Le Centre d’essai, recherche, formation (1929 - 2004)

75 ans de sélection variétale et une nouvelle canne

27 novembre 2004

Pour le 75ème anniversaire du CERF, les professionnels de la filière canne ont présenté une nouvelle variété, testée sur différents sites de l’île depuis 1997. La R 580 est la nouvelle vedette du centre de sélection de la Bretagne.

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Voilà un beau cadeau d’anniversaire. À l’occasion des 75 ans du CERF (Centre d’essai, recherche et formation), les professionnels de la filière sucre et canne ont présenté, mardi lors d’une soirée anniversaire, une nouvelle variété de canne testée sur différents sites de l’île depuis 1997.

Pas de doute, après huit ans d’essais divers et variés, la R 580 présente des avantages qui en font la nouvelle “vedette” du centre de sélection variétale de la Bretagne. De quoi redonner confiance aux planteurs, dans un contexte où la marche forcée vers une réforme anticipée de l’OCM-sucre, voulue par les plus gourmands adeptes de la mondialisation, est en train de laisser un (très) court répit aux défenseurs de la filière.

Les planteurs de canne à sucre connaissent déjà la R 580, du moins ceux d’entre eux qui coopèrent avec le CERF et qui, depuis 1997, suivent les essais en cours dans neuf sites de l’île, de Saint-Benoît/Beauvallon au Baril, en passant par Vue-Belle. En leur honneur, et pour rendre la soirée anniversaire plus festive, la direction du CERF avait préparé une remise de trophée à huit collaborateurs du CERF, de différentes catégories (voir ci-après).
Elle avait aussi invité un directeur de recherche variétale de Papouasie Nouvelle-Guinée, le Dr Lastus Kuniata, dont les travaux à la Ramu Sugar Ltd viennent en appui à la principale activité de cette entreprise, qui exploite 8.200 hectares de cannes à 400 mètres d’altitude.

Une activité précieuse pour l’île

La Papouasie Nouvelle-Guinée est "le berceau génétique de la canne à sucre", a dit dans la soirée Jean-Yves Hoarau qui, en l’absence du directeur du CERF, Mick Hellmann, a présenté aux invités le rôle joué par cet organisme, depuis sa création en 1929, en pleine crise de la culture cannière, alors attaquée par la mosaïque.
Il avait autour de lui Guy Dupont, président du CERF et par ailleurs PDG du groupe sucrier de Bois-Rouge, Xavier Thiéblin, vice-président du CERF et président du Syndicat des fabricants de sucre (Quartier-Français), un élu de la Région et du Département, partenaires financiers de la recherche cannière et le préfet, Dominique Vian, le seul à pouvoir s’adresser dans sa langue à l’invité mélanésien (lire ci-dessous).
Toute la profession groupée autour du Centre de sélection variétale, tous ceux qui lui permettent de maintenir depuis 75 ans une activité précieuse pour l’économie de l’île, étaient là mardi pour entourer le personnel du CERF. Et lui souhaiter, comme l’a fait son président, Guy Dupont, une longue et fructueuse continuation, "en travaillant encore plus avec les planteurs, avec le CIRAD et en nous ouvrant davantage sur l’extérieur, sur les autres pays, pour la notoriété de La Réunion".

P. David


R 580 : "riche en sucre"

Le CERF a édité des petites plaquettes présentant la R 580 et l’ensemble des activités de sélection variétale depuis 75 ans.

La nouvelle variété (R 580) présente des performances qui en font une des meilleures sur le plan du tonnage, de l’indice économique et de la richesse en sucre, précise le CERF dans l’une de ses plaquettes de présentation.
La R 580 est une canne fine et droite, facile à dépailler. Elle a peu de duvet sur les gaines jeunes. D’un port droit, les tiges ont des entre-nœuds de longueur moyenne, de couleur verte/jaune, qui peuvent légèrement rosir à l’exposition à la lumière. La R 580 est "sensible à la maladie de l’échaudure des feuilles et à la gommose en condition d’inoculation artificielle intense".
Elle est d’une richesse élevée. C’est une variété de début et de milieu de campagne, dont les zones d’adaptation vont devoir être testées encore sur de grandes surfaces : les tonnages les plus élevés ont été enregistrés dans le Nord et l’Est en altitude moyenne (125-200 mètres) et dans l’Ouest et le Sud en altitude élevée (550-700 mètres).
Dans cinq sites sur neuf, la R 580 dépasse en tonnage ou fait jeu égal avec les variétés élites (R 570, 575, 577 et 579) ou arrive en deuxième position derrière l’une ou l’autre de ces variétés, selon les sites. Il n’y a qu’au Baril - seul site présentant des sols Andols perhydratés (3.500), à 75 mètres d’altitude - que la R 580 ne semble pas adaptée.
Du point de vue de l’indice économique - qui reflète le revenu agricole du planteur - la valeur de la R 580 est supérieure à celle des autres variétés commerciales dans cinq sites sur neuf, situés aussi bien dans l’Est, le Nord, le Sud ou l’Ouest, en haute, en basse ou en moyenne altitude.
Enfin, côté richesse, la R 580 est mieux dotée que toutes ses concurrentes dans tous les sites, excepté celui du Gol. La richesse de la R 580 dépasse souvent celle de R 579 d’un demi à un point et celle de R 570 d’un point à un point et demi.
La R 580 sera maintenue en évaluation chez des producteurs multiplicateurs en 2005-2006, jusqu’à de nouveaux tests sur ses performances et sur les meilleures zones d’adaptation. L’offre de boutures de R 580 sera disponible à partir de 2006-2007.

P.D.


Le Dr Lastus Kuniata, spécialiste mélanésien

La Papouasie-Nouvelle Guinée (au Nord de l’Australie) est l’un des quelque douze pays d’origine des variétés étrangères de canne avec lesquelles le CERF a croisé ses propres variétés pour enrichir son programme d’hybridation.
Le Dr Lastus Kuniata, agronome réputé et docteur en entomologie, est directeur du Département de recherches agronomiques de la société Ramu Sugar Ltd, possédant la seule usine sucrière de son pays : environ 50.000 tonnes de production annuelle, tournée vers la satisfaction du marché intérieur.
Il dirige une équipe de 6 chercheurs, 14 techniciens et 66 ouvriers qui procèdent à des tests de variétés et ont créé d’année en année 7 variétés de canne, à partir d’un programme d’expérimentation/sélection de variétés étrangères, visant à identifier des cannes élites pour l’amélioration de la production sucrière. Le Dr Lastus Kuniata est un spécialiste international de “lutte intégrée” (biologique et chimique) contre les ravageurs de la canne.


Huit trophées

Huit trophées ont été remis au cours de la soirée - entre le punch R 580 et le gâteau anniversaire ! - à des récipiendaires de quatre catégories :

- catégorie “salariés” : Marcel M’Bajombé (34 ans de service) ; Jean-Paul Dijoux (31 ans de service)

- catégorie “essais régionaux” : Jean-Marie Barau, exploitant ; les frères Richard et Bertrand Isautier.

- catégorie “entraide agricole” : Alain et Virginie K’Bidy (CERF de Saint-Philippe) ; les frères Yannis, Claude et Patrice Agathe (exploitants de 25 hectares de R 570 à 579) ; et Carel Coindin-Virama (Trois-Bassins/Vue Belle).

- catégorie “pays étranger” : Dr Lastus Kuniata (Papouasie Nouvelle-Guinée)


Le préfet parle bishlamar

L’animation musicale de la soirée était confiée à Hakim, Christophe et Jacky, de temps en temps interrompus par des sketches de Jean-Laurent Faubourg et Gigi, animateurs à RFO, qui ont entrepris de présenter dans un duo comique les étapes de l’hybridation des variétés de canne.
Il fallait oser... Il n’empêche, Jean-Laurent Faubourg, qui excelle dans le genre “ti kréol-rant-an-bèf-sort-an-stèk”, avait adossé son comique à la faconde des discours politiques : leur longueur, leur style, etc...
Il est resté sans voix lorsque le préfet, Dominique Vian, en souvenir d’un précédent séjour en Nouvelles-Hébrides, a adressé à l’invité de Papouasie Nouvelle-Guinée un petit speech en bishlamar, “pidgin” d’anglo-portugais mêlé à l’un des 700 dialectes mélanésiens parlés dans ce pays.


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