Transfert des TOS : Virapoullé ne pouvait plus tergiverser

5 juillet 2004

Que ne faut-il pas entendre ces jours-ci ! On veut nous présenter Jean-Paul Virapoullé comme “le” défenseur des intérêts des personnels techniciens ouvriers et de service. C’est un peu vite oublier que, il y a un un tout petit peu plus d’un an, cette question du transfert n’était, selon le sénateur maire de Saint-André qu’un “ladi lafé syndical”...

Les circonvolutions de 2003

o Le 11 avril 2003, Jean-Paul Virapoullé explique que la grève dans l’Éducation nationale s’appuie sur un "ladi lafé syndical".
o Le 14 avril, il persiste à déclarer qu’il n’y a pas de projet de loi. Ni même d’avant-projet de loi.
o Le 27 juin, lors d’une rencontre à Saint-André avec des représentants du collectif “TOS’Ensemble”, il affirme qu’il a obtenu toutes les “garanties” de la part du gouvernement pour cette décentralisation des TOS. C’est la possibilité pour les agents de "conserver leur statut de fonctionnaires d’État".
o Le 10 juillet, Jean-Paul Virapoullé défend les réformes engagées par le gouvernement Raffarin.
o Le 14 novembre, Jean-Paul Virapoullé vote contre un amendement demandant la suppression du transfert des TOS.
o Le 15 novembre, Jean-Paul Virapoullé vote le projet de loi relatif aux libertés locales et déclare "Monsieur le ministre, vous étiez présent à La Réunion lors des événements difficiles qui sont intervenus concernant les TOS. Aujourd’hui, ces derniers sont rassurés. Le Gouvernement a inscrit dans la loi l’ensemble des principes qui avaient suscité leur émotion : ils pourront conserver leur statut de fonctionnaire de l’État, leurs avantages acquis, l’affectation dans leurs missions et ils bénéficieront de la sécurité dans leur emploi. (...) Les conseils généraux et le Conseil régional de la Réunion m’ont chargé de dire “oui” à la décentralisation (...)". Dans la foulée, il vote pour le transfert des médecins scolaires.

Les événements de 2004

o 28 mars 2004. Une fabuleuse claque est donnée à Jean-Paul Virapoullé. La liste de l’Alliance arrive largement en tête dans sa commune - comme dans bien d’autres communes dirigées par des maires UMP. Ses deux fidèles lieutenants sont sortis par les candidats de l’Alliance. Jean-Paul Virapoullé perd les pédales. Il “veut la tête” de Brigitte Girardin. Il accuse le gouvernement de tous les maux et de sa défaite.
o Début avril, la présidente du Conseil général, Nassimah Dindar, est très explicite. Dans l’état actuel du projet de loi, le transfert ne doit pas avoir lieu. La position est ferme et définitive, sans possibilité d’y revenir dessus.
o Suite à la réunion des présidents de Région avec Jean-Pierre Raffarin, en avril, celui-ci explique : "Il y aura des transferts de personnels. Je suis prêt à discuter sur les conditions de ces transferts et je demande à mes ministres de préparer les conditions de ces transferts, les modalités - parce qu’il peut y avoir discussion -, de manière à ce que, quand nous irons devant le Parlement pour la seconde lecture, ces transferts soient à la fois garantis et possibles". C’est donc bien sous l’impulsion des présidents de Région que Raffarin ouvre (timidement) la porte.
o Par ailleurs, les présidents des quatre régions d’Outre-mer, messieurs Karam (Guyane), Lurel (Guadeloupe), Marie-Jeanne (Martinique) et Vergès (La Réunion), ont d’un commun accord, décidé de rédiger un mémoire sur la situation très particulière des les régions d’outre-mer qui appelle donc un "traitement particulier" devant être défini par la loi.
o Après la double claque des régionales et cantonales, voilà le troisième round avec les élections européennes. Nouvelle défaite. Encore un désaveu de la population réunionnaise vis à vis de la politique de l’UMP. Et des contorsions de tous styles.
o Ce n’est que maintenant que Jean-Paul Virapoullé prend une position tranchée. Il aura donc fallu attendre qu’il soit battu aux régionales, battu aux cantonales, battu aux européennes (en tant que tel ou que défendant un parti politique ou des candidats), qu’il soit totalement isolé politiquement à La Réunion : mêmes ses amis du Conseil général n’étaient plus sur la même ligne politique que lui et se prononçaient très nettement pour un non transfert des personnels de l’Éducation nationale et des autres personnels, d’ailleurs.
Il aura donc fallu attendre tout cela pour que Jean-Paul Virapoullé accepte, avec plus d’un an de retard par rapport à d’autres (comme les élus de la majorité du Conseil régional - y compris pendant la mandature 1998/2004 -), de se rallier aux positions arrêtées par les organisations syndicales.
Jean-Paul Virapoullé aura mis plus d’un an pour “comprendre” ou pour “réagir” à la question du transfert non seulement des TOS mais des autres personnels (voire compétences).
Il aura mis trois mois pour concrétiser les demandes qui lui ont été faites - de façon très claire - par les élus de la majorité du Conseil général. Pour exprimer son réel soutien à Nassimah Dindar et son équipe.
Ces positions, réaffirmées par le président Vergès, il y a une semaine, devant Brigitte Girardin, ont conduit celle-ci à désigner l’amendement Virapoullé comme un frein à l’adaptation demandée par les TOS.
C’est donc acculé, le dos au mur, que Virapoullé s’est incliné devant l’évidence et les sanctions répétées de son électorat. Mieux vaut tard que jamais.

Dominique Besson


Aux députés...

Ceci étant, cette “victoire” ne sera complète que si les trois députés réunionnais UMP à l’Assemblée nationale acceptent, eux aussi - et enfin - de tenir compte des messages clairs, nets et massivement exprimés dans les rues, par les milliers de grévistes durant un trimestre de manifestations en 2003 et, dans les urnes, par des dizaines de milliers d’électrices et électeurs de La Réunion, par trois reprises en 2004.


Sur fond de politique politicienne

Courant avril, après cette double claque et dans la préparation du scrutin européen, l’UMP s’interroge sur sa stratégie : vraie union totale ou union libre ? Virapoullé est sur cette deuxième ligne, lui qui, selon les propos de Margie Sudre rapportés par la presse "n’est plus le favori de Paris pour prendre en main l’UMP local" mais qui veut "restructurer la Relève plus que jamais". Aigri de ne pas avoir eu “la tête” de Brigitte Girardin, il aurait eu des contacts très approfondis avec des adversaires de Jacques Chirac (Nicolas Sarkozy ou François Bayrou), histoire de “jouer un mauvais tour au clan chiraquien”.
Cet amendement - qui n’avait pas l’accord du gouvernement mis en place par Chirac - n’appartient-il pas à cette logique de jouer “un mauvais tour” ?
Jean-Paul Virapoullé ne pouvait donc plus tergiverser. Mais on peut aussi se poser une question : celle de savoir s’il ne s’agit pas - aussi - pour Virapoullé, d’une question de “survie”, ou de résurrection politique de “La Relève”. Ce n’est un secret pour personne : c’est bien Jean-Paul Virapoullé qui a été à l’origine de la candidature de Nalini Velloupoullé aux élections européennes, sur la liste UDF.
Il a clairement fait connaître son intention de “relever” “La Relève”. Et cela tombe pile poil après l’entrée en dissidence de l’un de ses poulains, Jean-Jacques Morel. Une “gueguerre” menée contre le député maire de Saint-Denis, René-Paul Victoria.
On peut donc raisonnablement se demander si cet amendement déposé - et mis en valeur avec tant d’ardeur par certains - n’est pas surtout une manière extrêmement perfide de donner un “signal supplémentaire” pour une charge - la dernière - qu’il souhaiterait voir sonner à l’encontre d’une UMP groggy et KO debout ?

D.B.


L’amendement des TOS adopté au Sénat malgré l’avis défavorable du gouvernement

Le résultat d’une mobilisation exemplaire

Suite à un problème technique, le communiqué diffusé vendredi par la Région et publié samedi dans nos colonnes est apparu incomplet. Nous le reproduisons ci-après dans son intégralité, avec toutes nos excuses pour nos lecteurs.

Suite à la rencontre qu’il avait eu mardi 22 juin avec la ministre de l’Outre-mer Brigitte Girardin, et le ministre délégué Jean-François Copé, le président de la Région Réunion, Paul Vergès, avait tenu, dès son retour à La Réunion, à informer l’opinion en tenant une conférence de presse le dimanche 27 juin sur le dossier de la décentralisation en général, et du transfert des TOS en particulier.
Il avait notamment plaidé auprès du gouvernement pour qu’aucun transfert pour les DOM ne soit envisagé sans une expertise préalable pour évaluer les retards et les besoins générés par la pression démographique.
Dès l’ouverture du débat au Sénat ce lundi, la représentante parlementaire CRC, auquel appartient Paul Vergès, réaffirmait cette position en son nom.
L’intersyndicale IATOS de La Réunion a élaboré une motion dans le même sens, sollicitant le soutien des élus réunionnais. À l’initiative de Paul Vergès, cette motion a été présentée à l’Assemblée plénière du Conseil régional du 29 juin 2004 et adoptée à l’unanimité.
Elle a aussitôt été transmise par le président de la Région Réunion à l’ensemble des parlementaires de La Réunion.
La Région se félicite qu’un amendement reprenant l’esprit de cette motion ait été présenté par le sénateur-maire de Saint-André, et qu’il ait été adopté la nuit dernière malgré l’avis défavorable du gouvernement.
Cela prouve que, lorsque La Réunion parle d’une seule voix, elle peut être entendue. Ce résultat est le fruit d’une mobilisation engagée par les personnels concernés et l’ensemble de la communauté éducative depuis plus d’un an.
Cette mobilisation constante et qui n’a jamais failli a favorisé les conditions de l’expression convergente des élus.
Le Conseil régional, qui avait sur ce dossier adopté dès le départ une position aussi claire que ferme, se réjouit de cette évolution. Toutefois, la bataille n’est pas définitivement gagnée.
Il appartient désormais aux députés de confirmer, à l’Assemblée nationale, le vote du Sénat. Pour la Région Réunion - comme pour le Département et le personnel concerné -, l’enjeu de cette bataille est considérable : il s’agit de garantir pour le présent comme pour l’avenir les moyens nécessaires au bon fonctionnement du service public de l’Éducation, et ne pas compromettre, par des mesures inadaptées et inopportunes, tout le processus de décentralisation.


Après le vote au Sénat

Les syndicats restent vigilants

Si les syndicats se félicitent de l’adoption de l’amendement Virapoullé par le Sénat, ils restent vigilants : ils exigent le retrait pur et simple du projet de transfert des TOS. Nous publions ci-après leurs réactions.

SGPEN-CGTR : "Rien n’est réglé"
"La décision de transférer les TOS est une décision à caractère politique.
Le report ou le non-transfert des TOS relèvent aussi d’une décision politique.
Les personnels de l’Éducation nationale, la population réunionnaise en général ont dit non à plusieurs reprises à ce projet de transfert du gouvernement.
En ce sens, le SGPEN-CGTR se félicite de l’adoption au Sénat de l’amendement proposé par le sénateur Virapoullé.
Rien ne sera réglé définitivement avant que l’Assemblée nationale ne se prononce sur cet amendement en seconde lecture. Le SGPEN-CGTR souhaite que malgré leurs différences, les élus de La Réunion fassent bloc pour dire non à ce transfert qui n’apporte aucune avancée aux problèmes de notre Académie.
L’adoption de cet amendement apporte un peu d’espoir au personnel TOS dont la combativité exemplaire n’est plus à démontrer.
Le SGPEN-CGTR demande aux collègues TOS de rester vigilant et mobilisé.
La lutte continue".

L’UNATOS-FSU reste mobilisée
Dans un communiqué diffusé vendredi, l’UNATOS-FSU prend acte "de l’amendement du sénateur Virapoullé qui sursoit au transfert des personnels TOS dans les départements d’Outre-mer". L’UNATOS-FSU précise qu’elle mettra ce délai à profit "pour que les projets du gouvernement n’aboutissent pas et que le transfert des personnels ne se fasse pas".


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