L’appel au rassemblement lancé par Paul Vergès

« Sortir La Réunion de l’impasse »

10 mai 2013, par Céline Tabou

A l’occasion d’une conférence de presse, le 6 mai, le Sénateur Paul Vergès a évoqué son analyse de la situation internationale et réunionnaise. Ce dernier a conclu qu’il était aujourd’hui indispensable de se rassembler pour le développement de La Réunion.

Le tiers des dépenses de l’État pour La Réunion sont les salaires des agents. Ce flux financier est la conséquence d’une décision prise à l’époque où il n’y avait que 3.000 fonctionnaires à La Réunion. La croissance démographique et l’augmentation des effectifs ont créé un flux financier qui a donné un marché aux monopoles.
(photo Toniox)

Evoquant plusieurs propositions pour « sortir La Réunion de l’impasse » , le cofondateur du PCR a mis en exergue les prochains défis de l’île en matière d’autonomie énergétique, d’autosuffisance alimentaire, de sur-rémunération, mais aussi le coût de la vie.

Un monde en mouvement

« Tout le monde parle des pirates somaliens alors que les ONG disent que dans un passé récent, la Somalie a connu une situation telle que 258.000 personnes, en grande majorité des enfants, sont mortes de faim et tout le monde dit que cela va s’aggraver », a expliqué Paul Vergès. Ce dernier a mis en parallèle l’imprévisibilité des phénomènes climatiques qui touche tous les territoires, de la France avec les inondations à la Californie avec les incendies. Ce changement climatique pèse de plus en plus sur les États, mais particulièrement sur les populations dont la transition démographique n’est pas terminée.

En effet, la hausse de la population ajoutée à la mondialisation des échanges demande « à voir comment les éléments vont peser sur toute la planète et dans le siècle » . D’ailleurs, « la crise traine depuis cinq ans et va continuer à s’aggraver », a expliqué Paul Vergès évoquant le contexte dans lequel évolue la crise, « avec les changements totaux des situations économique, politique, sociale du monde. C’est la fin de 4 siècles de domination occidentale pour revenir à l’ancien équilibre » .

Situé au carrefour des civilisations et des échanges commerciaux mondiaux, La Réunion est proche du continent africain en pleine expansion économique et des États asiatiques dont l’émergence s’intensifie plus vite que prévu. « Comment s’annonce l’avenir de La Réunion dans l’immédiat et le lointain ? », a posé Paul Vergès. En effet, la crise de la dette souveraine en Europe a un impact direct sur l’économie réunionnaise qui doit composer avec des difficultés structurelles dues aux décisions politiques prises dans le passé et une conjoncture économique et politique complexe.

Des inégalités croissantes

« A La Réunion, reposent sur nous des travers politiques » , notamment la politique des revenus, a expliqué Paul Vergès. D’après le rapport sur le budget de l’État en 2012, fourni par la Préfecture, les dépenses de l’État en 2012 étaient de 5,550 milliards d’euros, dont une dépense de personnel de 31%. Il s’agit là du transfert des flux financiers de Paris vers La Réunion, a-t-il indiqué. Les dépenses de fonctionnement seraient de 2%. Les frais de personnel représentent globalement près d’un tiers des dépenses de l’État vers La Réunion.

Concernant l’investissement, celui représente 1%, « si on ajoute les fonds européens, 4% », a expliqué le sénateur. Ce dernier a précisé : « Il s’agit d’une réalité, il y a une obstination à poursuivre la politique menée depuis 1947 ». Celle-ci correspond à la prise en compte par l’État de la cherté de la vie pour les fonctionnaires d’État, qui sont rémunérés 53% de plus que le salaire de France. Cette situation a créé des inégalités et un écart entre les personnes les plus riches et les plus pauvres.

La cherté de la vie, les inégalités salariales et la dégradation de la situation économique et sociale de La Réunion ont entrainé une multiplication des mouvements de contestation, des jeunes manifestants à la grève à Carrefour en passant par la grève sur l’enceinte portuaire et des agents communaux pour la titularisation, Paul Vergès indique que « cela va s’intensifier. L’avenir, c’est quoi ? ». « Est-ce qu’avec les mesures gouvernementales, la hausse de la dette, hausse des mesures sociales, les conséquences vont-elles être bénéfiques, considérables et irréversibles ? », a posé ce dernier.

D’autant plus que par le passé, l’État aurait pu interrompre ce privilège à ses employés et non l’étendre, a dénoncé Paul Vergès. « Le complément colonial avec le franc CFA était de 100%, soit deux fois plus qu’en France ». Evoquant les propos de Raymond Vergès, le sénateur aura retenu que ce complément colonial « sera la perte de La Réunion ». Car en étendant cette surrémunération à l’ensemble de la fonction publique, les autorités n’avaient pas pris en compte la hausse démographique créant « le plus gros flux financier de France. On a divisé la société réunionnaise en deux, d’un côté les fonctionnaires et de l’autre les travailleurs ».

Céline Tabou

« On arrive à un dénouement  » de la situation

La situation économique et sociale de La Réunion est similaire à celle des années 1940, qui a entrainé la création du C.R.A.D.S. « Les inégalités sont massives aujourd’hui et les problèmes se traduisent également dans les échanges », a indiqué le sénateur communiste. En effet, en 1946, les importations et exportations étaient équilibrées, mais 66 ans plus tard, les importations ont explosé, si bien que 66% des produits viennent de 10.000 km, a expliqué Paul Vergès. Ces importations ont des coûts de transport, assurance et bien d’autres qui, malgré la volonté du ministre des Outre-mer, Victorin Lurel, ne remettent pas en cause les monopoles « qu’ils ont eux-mêmes créés, en permettant un tel flux financier. La situation s’aggrave encore, mais on arrive à un dénouement, car à partir de tous les éléments qui se combinent, il y a un changement dans le vocabulaire. Auparavant, la surrémunération était un tabou. On m’a traité d’ennemi de la fonction publique alors qu’il s’agit de la conclusion d’une analyse économique, sociale et financière de La Réunion ».
Logement social : durcissement des sanctions

La Réunion compte plus de 22.000 demandes de logement en attente et près de 19 communes sur 24 qui paient l’amende de non-construction de logement social. Si une commune ne construit pas 20% de logement social sur le territoire, elle est condamnée à payer une amende. Récemment, la ministre du Logement, Cécile Duflot, a souhaité augmenter ce pourcentage à 25, « c’est une contradiction entre la posture et la réalité », a expliqué Paul Vergès.
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