Une question essentielle pour l’avenir de La Réunion n’a pas été évoquée

Silence de la Commissaire européenne sur les APE

8 mai 2015

Au-delà de la canne à sucre et de la route en mer, un autre sujet n’a pas été évoqué par la commissaire alors qu’il est celui qui aura la portée la plus grande dans le temps : l’accord de partenariat économique entre les pays d’Afrique australe et orientale d’une part, et l’Union européenne d’autre part.

Paul Vergès hier en conférence de presse.

Dans sa conférence de presse du 7 mai 2015, tirant le bilan de la visite de Corina Cretu, Commissaire européenne à la Politique régionale, Paul Vergès fait tout d’abord un rappel historique. L’annulation des accords préférentiels entre Union européenne et les pays ACP par l’OMC a entraîné une solution préconisée par la partie européenne. C’est le regroupement de ces pays par grandes unités régionales dans un objectif d’intégration économique. Ceci a pour but de signer des accords commerciaux entre l’Europe et chaque bloc régional, ce qui permet d’avoir une solution de remplacement pour poursuivre les relations entre l’UE et les pays ACP. Ces accords sont les APE, accords de partenariat économiques. Avant la signature définitive, les relations sont régies par le cadre d’un accord intérimaire.

Le régime des RUP dépassé

La Réunion est concernée par ces accords. Celui que l’Europe s’apprête à signer avec les pays voisins de notre île va mettre fin à une période de trois siècles et demi : c’est la fin de l’intégration exclusive de La Réunion à la France puis à l’Europe. La mondialisation va imposer une autre intégration, au grand espace économique qui va du Cap à l’Ethiopie.

Le régime des RUP était la définition d’une politique d’intégration à l’Europe, rappelle Paul Vergès. Mais une situation nouvelle se met en place.

C’est la visite du chef du gouvernement indien dans les îles récemment : à Maurice et aux Seychelles. Visite de Narendra Modi à Paris a été marqué par son message aux Réunionnais d’origine indienne, avec une déclaration qui n’a aucun respect de la tradition intégrationniste française. Le Premier ministre indien a dit à ces Réunionnais qu’au-delà du passeport, « dans vos veines coule du sang indien ».

Les conditions d’un changement décisif

L’impact de la croissance démographique est un autre exemple : Madagascar avait 4 millions d’habitants en 1947, aujourd’hui plus de 23 millions, et 55 millions en 2050. C’est « une rupture révolutionnaire, à 800 kilomètres de chez nous, un Etat 50 fois plus peuplé que nous ».
C’est comme si pour la France allait exister à 800 kilomètres de Marseille un État de plus de 3 milliards d’habitants.

« C’est un événement inévitable que nous allons connaître ». Et cela pose des questions : quelles sont les dispositions que l’Europe et la France pour préparer l’inévitable ? Comment continuer notre intégration avec l’Europe d’une part, et avec la région d’autre part ? C’est un des problèmes les plus difficiles à résoudre.

« Comment se fait-il que la commissaire n’ait pas dit un mot sur ce qui va bouleverser La Réunion », interroge Paul Vergès.
Il constate aussi un silence total des députés sur cette visite, à l’exception de Thierry Robert qui a publié une lettre ouverte.

Cette période où se créent les conditions d’un changement décisif nous rappelle 1945-46, quand il y a eu l’abolition du statut colonial et la transformation en département, dit en substance Paul Vergès. Tout le monde sait qu’on ne peut pas continuer comme avant. « C’est le défi au monde politique de La Réunion. Tout le reste n’est que communication », conclut Paul Vergès.

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