La stratégie ultra-libéraliste du ministre des finances

Sarkozy “recycle” l’économie d’outre-mer

6 mai 2004

Le ministre des Finances a dévoilé son plan de relance économique. Bien évidemment, il est d’inspiration ultralibéraliste. Il est bien décidé à partir en chasse contre les “niches fiscales” d’outre-mer, pour “recycler les gains” dans l’économie française. Comme on recycle des déchets.... Et les autres mesures annoncées vont anéantir tous les efforts de rattrapage et de développement.

Les trois objectifs proclamés de Sarkozy : "redresser les finances publiques pour rétablir la confiance", "soutenir l’activité malgré le contexte budgétaire contraint", "engager une politique industrielle volontariste pour affronter la concurrence mondiale".
Du pur credo ultralibéraliste. Mais pouvait-on s’attendre à autre chose de la part du ministre des Finances ? Vente d’or, nouvelle vague de privatisations, exonération d’impôts pour des transmissions - très importantes - de dons (20.000 euros) entre générations, déblocage anticipé des réserves de participation... voici une partie des mesures annoncées.
Le ministre a affirmé qu’il ne se faisait "pas trop d’illusions" sur les capacités de l’Unedic à rembourser rapidement la dette de 1,2 milliard d’euros due par cet organisme à l’État, et dont le réaménagement a été annoncé lundi. "Il faudra d’autres décisions. Comme vous le savez, c’est un domaine qui appartient aux partenaires sociaux". Mais l’on sait comment il aborde la question du dialogue social...

La chasse aux “niches” est ouverte

Mais pour parvenir à ses objectifs économiques et financiers, Nicolas Sarkozy part à la chasse aux déficits et... aux niches fiscales. "Toutes les niches fiscales actuelles seront évaluées d’ici à la fin de l’année" a-t-il expliqué. Ces avantages fiscaux seront "limités à une durée de cinq ans et leur efficacité systématiquement mesurée".
Parmi ces “niches fiscales”, celles qui "sont inutiles ou injustes seront, soit supprimés, soit réformés, et le gain en résultant sera recyclé dans des baisses de taux profitables à tous : le débat sur la baisse des impôts ne peut se réduire à “on la fait ou on ne la fait pas”".
Cette remise en cause des “niches” fiscales, il les justifie en voulant retrouver des marges de manœuvre. Mais des marges de manœuvres générales et non pas pour l’outre-mer, puisqu’en “contrepartie” de leur suppression, il s’engage à affecter les ressources dégagées à la réduction du taux d’impôt sur le revenu.
La manœuvre de Sarkozy est inqualifiable : lorsqu’il explique que
les futures baisses de l’impôt sur le revenu, dépendront de ce qu’on aura pu économiser sur les "niches fiscales indues" (expliquées dans la presse nationale comme des “avantages fiscaux catégoriels”), il contribue à la stigmatisation de l’outre-mer, conforte l’idée que l’outre-mer, c’est “les danseuses de la France”.

Conséquences dramatiques

Comme Nicolas Sarkozy ne veut pas augmenter les dépenses publiques (ni en 2004 ni en 2005), il a donc décidé de “piquer” ailleurs. Et dans les mesures indiquées, ce sont des régions d’outre-mer qui seront le plus mises à contribution. Exemples.
o Baisse des effectifs dans la fonction publique “modulée” suivant les ministères, avec, par exemple le non remplacement de 50% des fonctionnaires partant à la retraite à Bercy. Mais les ROM sont déjà toutes en retard d’encadrement. La mesure Sarkozy va donc définitivement fermer la porte à tout espoir de “rattrapage”. Moins d’enseignants, moins d’agents des postes, de la “sécu” etc.
o Signature d’un "pacte de stabilité interne" avec les partenaires sociaux et les collectivités locales pour éviter que l’État ne soit le seul à faire “des efforts” en termes de limitation de la dépense publique. Mais les régions d’outre-mer sont déjà fortement soumises à contribution, puisque devant faire face à des dépenses que les autres régions de France métropolitaine n’ont pas à supporter : collèges, lycées, routes, logements sociaux etc.
Sans compter tous les transferts liés à la décentralisation. Sans compter toutes les actions menées pour l’insertion des privés d’emploi. Sans compter sur les questions d’aménagement du territoire, de construction de logements, d’équipements divers...
À la veille de défis - les plus importants que La Réunion ait connus ces 30 dernières années -, le coup que vient de porter Nicolas Sarkozy à l’Outre-mer risque de faire très mal.

Dominique Besson


Haro sur les 35 heures !

Également dans la mallette de “casseur social” du ministre des Finances, la réforme structurelle de l’assurance maladie, la réouverture du dossier des 35 heures : "la réforme des 35 heures a été un contresens économique" a annoncé le ministre. "La France est le seul pays au monde qui a réussi cet exploit : affaiblir la valeur du travail dans la société et brider à la fois son offre et sa demande, sans même parler du coût colossal de cette réforme sur les finances publiques. Les 35 heures sont un acquis social. Mais pourra-t-on durablement empêcher ceux qui veulent travailler davantage de le faire alors que parallèlement les dépenses de l’État explosent ? Je souhaite au moins que le problème soit posé". Là aussi, il veut "agir et agir vite" : "Il faudra un jour en parler avec les partenaires sociaux". Nicolas Sarkozy évalue le coût des allégements de cotisations liés aux 35 heures à 10 milliards en 2005.
Et dans la foulée, d’annoncer que l’interdiction d’ouvrir les magasins le dimanche pourrait être assouplie en augmentant le nombre des dérogations.
La casse sociale n’est donc pas finie...


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