Borloo et Daubresse attendus avec impatience

Que viennent faire ces deux ministres ?

14 décembre 2004

Lorsque Jean-Louis Borloo et Marc-Philippe Daubresse seront à La Réunion, le plan Borloo sera déjà voté. ’Un manque de respect’, estime le PCR, qui considère que les formules d’emplois aidés contribuent à organiser la précarité dans le temps.

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Jean-Louis Borloo et Marc-Philippe Daubresse sont attendus dans notre île les 22 ou 23 décembre. Que viennent faire au juste ces deux ministres, celui de la Cohésion sociale et celui du Logement ? Le Parti communiste réunionnais se le demande et les attend avec toute une série de questions auxquelles ils devront répondre, tout comme ils devraient répondre aux attentes des Réunionnais.
Si le plan de cohésion sociale se donne trois priorités (l’emploi, le logement et l’égalité des chances) auxquelles s’ajoutent d’autres dispositions gouvernementales, le texte, pas encore terminé, suscite des controverses. Il a été adopté en première lecture ; une deuxième lecture est prévue au Sénat le 16 décembre et à l’Assemblée le 20 décembre. Le texte pourrait être appliqué dès le 1er janvier.

5 ans, et après ?

Au-delà des polémiques, deux éléments retiennent l’attention du Parti communiste réunionnais (PCR). Premièrement, ce plan a une durée de 5 ans (2005-2009) et ne reprend même pas l’échéance fixée pour l’Outre-mer par la loi-programme qui, elle, doit durer 15 ans.
Éric Fruteau soulignait que concrètement, des mesures, plus ou moins pérennes jusqu’ici, sont supprimées et remplacées par des dispositions dont les financements sont assurés jusqu’en 2009 mais pas au-delà. Concernant les emplois aidés, les CES (contrats emploi-solidarité) existaient depuis 1989. Ils vont disparaître et seront remplacés par des nouveaux contrats dont les financements sont assurés pour 5 années maximum. Rien n’est prévu au-delà.
Jean-Louis Borloo va-t-il obtenir les moyens de mener à bien son plan ? Le PCR en doute. La hausse du pétrole et le taux de change entre le dollar et l’euro sont des éléments extrêmement négatifs pour le budget de l’État, menant vers une diminution de l’activité économique, une augmentation du chômage et des rentrées fiscales moins importantes. Le tout conduit à une baisse de croissance, base des projets gouvernementaux.
Le point de vue exposé par Éric Fruteau est clair : "Si le prix du pétrole reste élevé et si le dollar est toujours affaibli, en 2005 comment mettra-t-on en application le plan Borloo ?"
Au cours des débats parlementaires, la nécessité de tenir compte des spécificités domiennes a été soulevée. Plus spécialement en matière de politique de logements sociaux. Jean-Louis Borloo a reconnu la nécessité d’une adaptation. C’est lors de ses débats que la visite ministérielle a été annoncée. Une visite à l’approche des fêtes où de nombreux responsables politiques ou syndicaux risquent de ne pas être disponibles. Lorsque les deux ministres seront dans l’île, la loi sur la cohésion sociale aura été votée.
Qui peut croire qu’ils viennent nous consulter sur un texte qui sera alors adopté ? Pour le PCR : "il y a de la désinvolture, un réel manque de respect dans l’attitude du ministre qui vient nous voir quand son texte est bouclé".

Des mesures inadaptées, sources de dérives

Jean-Louis Borloo viendrait à La Réunion pour mettre en œuvre un "contrat d’application territoriale" du plan, sans aucune lisibilité. Pour le PCR, il arrive au plan Borloo "ce qui est arrivé au cours des 30 dernières années pour toutes les mesures sociales prises en fonction du contexte métropolitain et étendues à l’Outre-mer. Ou bien ces mesures se révèlent inadaptées, ou alors elles conduisent à des dérives". Le PCR maintient que la seule solution pour notre île est de construire ensemble un véritable plan réunionnais où chaque citoyen pourra s’investir pour décider de notre avenir commun.
En termes d’égalité des chances, les retards de notre système éducatif sont connus : les manques d’encadrement et d’équipement sont lisibles à travers nos taux de réussite aux différents examens (67,5% de reçus au brevet contre 78,6% en Métropole ; 74,3% au bac contre 78,6% en 2002). Mais, plus accablant est le nombre d’illettrés recensés : entre 100 et 120.000.
Aussi le PCR pense qu’au regard de notre situation (lire nos encadrés) et au nom de l’expérience passée, "nous ne pouvons nous contenter d’une simple adaptation du plan Borloo. Il faut un véritable plan de cohésion sociale réunionnais qui tienne compte des défis qui nous sont posés". C’est du moins ce que le PCR attend de cette visite. Plus encore, le parti attend des réponses concrètes à des problèmes concrets.
Les formules d’emplois aidés que proposent le plan (contrat d’accompagnement, contrat d’avenir) ressemblent aux CES, CEC, CIA. Mais ce sont des formules modernisées. Elles contribuent, à partir des fonds publics et de l’apport des collectivités, à organiser la précarité dans le temps. Malgré l’échec des formules précédentes, le gouvernement poursuit dans la même voie.

Questions ouvertes au ministre

Le Parti communiste réunionnais pose donc un premier préalable : "Que les personnes qui sont actuellement en CES, CEC, CIA ne restent pas au bord du chemin. Elles doivent toutes trouver une nouvelle activité avec les nouveaux contrats aidés". Le PCR demande au ministre s’il compte, en cinq ans, réduire de manière significative le taux de chômage à La Réunion. Quel est l’objectif qu’il se fixe ? Quels moyens compte-t-il mettre en œuvre pour réduire le nombre de érémistes ?
En ce qui concerne les logements sociaux, comment le gouvernement compte-t-il arrêter la courbe descendante des constructions ? Quels moyens va-t-il mettre en œuvre pour rattraper les retards et faire face à la pression démographique ? Comment sera réglée la question du coût du foncier ? Quels moyens pour maîtriser l’aménagement et l’urbanisme ?
Cela fera un an et demi que des Assises du logement se sont tenues dans l’île. Toute la profession, tous les acteurs du secteur ont débattu et ont fait des propositions. Celles-ci balaient tous les problèmes possibles. Elles ont été rassemblées en un Livre Blanc qui a été adressé au gouvernement. Quelle est la réponse concrète du gouvernement aux problèmes exposés dans le Livre Blanc ?
Comment réduire le nombre d’illettrés ? Quels moyens seront donnés pour réduire les retards de notre système éducatif ? Comment réduire les inégalités de revenus ? Comment le gouvernement espère-t-il éviter un élargissement de la fracture numérique ? Comment répondre aux inquiétudes crées au sein de la population par le développement de l’insécurité ? Comment régler le problème des journaliers communaux ? La cohésion sociale ne pouvant se faire sans cohésion culturelle, comment met-on celle-ci en œuvre ?

Eiffel


Logement social : la crise inscrite dans les faits

La situation ne cesse de se dégrader. Hier en conférence de presse, Éric Fruteau abordait la question du logement social. Nous sommes passés de la construction de 1.900 logements locatifs par an (1990-1994) à 2.500 pour la période 1995/1999, à 1.300 pour 2000/2004. Va-t-on descendre vers 1.000 logements locatifs par an pour la période 2005/2009 ?
La crise est inscrite dans les faits. Des opérations déjà financées ne se réalisent pas. La raison principale évoquée est la hausse des coûts de construction. Les appels d’offres se concluent de plus en plus par des échecs. Les offres des entreprises dépassent souvent de 25 à 30% l’enveloppe de financement de l’opération.
Or les règles de financement de la LBU (ligne budgétaire unique) imposent des prix plafonds. En réalité, les entreprises privilégient les opérations liées à la défiscalisation au détriment des opérations de logements sociaux.
La LBU elle-même est en baisse. En début d’année, on annonçait 85 à 90 millions d’euros pour la LBU 2004. Alors que l’exercice se termine, on est loin du compte. Il y aura eu en fait 58 millions d’euros d’autorisations de programme. La baisse est sensible : de l’ordre de 30%.
Autre motif d’inquiétude : l’absence de solution pour financer les aménagements de terrains. De nombreuses opérations ne pourront voir le jour qu’en passant par un apport du FRAFU (Fonds régional d’aménagement foncier et urbain). Celui-ci a déjà épuisé ses ressources financières jusqu’en 2006. Durant les deux années à venir, le déficit en aménagement du foncier va assécher le lancement d’opérations.


An plis ke sa

o Sursis d’un an pour les CES et CEC. Lors de sa conférence de presse du 22 novembre dernier, le PCR avait mis l’accent sur un point : la suppression dès le 1er janvier des CEC et des CES, leur remplacement par de nouveaux contrats et les problèmes induits.
Cette question a trouvé écho lors des débats de l’Assemblée nationale. Interpellé à ce sujet, le ministre délégué aux relations du travail Gérard Larcher a accepté le principe d’un sursis d’un an : les CES et CEC seront supprimés outre-mer au 1er janvier 2006 et non pas au 1er janvier 2005.

o Adaptation de la loi de cohésion sociale à La Réunion ? Plusieurs ministres sont intervenus dans le débat. Gérard Larcher, ministre délégué, ne parle pas d’adaptation pour les nouveaux contrats. MM. Daubresse et Borloo, eux, acceptent l’idée d’une adaptation mais semblent vouloir la limiter au seul problème du logement.

o Emploi : ce que Raffarin à défait. En 2003, les CES, CEC et CIA - une sorte de CES adapté à l’Outre-mer - étaient au nombre de 40.452. Ils représentaient 88,5% de l’ensemble des emplois aidés (45.684). Or le nombre des emplois aidés n’a cessé de diminuer : ils étaient 55.981 en 2001.
Les Contrats jeunes en entreprise, Projets initiative jeune ou encore le RMA qui ont été proposés par le gouvernement Raffarin n’ont pas connu de succès : en deux ans, moins de 30 contrats RMA ont été signés. Dans le même temps, le chômage a augmenté.


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