L’État n’a toujours pas donné son accord de principe pour la dotation ferroviaire nécessaire à la réalisation de l’investissement

Tram-train à La Réunion : la Région luttera jusqu’au bout pour le respect de l’égalité

25 novembre 2009, par Manuel Marchal

Hier, la Région a tenu une conférence de presse pour faire le point sur le tram-train au lendemain de la parution dans la presse de déclarations d’une ministre remettant en cause le versement de la dotation ferroviaire due par l’État à toute les Régions qui entretiennent des voies ferrées. À La Réunion, cette dotation pourra être versée à partir de 2014, date de mise en service de la première phase du tram-train. Un éventuel refus de l’État poserait la question de l’égalité, tout en rendant impossible la réalisation du tram-train. Cela porterait un coup fatal à l’ambition du président de la République de faire de La Réunion un territoire exemplaire sur le plan du développement durable, et viderait de sa substance le Plan de relance.

Alors que le tram-train est totalement bouclé sur les plans techniques et financier, il ne manque plus que l’accord de principe pour le versement par l’État à la Région de cette dotation ferroviaire calculée en fonction du nombre d’habitants, du kilométrage et des conditions d’exploitation. Cette déclaration de principe permettra aux banques de s’engager, et au projet phare du Plan de relance et de GERRI de démarrer. Mais à quatre jours de l’échéance, l’État n’a toujours pas donné son accord alors qu’il a toujours soutenu le projet.
Les déclarations de Marie-Luce Penchard dans la presse, et réaffirmées à son arrivée à La Réunion, disent qu’aucune dotation ne sera versée. Si elles étaient confirmées, alors la réalisation du tram-train serait impossible. En pleine crise, La Réunion perdrait 1,6 milliard d’euros d’investissements, soit plus de 10 milliards de francs, la promesse d’un chantier capable de fournir du travail à deux fois plus de personnes que celui de la Route des Tamarins, et un moyen de transport susceptible de répondre aux contraintes du million d’habitants, et par la même de répondre aux exigences du développement durable.

Des charges impossibles à prévoir en 2007

Car sans l’engagement des banques du fait d’une absence de réponse positive de l’État, le groupement d’entreprises retenu pour construire le marché se retirera, et la Région ne pourra que constater l’impossibilité de construire le tram-train. Cette éventualité donnerait un coup fatal à l’ambition du président de la République de faire de La Réunion un territoire exemplaire au plan international dans le domaine du développement durable. Quel développement durable avec 800.000 voitures à La Réunion ? a rappelé Pierre Vergès, vice-président de la Région en charge du dossier "Tram-train".
Avec l’énergie, le développement des transports collectifs est un des deux piliers de la stratégie de développement durable lancée depuis 1998 par la Région. C’est le projet d’un train qui évolue en tram-train avec un surcoût provoqué par le passage dans les villes. Il devient alors un projet partenarial porté par la Région et l’État. C’est acté dans le Protocole de Matignon signé en janvier 2007 par le Premier ministre et le président de la Région. Depuis cette date, la Région a dû faire face à des charges imprévues liées à un manque à gagner provoqué par une compensation insuffisante des charges transférées par le pouvoir central dans le cadre de la décentralisation. À cela se sont ajoutées les hausses des prix des matières premières, du fret et des carburants qui ont fait augmenté le coût de la Route des Tamarins, financée à 85% par la Région et à 15% par l’Europe. Tout cela explique pourquoi le versement de la dotation ferroviaire, due par l’État aux régions entretenant des réseaux ferrés, est maintenant nécessaire pour équilibrer le budget de fonctionnement.

« Les possibilités les plus larges d’appréciation » par l’État

Estimée à 105 millions par le Conseil régional en fonction des critères appliqués aux Régions de France, la dotation pourrait être ramenée à 80 millions d’euros, précise la Région. C’est en effet la somme nécessaire annuellement sur une période de 40 ans pour que la Région puisse assurer le remboursement de l’investissement du groupement d’entreprise. La Région est donc prête à un effort de 25 millions d’euros. Paul Vergès précise que dès l’accord officiel de principe de l’État communiqué aux banques, la Région mettra à la disposition de l’État les documents comptables de la collectivité afin que ce dernier puisse missionner des experts qui pourront calculer le montant de la dotation ferroviaire. Si les experts arrivent à démontrer que le montant de la dotation est inférieur à 80 millions d’euros, la Région est prête à se conformer à cet avis. « Nous donnons les possibilités les plus larges d’appréciation », précise Paul Vergès.
Le pouvoir central est averti de cette question depuis bien avant la visite de François Fillon à La Réunion, et le mois dernier, Dominique Bussereau, secrétaire d’État aux Transports, avait affirmé que les problèmes financiers seront réglés.
La Région ne comprend donc pas ce qui peut expliquer qu’elle apprend par voie de presse une version totalement différente. Paul Vergès n’ose pas croire que l’approche des régionales soit à l’origine d’une telle décision. Et le président de la Région souligne qu’à la différence des fossoyeurs du chemin de fer, ceux qui ont pris la responsabilité d’entreprendre des démarches auprès de l’Élysée pour faire échouer le projet du tram-train seront connus non seulement par les électeurs des prochaines régionales, mais aussi par les générations futures.
Paul Vergès conclut en soulignant que jusqu’au bout la Région luttera de toutes ses forces pour que cette déclaration de principe soit publiée par l’État. Si cela n’est pas obtenu, alors la bataille du rail continuera jusqu’à ce que « La Réunion ait le chemin de fer qu’elle mérite ».

Manuel Marchal 


Même débat à 50 ans d’intervalle

Paul Vergès a précisé que la tenue du débat n’est pas sans rappeler celui qui eut lieu voici 50 ans, quand l’État a décidé de supprimer le chemin de fer et de faire construire la route du littoral pour favoriser le tout-automobile.
Ce choix opéré voici 50 ans a un coût financier et humain de plus en plus désastreux, ce qui est un obstacle considérable au développement de l’île.
A l’époque, le niveau des arguments des opposants au chemin de fer était du même ordre que ceux qui combattent le tram-train, alors que l’objectif réel était d’abord de casser un mouvement syndical qui avait permis d’arracher l’abolition du statut colonial le 19 mars 1946. Avec les dockers, les travailleurs des chemins de fer étaient en effet les fers de lance de ces luttes qui se sont ensuite diffusées dans toute La Réunion.
50 ans plus tard, il s’agit de construire l’alternative au tout-automobile et de donner le droit à la mobilité à ceux qui n’ont pas les moyens d’accéder à l’automobile. Et comme il y a 50 ans, il existe des personnes qui préfèrent que leur île perde 50 ans pour satisfaire quelques ambitions personnelles.

Toutes les Régions ont droit à la dotation ferroviaire

Versée à toutes les Régions de France, la dotation ferroviaire annuelle de l’État sert à couvrir le coût supporté par les collectivités pour l’entretien du réseau ferroviaire régional. Un réseau dans lequel les Région n’ont eu aucun investissement à faire, puisque l’infrastructure construite par l’État a été transférée aux Régions dans le cadre de la décentralisation.
Au 20ème siècle, La Réunion avait aussi un chemin de fer. Mais à la différence de ce qui s’est passé en France, l’État ne l’a pas transféré gratuitement à la Région pour la simple raison qu’il avait décidé de le supprimer à la fin des années 50. À l’initiative de la Région, et en partenariat avec l’État, d’ici cinq ans un nouveau train doit voir le jour dans notre île. Mais à quatre jours de l’ultime réunion de la Commission d’engagement des banques concernant le tram-train, l’État n’a toujours pas garanti pour 2014 à la Région Réunion le principe d’une dotation à laquelle ont droit toutes les Régions qui entretiennent un chemin de fer.

Les Réunionnais doivent-ils financer le retard de développement ?

Paul Vergès a rappelé que la prise en charge par la Région de l’intégralité du fonctionnement du tram-train l’obligerait à sacrifier 70% des investissements : ce serait la fin de la construction des routes, la fin des crédits pour la formation professionnelle, un coup de frein dans la construction et la rénovation des lycées.
Autrement dit, le refus du versement d’une dotation due à toutes les Régions de France signifierait que le pouvoir central estime que La Réunion doit être la première collectivité de France à ne pas avoir droit à la solidarité nationale pour faire face aux retards de développement.

Respect des délais et des coûts : le tram-train offre un trophée international à la République

Lors de la rencontre internationale des PPP, le gouvernement a choisi de présenter le tram-train pour représenter la République sur les critères du respect des coûts et du respect des délais. Ce choix s’est avéré judicieux, car le tram-train a obtenu le prix du défi relevé. C’est le ministre de la Relance qui a remis ce prix.
Cela rend d’autant plus incompréhensibles les déclarations portant sur une "dérive" des coûts.

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  • Que l’on veuille ou non , le tram train rentrera en service dans les délais prévus.C’est une solution d’avenir pour nous tous, une chance pour nous tous.Trop d’hommes d’affaires sont impliqués dans cette voie ’’ la voie du développement durable’’.De plus en améliorant notre qualité de vie,le tram train réduira considérablement les attentes de transport et les couts liés au charbon.
    C’est un choix collectif, un phénomène mondial,une chance pour nous tous...


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