Création d’une cellule de crise

Une victoire pour l’intérêt général de La Réunion

14 novembre 2008, par Manuel Marchal

Pendant cinq jours, La Réunion a été paralysée par un conflit portant sur une revendication financière de certains patrons. Deux jours après, les élus et les socio-professionnels se sont prononcés à l’unanimité pour la création d’une cellule de crise chargée d’analyser la situation générale dans le pays, proposer des solutions et informer la population. En effet, dans un contexte très incertain, voire inquiétant, il est important de nous entendre pour proposer ensemble des solutions réunionnaises acceptées par le plus grand nombre, afin de faire avancer la promotion de l’intérêt général du pays.

Pendant cinq jours, des patrons d’un secteur de notre économie ont paralysé le pays pour faire aboutir leur revendication. Au final, ils ont obtenu ce qu’ils demandaient : une baisse de 20 centimes par litre du prix du carburant.
Grâce à la détermination de la Région à rester sur une position de principe, les Réunionnais ont réussi à obtenir des pétroliers qu’ils cèdent 41 millions d’euros. Ce qui représente une baisse du prix à la pompe de 10 centimes pour tout le monde.
Mais ce conflit a provoqué des pertes importantes pour l’économie réunionnaise, tout en entretenant des divisions entre Réunionnais. En ciblant sur la Région, des dirigeants des transporteurs, aidés par l’attitude étrange du représentant de l’Etat, ont détourné l’attention de la revendication de fond portée par un collectif de 25 associations : faire la transparence sur la structure des prix des carburants, et décider d’une baisse de 20% pour tout le monde sur les carburants et la bouteille de gaz, en la finançant par une légère ponction sur les surprofits des compagnies pétrolières.

Rendez-vous inévitables

Or, en cette fin d’année 2008, La Réunion est à la croisée des chemins. Plusieurs échéances se rapprochent, et chacune d’entre elles signifie pour La Réunion une profonde remise en cause. En voici quelques-unes d’une liste non exhaustive :

- Avant la fin de l’année, l’Accord de partenariat économique doit être signé entre l’Union européenne et les pays de notre région. En clair, cela veut dire que mises à part quelques exceptions temporaires, tous les produits fabriqués à La Réunion entreront en concurrence directe avec ceux des pays voisins.

- Les discussions du budget européen qui entrera en vigueur après 2014 vont également commencer après le prochain renouvellement du Parlement européen. Rien ne dit que La Réunion pourra continuer à bénéficier du niveau d’intervention exceptionnel de la période 2007-2013, du fait de l’élargissement de l’Union à des régions encore plus pauvres que notre île.

- Lié à ce nouveau budget, le prochain règlement sucrier autorisera-t-il encore l’Etat à compenser par des subventions le manque à gagner que subit le planteur du fait de l’intransigeance de l’usinier ?

- Plus proche de nous figure la réforme de la défiscalisation pour l’investissement outre-mer. Réunissant l’unanimité des professionnels contre lui, ce projet, s’il est maintenu en l’état, rend moins attractif l’investissement dans l’Outre-mer, notamment dans l’immobilier et l’industrie.

Anticipons ensemble

Toutes ces échéances se déroulent dans un contexte fragilisé par la crise financière. Les spécialistes affirment qu’il faudra plusieurs années à l’économie mondiale pour se remettre du choc de la récession dans les pays d’Europe et d’Amérique du Nord. Or, si la richesse de l’Europe diminue, c’est la principale source des transferts sociaux qui se tarit.
Par ailleurs, les défis du million d’habitants sont toujours là : comment créer suffisamment d’emplois et de logements pour 200.000 habitants de plus qu’aujourd’hui, tout en faisant face à l’urgence actuelle.

Ces rendez-vous sont autant de sources potentielles de crise pour notre pays, chacune d’entre elles pourrait faire basculer une partie de notre population dans une revendication corporatiste, au détriment de la défense de l’intérêt général. Afin d’éviter le pire, le meilleur moyen est d’anticiper, de réfléchir ensemble à une solution réunissant l’adhésion du plus grand nombre.
C’est dans ce sens que la cellule de crise portée mercredi sur les fonts baptismaux inaugure « un nouveau mode de gouvernance territoriale », selon les termes de la présidente du Département. Cela conduit les Réunionnais à prendre eux-mêmes la responsabilité de trouver ensemble des solutions et de les porter dans l’union au plus haut niveau.
Pour cette raison, ce rassemblement est une victoire pour toutes celles et tous ceux qui, depuis des décennies, placent l’intérêt général de La Réunion au centre de toutes les préoccupations.

Manuel Marchal

Les atouts de La RéunionCrise financière

Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus