Avant la visite du ministre Borloo

Une seule question, cinq revendications

16 décembre 2004

Un plan inadapté à durée déterminée : c’est ainsi que six organisations réunionnaises considèrent le plan Borloo. Elles ont fait une demande d’audience auprès du ministre dès son arrivée, et comptent bien ’créer les conditions’ de la rencontre. Elles lui demandent comment le gouvernement compte ’éradiquer la fracture sociale’.

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Tous demandent à rencontrer le ministre de l’Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale, lors de sa venue prochaine à La Réunion. Les organisations Agir pou nout tout, le Collectif Emploi en danger, la Fédération des conseils de parents d’élèves, l’Union des femmes réunionnaises (UFR), le Comité de chômeurs et demandeurs de logement (CCDL) du Port et l’Association revalorisation des sites (AREVAS) veulent lui remettre une motion démontrant l’inefficacité de son plan et faire des propositions.

Dans les rangs des organisations, la conseillère générale Monica Govindin et la députée Huguette Bello ont signé une plate-forme commune à l’attention de Jean-Louis Borloo. Au nom et en présence des organisations, Jean-Hugues Ratenon a porté à la connaissance de la presse, hier, la lettre que l’ensemble des signataires souhaitent transmettre à Jean-Louis Borloo. Les organisations ont fait une demande d’audience auprès du ministre dès son arrivée, et comptent, s’il ne répond pas, "créer les conditions" de la rencontre.

"33% de chômage : la mort subite"

Jean-Hugues Ratenon précise que tout le monde est d’accord sur un principe de base : "l’objectif est l’emploi durable, nous ne nous battons pas pour le précaire".
Le plan proposé ne répond pas aux besoins : "il nous faut des actes en face des paroles. Le taux de chômage est de 9% en Métropole et il est jugé intolérable par le Premier ministre, ici à 33%, c’est la mort subite, et rien n’est fait pour au minimum nous ramener à la moyenne nationale. Seuls 40 contrats RMA ont vu le jour, aucun contrat jeune en entreprise et les CIVIS vont finir à la poubelle".
Cette lettre rappelle les inquiétudes des signataires : "Nous n’acceptons pas le démantèlement de l’ANPE que vous proposez ou encore toute la politique de culpabilisation qui sera menée à l’égard des demandeurs d’emplois avec la mise en œuvre de votre plan. Nous constatons qu’il ne nous donne pas les moyens de répondre à nos besoins en création d’emplois, en construction de logements, en encadrement ou en équipement des écoles, collèges et lycées ou encore pour satisfaire les services aux personnes. Nous sommes inquiets devant la montée de la délinquance et de l’insécurité, or notre situation sociale est spécifique".

"Construction de logements sociaux"

Simple rappel, la lettre porte plusieurs constats : "Nous comptons 33% de chômage, contre 9,5% en Métropole. 53% des jeunes de moins de 25 ans sont au chômage contre 20% en Métropole. Notre taux de couverture de la CMU est de 50,7% contre 7,5% en Métropole. Nous comptons 20% d’illettrés contre 2% seulement en Métropole...". Elle pose une question : "Le gouvernement compte-t-il réellement, pour les cinq prochaines années, éradiquer la fracture sociale ?"
Les cosignataires ont rédigé 5 propositions demandant "le maintien du dispositif CES, CEC, CEJ (convention pluriannuelle) parallèlement à l’application du plan Borloo", qui a une durée de vie limitée à 5 ans.
Ils demandent "le soutien à la mise en application d’un plan de création d’emplois durables répondant à nos besoins, la construction de logements sociaux en nombre suffisant, l’accentuation de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes de La Réunion, la mise en place des moyens financiers pour rattraper les retards en personnel et en équipement dans le domaine social, de santé et éducatif".
Les cosignataires espèrent vivement pouvoir discuter de ces points avec Jean-Louis Borloo quand il viendra à La Réunion.

Eiffel


Huguette Bello (UFR) :
"De la fumée en bouteille"

L’examen du plan de cohésion sociale touche à sa fin. Le Sénat se prononce aujourd’hui et l’Assemblée nationale lundi, 20 décembre. La venue éventuelle des ministres Borloo et Daubresse est prévue le 22 ou le 23 décembre, ils seraient porteurs d’un contrat d’application territorial.
Huguette Bello, députée, présidente de l’Union des femmes réunionnaises, ne voit pas quel crédit apporter à cette promesse. "Encore une fois, des chargeurs d’lo vont nous vendre de la fumée en bouteille", déplore-t-elle, en rappelant comment, face à la colère des TOS, le président de la République a pu brandir un hypothétique amendement pour passer des vacances “cool”.
La priorité du plan serait l’emploi, cependant "la situation particulière de La Réunion est connue, notamment pour le logement. Mais on préfère se livrer à des controverses sur les chiffres du chômage. Quelle amélioration ?", demande-t-elle.
"Quelle embellie ? Quand les statistiques de l’INSEE montrent qu’en 2004 nous avons 3.000 chômeurs de plus qu’en 2003, que nous passons la barre des 100.000 chômeurs. Un actif sur trois est au chômage à La Réunion". Et les femmes sont les premières à souffrir de cette situation qui est pour tous "un gaspillage, d’intelligence, de capacité".
Concernant le sursis d’un an accordé aux dispositifs CEC et CES, aucune précision n’est apportée sur le nombre de contrats. Elle demande leur maintien. Autre priorité : le logement. Le budget de l’Outre-mer prévoit 8.000 logements neufs pour l’ensemble des DOM, auquel le plan Borloo ajoute un autre millier. Mais 9.000 logements, pour La Réunion, c’est un minimum, comme le montrait hier le Conseil départemental de l’habitat. Ce qui fait dire à la députée que "l’Outre-mer n’est pas pris en compte, nous sommes méprisés, négligés... Mais qu’est-ce qu’ils viennent dire ? Qu’est-ce qu’il va nous proposer ?"


Hervé Lauret (FCPE) :
"La jeunesse prête à faire sortir l’île de l’ombre"

Huguette Bello attirait l’attention sur le nombre croissant d’allocataires du RMI et du revenu solidarité ; ensemble ils représentent 76.300 personnes, 185.000 si l’on compte aussi leur famille, soit le quart de la population de notre île. "Comment vivre avec 379 euros par mois, avec 2.486 francs ? La prime de Noël est critiquée, mais avec 150 euros, ce n’est qu’une misère ajoutée à une misère".
Ce qui fait réagir Hervé Lauret (FCPE) : "Comment ces familles peuvent-elles suivre leur enfant dans leur scolarité ? Tout est lié. On ne peut pas régler le problème de l’éducation si on ne donne pas la chance aux familles de s’en sortir".
Il poursuivait en demandant quand quelque chose sera fait pour les nombreux jeunes qui sortent du cursus scolaire : "Il faut travailler à quelque chose de durable. Ces jeunes veulent montrer leur valeur, trouver un emploi. Le plan Borloo n’est qu’un saupoudrage. Arrêtons ; il faudra un jour trouver des solutions adéquates : l’avenir c’est la jeunesse. Il faut que tous se rendent comptent que cette jeunesse est prête à tout faire pour faire sortir son île de l’ombre".


Monica Govindin (CED) :
"Comment éliminer la précarité par la précarité ? "

La conseillère générale relevait que le gouvernement est en contradiction permanente :
"Alors que le taux de chômage réunionnais est le plus fort au niveau national et au niveau européen, le gouvernement n’a jamais déclenché de cellule de réflexion. Borloo veut transposer la précarité dans le secteur marchand. Les contrats proposés sont des CDD précaires qui peuvent s’ajouter aux contrats existants : CES, CEC, CEJ, mais qui ne peuvent pas s’y substituer. On nous dit toujours que les Réunionnais sont des assistés. Mais on ne peut plus dire ça. Nous voulons faire bouger notre pays. Il décide d’un plan de cohésion sociale, nous lui disons : nous avons des propositions, prenez-les en compte".
Comme les autres signataires, Monica Govindin demande le maintien des dispositifs d’emplois aidés et craint que les emplois occupés par les CEJ ne soient pas remplacés et que la convention pluriannuelle - reconduisant les contrats pour trois années supplémentaires - soit remise en cause à partir de l’année prochaine. "Les conventions déjà signées risquent de ne pas être honorées".


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