Qui a peur de Pierre Vergès ?

1er juin 2011, par Geoffroy Géraud-Legros

Sous couvert de compte-rendu d’un rapport officiel, le JIR s’est livré hier au lynchage en règle de Pierre Vergès. Décryptage.

Face à la perspective de l’échec ou de l’impossibilité d’atteindre un objectif, le bon sens politique veut que les élus, qui portent la responsabilité de l’élaboration et de l’exécution des politiques publiques, adoptent une stratégie aussi compatible que possible avec les buts qu’assignent l’intérêt général. Cela peut impliquer des révisions - qui peuvent être déchirantes- ou des ajustements, des réflexions, voire des critiques internes ou même externes, toutes attitudes qui intègrent un minimum de responsabilité. Toute autre est la posture qui consiste à systématiquement rechercher ailleurs que chez soi les causes de ses échecs. Ce fut très largement l’attitude de Didier Robert et de son équipe après leur prise de contrôle de la direction de la région. À chaque obstacle rencontré ou presque, le président de Région s’est adressé à la presse pour imputer à l’équipe précédente la responsabilité de ses échecs. Bien souvent, d’ailleurs, en des termes excessifs, étudiés pour mobiliser l’attention de médias qui, dans notre île, font souvent primer la polémique sur les questions de fond. On a ainsi pu entendre M. Robert menacer la présidence sortante de « poursuites », « procès », et d’autres choses aussi peu sérieuses. Il n’y a, bien entendu, eu ni poursuites, ni procès ; mais le but, qui consistait à dévier l’attention civique par les attaques personnelles et les accusations gratuites, était atteint.

L’exemple vient d’en haut

Ce procédé de diversion peut-il être délégué ? C’est en tout cas ce que laissent croire certaines démarches médiatiques, dont le dossier, assorti d’une "une" affichant le visage de Pierre Vergès, vice-président du Conseil général, est la dernière en date. Argumentaire central des « papiers » : un rapport de la Chambre régionale des comptes consacré à quelques années de gestion de la SR 21, alors sous la responsabilité de M. Vergès. Une offensive médiatique qui arrive au moment précis où la consultation publique relative à la route littorale s’achève… et fait d’ores et déjà ressortir les contradictions, et pire, l’impopularité d’un projet visiblement irréaliste.

Impostures…

D’emblée, l’article central s’ouvre par une imposture. Dans son introduction (le « chapô » en langage journalistique), l’auteur de la double page prétend donner lecture d’un document « confidentiel ». Or, le rapport n’est plus confidentiel depuis que Pierre Vergès en personne l’a publié sur son blog, précédant d’une semaine la « révélation » de notre confrère du JIR. L’ancien PDG de la SR21 a d’ailleurs fait le choix de présenter entièrement le lourd document, afin de permettre aux nombreux lecteurs qui se connectent quotidiennement à sa page de se faire eux-mêmes leur opinion. En parallèle, il répond, tout aussi publiquement, aux critiques énoncées par la Cour à l’égard de sa gestion passée. D’ailleurs, l’auteur de l’article du JIR, le journaliste Jean-Philippe Lutton, nie lui-même la « confidentialité » précédemment annoncée du dossier en insérant, dans la colonne droite de son article, des extraits du site internet de Pierre Vergès consacrés au commentaire du fameux rapport.

…et manquement aux usages

On pourrait croire que cette insertion, même si elle ne montre que peu de respect envers les lecteurs, a au moins l’avantage d’équilibrer l’article en donnant la parole à celui qu’il vise. Or, c’est tout le contraire : cette référence ne sert qu’à dissimuler le fait que M. Vergès n’a pas été contacté par le journaliste, contrairement aux usages et à la courtoisie la plus élémentaire, d’ailleurs respectés par tous les autres journalistes qui se sont penchés sur le rapport de la Cour des comptes. À cette seconde imposture s’ajoute le procédé, bien connu de la presse populiste, qui consiste à frapper les esprits en multipliant titres et intertitres provocateurs (« Pierre Vergès fait chauffer la carte bleue ») en surplomb de textes qui, en réalité, ne décrivent rien que de très banal et a fortiori rien d’illégal. Tout cela s’accompagne d’un usage systématique et voulu de l’approximation et des termes ambivalents, dont le maniement sert à instaurer une atmosphère de suspicion. L’exercice, au final, s’apparente à un lynchage. Pourquoi ? Sans doute parce qu’au moment où l’UMP s’empresse d’enterrer le plan de développement arrêté sous l’ancienne majorité régionale, la personnalité qui portait le plus essentiel des grands projets dérange plus que jamais…

Geoffroy Géraud-Legros


Deux poids, deux mesures ?

Titulaire de multiples mandats et fonctions, Didier Robert occupe la direction de la SPLA "Maraïna". À ce titre, il perçoit une rémunération qui devrait logiquement faire bondir les enquêteurs du JIR… d’autant plus qu’elle a été instaurée par M. Robert lui-même, alors que son prédécesseur Paul Vergès ne touchait pas un centime pour ces fonctions. Mais quelque chose nous dit que pareille investigation n’est pas près d’avoir lieu…

Pierre Vergès

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Messages

  • Merci de remettre les choses a leur place. Ce pseudo-travail de la CRC est clairement une commande politique contre PV et l’analyse réalisée est clairement a charge. C’est un requisitoire contre la SR21 qui est livre pour tenter d’atteindre PV et la Region mais aussi la pertinence des politiques menees.
    Il est SCANDALEUX qu’un service de l’Etat puisse proceder impunement de la sorte...
    Tout cela contribuera a une mefiance encore plus grande envers la classe politique, faisant le lit des populistes, des fascistes et autres ennemis de la democratie.


Témoignages - 80e année


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