“Le Quotidien” et la fédération socialiste

Une opération de déstabilisation

30 août 2004

Dans son édition de vendredi dernier, “le Quotidien” annonce que "Gilbert Annette succède à Michel Vergoz" à la tête de la fédération socialiste de La Réunion. Le journal du Chaudron n’évoque pas une hypothèse mais bien une certitude : "Le PS changera bientôt de leader à La Réunion. Gilbert Annette succédera à Michel Vergoz au poste de premier secrétaire. Ce passage de relai consacrera le retour au premier plan de l’ancien député-maire de Saint-Denis. Objectif visé : reconquérir la mairie du chef-lieu", écrit en “le Quotidien” en première page. L’article de la page 3 développe cette thèse et parle du "plan secret du PS".
Les militants de la fédération socialiste auront certainement été les premiers étonnés à l’annonce d’une telle information. Eux qui disent pratiquer la démocratie au sein de leur part seront surpris d’apprendre que leur futur secrétaire fédéral sera Gilbert Annette, une désignation faite par le haut, c’est-à-dire à Paris, à l’approche de l’université d’été du PS à La Rochelle.
Les militants de la fédération seront sans doute aussi étonnés de l’unique mission que “le Quotidien” attribue au futur premier secrétaire : reconquérir la mairie de Saint-Denis. Objectif pour lequel Michel Vergoz, le futur ex-premier secrétaire, est appelé à prêter main forte.

Pour le journal du Chaudron, le principal responsable de la fédération ne serait pas porteur du projet socialiste, il n’animerait pas la vie politique de son parti, il n’assumerait pas les importants rendez-vous électoraux que sont le prochain référendum sur la Constitution européenne, la présidentielle ou les législatives. Il n’aurait comme seule préoccupation que la reconquête d’une mairie.
En enfermant leur futur premier secrétaire dans une seule bataille municipale, “le Quotidien” donne aux socialistes réunionnais une image caricaturale de leur futur dirigeant. Il est ramené au rang d’un chef de file municipal.
En effet, personne n’oserait croire que Gilbert Annette ne se battra pas pour faire gagner le candidat de son parti à la présidentielle de 2007 avant de se préoccuper des municipales qui pourraient intervenir en 2008. “Le Quotidien” lui prête une perspective inversée et le fait passer pour un responsable préoccupé plus de ses ambitions électorales personnelles que de celles de son parti.

C’est à se demander se que cache réellement l’opération. Ne viserait-elle pas à camoufler la mise à l’écart de Michel Vergoz et les raisons de ce retrait ? L’actuel homme fort de la fédération se verrait confié, selon “le Quotidien” une vague mission : il sera chargé "de l’animation de la commission fédérale du projet et conduira la réflexion sur le projet alternatif du PS pour 2007".
Mais, depuis quelque temps, les méthodes et les orientations imposées par Michel Vergoz étaient contestées à l’intérieur même de son parti. Sur deux dossiers récents, le premier secrétaire a été mis en cause. Des membres de la Commission exécutive fédérale ont critiqué sa gestion du dossier des TOS et l’engagement public pris par Michel Vergoz d’annuler le transfert en cas d’alternance en 2007.
Par ailleurs, le premier secrétaire de la fédération était informé du recours déposé contre le projet de loi de décentralisation : "Nous attendons le verdict du Conseil constitutionnel, mais quelle que soit la réponse, le gouvernement a largement entamé la plus petite marge de crédits qui lui restait", déclarait le patron local du PS le 13 juillet dernier lors d’une conférence de presse. Avait-il donné son aval à une remise en cause de l’article 203 sur les TOS, mettant ainsi dans l’embarras son parti et ses camarades ?
De plus, sa décision d’isoler le PS dans la bataille sur la filière canne-sucre - en dénonçant le front uni qui se constituait - n’a pas non plus été appréciée. Invité à participer à une réunion de travail par les initiateurs de ce “front”, Jean-Claude Fruteau a répondu présent tout en continuant à être critique vis-à-vis de la Région.

Il est fort probable - et ce n’est là qu’une hypothèse - que la direction nationale du PS ait fini par tirer les conclusions d’une stratégie élaborée par le premier secrétaire du PS qui a, dans un premier temps, isolé la fédération à La Réunion et, à l’occasion des européennes, mis en mauvaise posture le parti.
En effet, dans les péripéties de cette bataille, le PS a pratiquement perdu son secrétaire national à l’Outre-mer, Axel Urgin. Il s’est retrouvé minoritaire dans la circonscription de l’Outre-mer et avec de nombreux contentieux avec plusieurs de ses fédérations. Pour la première fois, le PS s’est trouvé accusé - y compris dans ses propres rangs - d’avoir un comportement vis-à-vis de l’Outre-mer identique à celui de la droite, c’est-à-dire de décider de Paris ce qui est bon ou pas pour l’Outre-mer. L’épisode du recours contre l’article 203, décidé sans consulter les organisations syndicales ou les collectivités locales, est apparu comme un élément de crise supplémentaire.
Dans les perspectives annoncées de la fédération, il n’était pas prévu la réunion d’une instance pour procéder à la désignation d’un nouveau premier secrétaire. Décrivant - lors d’une conférence de presse le 13 juillet dernier - l’avenir immédiat de sa formation, Michel Vergoz annonçait la tenue en septembre d’une assemblée de rentrée, tandis que le Congrès devrait se tenir en 2005. Or, le passage de témoin Annette-Vergoz se ferait d’ici la fin de l’année. Pourquoi Paris a-t-il décidé de précipiter les choses ? Et toute l’opération de promotion d’Annette montée avec le concours du “Quotidien” ne vise-t-elle pas à écarter ce débat ?


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année

La pès kabo

5 juillet, par Christian Fontaine

Kan i ariv Novanm-Désanm-Zanvié, domoun i réziste pi ek la salèr. Zène-zan i mars dann somin, zène-fi i roul an dékolté ; sétaki i rod in manir po (…)


+ Lus