Débat sur les Outre-mer au Parlement

Sénat : Paul Vergès appelle à un « nouveau compromis historique »

26 février 2014

Premier parlementaire à intervenir lors du débat au Sénat, Paul Vergès a appelé à jeter les bases d’un nouveau compromis historique conciliant l’intégration de La Réunion dans la République et son insertion dans son environnement régional. 12 orateurs se sont exprimés.

Le débat sur l’Outre-mer a commencé au Sénat. C’est une initiative du sénateur Paul Vergès, et c’est donc lui qui a été le premier à s’exprimer.
Le parlementaire réunionnais a tout d’abord appelé à rompre avec la globalité selon laquelle les collectivités d’Outre-mer sont vues à Paris. Il a souligné la gravité exceptionnelle de la situation sociale dans le pays : plus de 40% de la population sous le seuil de pauvreté, 30% de la population active au chômage.

Formation officielle de l’inégalité base de la crise structurelle

Cela s’aggrave sous le poids de la transition démographique, a poursuivi Paul Vergès.
« La situation que nous connaissons aujourd’hui est l’application mécanique de la politique d’intégration », a-t-il dit en substance. Il rappelle que dès 1946, date du vote de la loi créant les départements d’outre-mer, le gouvernement décida d’étendre le statut colonial à toute la fonction publique au nom de la cherté de la vie : salaires plus élevés, congés en France tous les trois ans, bonification pour les retraites. Les entreprises publiques et le secteur parapublic ont aussi imité la fonction publique.

Mais « l’égalité sociale était refusée au privé pendant 50 ans » La formation officielle de cette inégalité et la progression démographique sont la base de la crise structurelle que connaît La Réunion.

Sentiment partagé : plus de solution dans le cadre actuel

Des lois d’adaptation n’ont pas permis de rompre avec les séquelles de l’exclusive coloniale : 65% des importations de La Réunion viennent de 10.000 kilomètres, c’est-à-dire de France et d’Europe Et le taux de couverture des importations est descendu à 6%
La croissance de notre économie n’a pas été suffisamment endogène, explique Paul Vergès, et le recours aux emplois aidés est impuissant à faire face à une telle situation.
« Le sentiment qu’il n’y a plus de solution dans le cadre actuel et de plus en plus partagé », dit-il en substance. Le modèle de développement arrive à ses limites, le chômage de masse délite la société. Et de rappeler un propos d’Aimé Césaire, qui soulignait qu’une société qui ne produit plus est un fait historique.

Les rendez-vous

Ce diagnostic connu doit être répété tant que des mesures de rupture ne seront pas prises.
Car avec 10.000 habitants de plus par an, La Réunion verra sa population passer de 840.000 en 2013 à un million en 2030. L’économie réunionnaise pourra-t-elle créer suffisamment d’emplois tout en faisant face à la situation actuelle, plus de 150.000 Réunionnais à la recherche d’un travail.

2014 verra la fin du dispositif actuel d’octroi de mer, la déclinaison du Pacte de responsabilité, l’impact de la diminution des dotations sur les collectivités.
La Réunion sera confrontée à l’application des APE libéralisant les échanges entre l’Union européenne, dont faire partie La Réunion, et ses pays voisins.

En 2017, ce sera l’échéance décisive pour la canne à sucre avec la fin du quota sucrier. Le sénateur demande comment faire face au choc de compétitivité marqué par l’ouverture à la concurrence internationale.
Et quelle solution pour les 8.000 TPE réunionnaises surendettées, pour un montant cumulé de 1,2 milliard d’euros ?

Co-développement

Pour Paul Vergès, les défis ne pourront être réglés que dans le cadre d’une politique globale. Et c’est maintenant qu’il faut agir car dans une génération et demi, tout aura changé. L’Inde, la Chine et l’Afrique australe auront poursuivi leur développement. Madagascar sera peuplée par 55 millions d’habitants. C’est la possibilité d’un bassin francophone de 60 millions d’habitants avec La Réunion, les Seychelles, les Comores, Maurice et Madagascar à condition que la Grande île continue de parler français. « Est-on conscient à Paris de cet enjeux stratégique ? »
Paul Vergès souhaite el brassage de notre jeunesse avec celle de l’océan Indien pour que dans le co-développement, La Réunion puisse valoriser ses atouts en matière d’énergies renouvelables notamment.

Autonomie énergétique, autosuffisance alimentaire

« Les objectifs stratégiques d’autonomie énergétique et d’autousuffisance alimentaire fondent les bases d’une nouvelle économie », dit en substance Paul Vergès. C’est pourquoi « le moment est venu de jeter les bases d’un nouveau compromis historique » qui concilie d’une part l’intégration de La Réunion à la République et à l’Europe, et d’autre part l’insertion de La Réunion dans son environnement régional. Ce sera alors une nouvelle ère, dit en substance Paul Vergès.

Sont également intervenus : Pierre Frogier (Nouvelle Calédonie), Joel Guerriau, Eliane Assassi, Jean-Etienne Antoinette, Jean-Claude Réquier, Aline Archambaud, Robert Laufoaulu, Karine Claireaux, Christian Cointat, Georges Patient, Serge Larcher et Victorin Lurel (ministre des Outre-mer).

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