En avant vers le 6ème Congrès —5—

Sortir La Réunion de la crise structurelle

6ème congrès du PCR : 8, 9 et 10 mai

5 mai 2009, par Manuel Marchal

Entre la situation que connaissait La Réunion à l’époque du statut colonial et celle d’aujourd’hui, des progrès énormes ont été accomplis. Mais il reste des défis à relever, et force est de constater que le cadre aujourd’hui en place a été incapable d’apporter une réponse à des problèmes aussi urgent que l’emploi, le pouvoir d’achat et le logement. Et quand une urgence dure depuis plus de trente ans, elle est intolérable, et elle doit déboucher sur un dépassement du modèle afin qu’il soit possible d’apporter enfin des réponses positives à toute la population.

Le 19 mars 1946, la loi Vergès-Lépervanche change la structure de La Réunion. C’est la fin du statut colonial, et le début d’une nouvelle ère. A la liberté obtenue un siècle plus tôt lors de l’abolition de l’esclavage s’ajoute désormais celle de l’égalité. Egalité entre les Réunionnais en droit, mais aussi égalité des droits entre les Réunionnais et les Français. La loi prévoit d’ailleurs l’application de toutes les lois sociales issues du Front populaire et du Conseil national de la Résistance sur le territoire de La Réunion avant le 1er janvier 1947. Cet engagement n’a pas été tenu en temps et en heure par Paris. Il a donc fallu la mobilisation constante des Réunionnais pour arracher aux gouvernements qui se succédaient à Paris l’application de la loi.
Au cours de cette bataille, le visage de La Réunion a peu à peu changé. Les Réunionnais eurent d’abord droit à l’application de l’aide médicale gratuite, et de la retraite pour les vieux travailleurs. C’était un progrès considérable dans un pays où pour se soigner, nombreux étaient ceux qui devaient vendre leurs biens, voire leurs terres.

Des avancées

Dix ans après l’abolition du statut colonial, l’égalité n’était pas obtenue, et l’arrivée d’un nouveau préfet allait être le point de départ d’une féroce répression contre le suffrage universel. C’est en plein cœur de cette bataille que naît le Parti communiste réunionnais le 18 mai 1959. Depuis, il n’eut de cesse de rassembler les Réunionnais autour de la lutte pour les droits essentiels : respect du droit de vote, du droit à un travail, à un logement, à l’éducation.
Cette bataille a permis d’introduire dans la société des avancées inconnues jusqu’alors. Les Réunionnais les plus pauvres ont pu avoir droit à la même protection sociale qu’en France. Pour ceux qui ont un travail, le salaire minimal horaire est le même qu’en France, et le système de santé permet à un Réunionnais de pouvoir se soigner en ayant droit à la Sécurité sociale. Ces avancées ont permis d’en finir avec la surmortalité provoquée par le paludisme, la malnutrition et toutes les maladies qui étaient à l’origine d’une effrayante mortalité infantile. Dans le même temps, l’accès au savoir s’est considérablement développé. Quand l’île comptait 250.000 habitants, il n’y avait qu’un seul lycée. Aujourd’hui, c’est l’équivalent de la population de La Réunion du lendemain de la seconde guerre mondiale qui est scolarisé, et le nombre de lycée dépasse aujourd’hui 40, tandis que l’Université se structure.

Violente restructuration économique

Parallèlement à toutes ces avancées, La Réunion a vu plusieurs défis s’amplifier. Il s’agit tout d’abord de l’emploi. L’intégration dans la France puis dans l’Europe a signifié la ruine de plusieurs industries. En 1964, lors de la signature de la "Charte des planteurs", le pays comptait 24.000 planteurs de canne à sucre qui faisaient vivre 100.000 personnes ; 6.000 planteurs de géranium, soit 50.000 personnes concernées ; 2.000 planteurs de vanille qui apportaient un revenu à 10.000 personnes. À ce nombre s’ajoutaient tous ceux qui travaillaient dans l’industrie de transformation. Ils étaient des milliers à faire tourner les moulins des usines sucrières qui étaient disséminées dans le pays. Aujourd’hui, il ne reste que moins de 5.000 planteurs, et deux usines dont l’une d’entre-elles est en train de subir un plan social. La restructuration de l’économie réunionnaise n’a pas été accompagnée par un plan de développement d’autres filières capables de remplacer les emplois supprimés.
Et du plein emploi, La Réunion est devenue une société où sévit un chômage structurel. Dès 1974, le taux de chômage de notre île était de 25%. Il est le même aujourd’hui. Ce qui veut dire que depuis 35 ans, aucune mesure n’a pu inverser la tendance.
Un autre problème structurel que connaît La Réunion est celui de la vie chère. Un phénomène qui n’est pas nouveau, puisque dès les années 70, l’INSEE reconnaissait que les prix étaient plus élevés qu’en France, et augmentaient plus vite que la référence française. C’est toujours le cas, quand bien même l’octroi de mer n’existe plus depuis 20 ans sur les produits de première nécessité. Là aussi, aucune mesure n’a pu changer la donne. La création du COSPAR voici trois mois illustre les conséquences de cette crise. Elles sont décrites dans les 62 points de la plate-forme revendicative du Collectif des organisations syndicales, politiques et associatives de La Réunion.
Le manque d’emploi conduit à un appauvrissement de la population. 52% des Réunionnais vivent en dessous du seuil de pauvreté français, alors que dans le même temps, l’Etat reconnaît l’ampleur du problème de pouvoir d’achat puisqu’il donne à ses agents une prime augmentant leur salaire de 53%.

Les limites d’un modèle

Ces données montrent toutes les limites du modèle en vigueur à La Réunion. Ce cadre a permis de préserver les plus démunis de la misère coloniale, mais il n’a pas été capable de créer les conditions du plein emploi. Ce qui fait que les jeunes réunionnais peuvent aujourd’hui atteindre un haut niveau de formation sans pouvoir avoir la possibilité de mettre leurs compétences au service du développement du pays. Remettre en cause ses injustices, c’est militer pour le dépassement du modèle actuel afin qu’il soit possible de répondre d’abord aux besoins élémentaires des Réunionnais d’aujourd’hui tout en préservant les possibilités d’évolutions des générations futures.

Manuel Marchal

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