et ouvre la voie au co-développement solidaire de La Réunion et des peuples voisins.

M.M.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus