Qui défend les Réunionnais ?

Projet de budget 2015 : fossé entre le discours tenu à La Réunion et les actes accomplis à Paris

5 novembre 2014, par Manuel Marchal

Deux mois après la visite de Hollande, le PCR a alerté la population sur un nouveau coup porté aux planteurs. Rien de ce qui avait été annoncé par le président de la République n’est dans le projet de Budget 2015. Il a fallu que ce scandale soit rendu public à La Réunion pour qu’enfin une réaction se dessine. La mobilisation de dernière minute des députés suffira-t-elle ?

Financement du logement social, menace sur la filière canne, soutien aux entreprises, emplois d’avenir : l’intergroupe des parlementaires de l’Outre-mer demande au gouvernement de revoir sa copie. Le projet de budget 2015 ne répondent pas aux engagements du gouvernement, souligne l’intergroupe qui a fait par écrit ses observations au président de la République. Cette lettre a été rendue publique dans la nuit de lundi à mardi.
Voici comment Georges Patient, président de l’Intergroupe parlementaire des Outre-mer, présente l’initiative de cette instance :
« l’Intergroupe Parlementaire des Outre-mer (IgPOm), a adressé au Président de la République vendredi dernier 31 octobre 2014. Il y rappelle que les parlementaires ultra-marins restent vigilants sur le respect des mesures annoncées par le Président de la République lors de ses derniers déplacements dans les Outre-mer et souhaitent vivement leur reprise dans le projet de loi de finances 2015. Ces mesures concernent :
- le crédit d’impôt compétitivité emploi ;
- le logement ;
- l’agriculture ;
- les emplois d’avenir ;
- les dotations relatives à la Polynésie française au sein du budget des Outre-mer. »

Le PCR alerte la population

Sur le CICE, l’Intergroupe demande qu’il grimpe à 12%. Pour le logement intermédiaire, c’est la revendication de porter le plafond de défiscalisation de 10000 à 18000 euros afin de relancer une filière en panne.
Pour l’agriculture, l’Intergroupe alerte sur la baisse de la subvention à la filière canne, et interroge sur ce qu’il advient de l’aide annuelle supplémentaire de 38 millions d’euros à partir de 2017.
Pour les emplois d’avenir, c’est la demande d’étendre à tous les départements d’outre-mer le soutien de l’État à hauteur de 90% du salaire net promise pour La Réunion.
La publication de la lettre a coïncidé avec celle de l’article de Témoignages relatant l’initiative de la Chambre d’agriculture de La Réunion. Cette dernière a alerté François Hollande sur la baisse prévue des crédits alloués par l’État à la filière canne.

Hier matin, le PCR a fait part de sa solidarité avec les planteurs en alertant l’opinion sur la manœuvre prévue par Paris, bien différente du discours tenu par François Hollande à La Réunion. Le PCR appelait aussi les députés à se bouger.

Propos rassurants des députés contredits

Parmi ces derniers, deux d’entre eux ont choisi de rendre publiques leurs actions. Jean-Jacques Vlody et Jean-Claude Fruteau disent : les doléances sont entendues par le gouvernement. Il reste à confirmer ces propos dans la discussion parlementaire.

Le gouvernement sait que La Réunion est en crise. Lors de sa visite, François Hollande a tenu des discours rassurants. Il a dit ce que ses interlocuteurs attendaient. Agriculteurs, patrons, élus… : beaucoup ont applaudi et ont dit que le président de la République les avait entendus.
Trois jours après la visite, voici ce que disaient des parlementaires socialistes, cité par le JIR.

Jean-Claude Fruteau : « Il y avait tant d’attente et il y a eu tant de résultats ».
Jean-Jacques Vlody : « Si après cette visite, il y a encore des critiques, alors on pourra les taxer de mauvaises fois ».
Patrick Lebreton : « Nous voulons que ce qui a été annoncé devienne réalité et le plus vite possible. La concrétisation, c’est maintenant ».
Quant à Michel Vergoz, il disait que François Hollande « a retourné la tendance en une journée ».
La veille, Monique Orphé avait jugé la visite très positive, car les Réunionnais n’avaient pas été traités « d’assistés ». Et elle avait donné la liste des fonds promis.

Qui défend les intérêts des Réunionnais ?

Deux mois plus tard, la présentation du projet de budget 2015 est en contradiction avec ces propos si enthousiastes. Le texte montre le fossé entre les promesses et les actes. Même les députés qui ont vanté le bilan de la visite de François Hollande sont obligés de reconnaître par écrit que le compte n’y est pas et qu’il a fallu qu’ils interviennent de nouveau pour qu’une partie de ce qui a été dit puisse avoir tout de même une chance d’être voté.
Cette situation pose deux questions.

Tout d’abord, comment expliquer qu’avec autant de députés de La Réunion membres de la majorité, les annonces de François Hollande à La Réunion ne se soient pas concrétisées dans le projet de loi présenté par le gouvernement ?
Ensuite, si le PCR n’avait pas alerté publiquement toutes les couches de la population, les députés auraient-ils été si prompts à réagir ?

Ce débat autour du projet de Budget 2015 permet en tout cas de constater que l’objectif du gouvernement est clair : l’austérité doit s’appliquer à La Réunion même si sa situation est sans aucune comparaison avec celle de la France. Or, si les interventions de dernière minute des députés sont suivies d’effet, elles ne remettent pas en cause l’essentiel : la baisse des dépenses de l’État, et la diminution de la subvention aux collectivités qui a des traductions bien concrètes pour la population. Ce qui veut dire que la situation va encore se dégrader après le vote de l’Assemblée.

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