La visite de Nicolas Sarkozy :

Un gros plouf !

3 octobre 2005

Sa baisse de popularité, pour la première fois dans les sondages, et l’image désormais associée à ’la dureté’, ’l’impatience’, ’la crispation’ du président de l’UMP ont desservi le second personnage du gouvernement dont le séjour aura peu marqué.

Nicolas Sarkozy parti, que restera-t-il de son séjour ? Pas grand chose. Jamais le voyage d’un ministre d’un si haut rang - il est le numéro 2 du gouvernement - n’aura été aussi vide. Un commissariat à Saint-André, quelques dizaines de policiers en plus, une aide - sans doute financée en grande partie sur le fonds structurel européen - pour abaisser le coût de la liaison ADSL, la promesse de défendre auprès du gouvernement et, éventuellement, de Bruxelles la cause de la filière canne : voilà sur quoi s’est engagé pour l’essentiel le ministre. Parfois sur un ton paternaliste et condescendant comme en témoigne ce dialogue avec Jean-Paul Virapoullé rapporté par le “JIR” : "tu veux un commissariat ?" "Oui !" "Tu l’auras en 2006 !".
Le caractère finalement insignifiant de ce séjour se lit dans les commentaires de nos confrères de la presse écrite locale. "Je suis bien embêté pour vous en causer, pour commenter le déplacement, parce qu’à l’exception de Richardson qui s’est vu offrir le billet aller-retour aux frais de la princesse, de deux radars, de trois bagnoles et d’une dizaine de poulets que le ministre de l’Intérieur s’est engagé à nous livrer, je n’ai rien vu de bien particulier", écrit, par exemple, Jacques Tillier du “JIR” dans son édito de ce samedi.
La faute à qui ou à quoi ?
De toute évidence, c’est le caractère ambigu de ce voyage, - à la fois visite ministérielle et campagne électorale d’un candidat à l’Élysée - qui a pesé. Nicolas Sarkozy a voulu jouer sur les 2 tableaux. Au final, son discours sur la laïcité - prétexte officiel de son séjour - a été vite oublié et l’on s’est attaché plus à la mise en spectacle de sa tournée électorale. "Sarko show" et "Coup de pub" notaient “Le Quotidien” et le “JIR” vendredi matin, rendant compte de la première journée de la visite et insistant sur son côté électoraliste.
Or, le dernier sondage SOFRES-Le Figaro rendu public la veille ; montrait une perte de popularité de Nicolas Sarkozy qui, pour la première fois, est devancée dans l’opinion par Dominique De Villepin. Selon le journal “Le Monde”, "d’autres études, plus confidentielles, ont alerté l’entourage du candidat. Elles révèlent que son image est désormais associée à "la dureté", "l’impatience", "la crispation"". Le quotidien parisien note donc un changement de stratégie de la part du président de l’UMP. Il aurait "choisi de se glisser dans la peau du challenger, laissant même entendre qu’il n’était pas écrit qu’il serait candidat : “Nul n’est propriétaire, y compris le président de l’UMP, d’un rôle ou d’une candidature à la candidature”, a-t-il lancé, jeudi 29 septembre, lors d’un meeting à Saint-Denis-de-La-Réunion".
Le même journal constate : "c’est la première fois qu’il laisse entendre qu’il pourrait renoncer au but qu’il poursuit inlassablement. "Le moment venu, additionnons-nous autour de celui qui a été choisi. Voilà la martingale gagnante (...) : je ne ferai pas aux autres ce que je n’ai pas aimé... qu’on me fasse"".
Toujours est-il que Nicolas Sarkozy s’est plus comporté comme un candidat potentiel à l’Élysée qu’un ministre. Les engagements qu’ils a pris - dont certains sortent de ses prérogatives de ministre de l’Intérieur - sonnent comme ces promesses que l’on multiplient en période électorale. Car, sur les autres problèmes dont il avait été objet d’interpellation - la situation des journaliers communaux, les policiers réunionnais travaillant en France demandant à être mutés dans l’île, la sécurité routière, l’immigration - il n’a apporté aucune réponse concrète.

J.M.


Une infantilisation des exclus

Jeudi soir, face aux militants de l’UMP, Nicolas Sarkozy s’est exclamé : "Est-ce choquant de dire que quand on a un minimum social, on doit un minimum d’activité à la collectivité car cette politique sociale est payée par la France qui se lève tôt ?".

Ces propos délivrés dans un département qui bat le record national de érémistes sinon de personnes bénéficiant des minima sociaux n’ont pas été tenus au hasard. Ils nous renvoient à l’image d’“assistés” qui se contentent de leur situation et qui sont censés se lever plus tard que les personnes au travail.
Ces propos participent de la culture de la culpabilisation des plus faibles : les malades accusés de creuser le trou de la Sécurité sociale ; les travailleurs qui ne bosseraient que 35 heures par semaine ; les chômeurs qui refuseraient d’aller chercher du travail. La vision qu’a le ministre des érémistes ou des personnes aux minima sociaux s’intègre dans le même schéma : elles ne feraient rien en retour pour mériter l’aide que leur apporte la collectivité.
C’est une manière de retourner le problème et de culpabiliser les victimes. En quoi les érémistes sont-ils responsables de l’échec de leur insertion dans la société si on est incapable de leur en proposer une ?
Au moment de l’instauration du RMI, un même débat comme celui que propose Nicolas Sarkozy avait été ouvert : fallait-il ouvrir le droit à un revenu minimum sans compensation ? La personne aidée ne devrait-elle pas accomplir en retour des tâches utiles à la collectivité ?
Ce n’est donc pas une théorie originale que propose le président de l’UMP. C’est même un retour en arrière.
Une société aussi développée et aussi avancée que la France n’a-t-elle pas les moyens d’aider ses plus pauvres ? Dans une société d’abondance où un rentier peut vivre sans travailler de ses rentes - un être humain n’a-t-il pas droit à des moyens de subsistance, à un minimum décent pour vivre.
Or, pour toucher un minimum social, il faut au préalable remplir des conditions. L’AAH, par exemple, n’est versée qu’aux handicapés. Pour être érémiste il doit :

- remplir des conditions de ressources,

- être Français ou résident légal depuis au moins 3 ans,

- disposer d’une adresse postale,

- avoir plus de 25 ans,

- ne pas être étudiant,

- rechercher un emploi,

- participer à la démarche d’insertion proposée par les pouvoirs publics.

Les 4 derniers points sont loin d’être sans conséquences. L’obligation par exemple d’insertion et de recherche d’emploi se traduit par une dérive du RMI qui passe du stade de l’aide sociale à celui de contrôle social.
L’idée d’introduire une exigence de compensation - fournir un minimum d’activité à la collectivité - s’appuie sur l’impossibilité pour la personne aidée de dire non quand elle est démunie. C’est abuser de la situation dans laquelle elle se trouve pour l’obliger à accepter n’importe quoi. Cela revient à leur étendre le principe de "flexibilité" que l’on développe sur le marché de l’emploi. Cela traduit une volonté d’infantilisation des exclus à qui on dit : si tu es sage, si tu acceptes ce que je te propose, tu auras une aide.
Exiger une forme quelconque de compensation c’est remettre en cause le principe même de la solidarité et tout l’esprit de générosité qui l’accompagne : je te redistribue une partie des richesses que produit la Nation à condition de faire ceci ou cela.
Un revenu garanti versé sans exigence de compensation, c’est la possibilité de vivre debout. Cela signifie sortir d’une infantilisation des exclus. Cela signifie leur laisser le choix, eux-mêmes, de la vie qu’il veulent et de leur parcours d’insertion. Cela signifie leur faire confiance, leur rendre leur dignité sans les culpabiliser. C’est ainsi qu’ils vivront debout.


Il courtise l’électorat lepéniste

Pour être candidat à la présidentielle, il faut être “parrainé” par au moins 500 élus. Maires, conseillers généraux ou régionaux, parlementaires doivent, par écrit, signifier qu’ils proposent la candidature de tel ou tel.
Jean-Marie Le Pen et son camp laissent entendre que le Front national aura du mal à rassembler les 500 parrainages nécessaires. Les potentiels signataires feraient l’objet de pressions.
Un député proche de Nicolas Sarkozy, Manuel Aeschlimann, va déposer une proposition de loi pour imposer la publicité des noms des élus qui apportent leur parrainage à un candidat. Il propose que "désormais, la liste de tous les parrains soit publiée sur Internet et au Journal officiel". Il suggère qu’elle soit "diffusée dans les enveloppes contenant les professions de foi et les bulletins de vote".
Le but de la manœuvre est simple : dissuader un certain nombre d’élus qui seraient tentés de cautionner la candidature de Jean-Marie Le Pen de le faire et donc empêcher le FN d’être à la présidentielle.
Un objectif que de nombreux démocrates partagent mais qui, chez les sarkozistes, répond à une stratégie politicienne.
De nombreux sondages le prouvent : le président de l’UMP est très populaire dans les rangs de l’électorat lepéniste. Si le leader du Front national ne pouvait se présenter, ce serait tous bénéfices pour Nicolas Sarkozy qui, à la présidentielle, pourrait récupérer sur son nom plusieurs centaines de milliers de voix. Cela pourrait être suffisant pour distancer Dominique de Villepin ou Jacques Chirac dès le premier tour.
Pour le camp du président de l’UMP, il faut écarter Le Pen pas pour ses idées mais pour récupérer son électorat.
Aussi, lorsque dans son intervention devant les militants de l’UMP, Nicolas Sarkozy s’est félicité du fait que La Réunion se retrouve préservée du Front national, il sait que les idées lepénistes se sont implantées dans son propre camp. Il n’avait qu’à écouter ces derniers jours les discours d’un Ibrahim Dindar pour s’en convaincre. La Réunion a été préservée du Front national mais pas de l’idéologie raciste et xénophobe.


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