Déclaration du groupe “Alliance” et apparentés

Appel aux parlementaires sur le projet de loi de décentralisation

2 avril 2004

Lors de la séance du Conseil général hier matin, le groupe “Alliance” et apparentés, par la voie de Maurice Gironcel, a lu une déclaration proposant que le Conseil général charge les parlementaires réunionnais d’émettre un vote négatif, mercredi prochain, à l’Assemblée nationale, sur le projet de loi de transfert de compétences :

"Considérant les résultats des élections régionales et cantonales du 28 mars dernier, où la quasi totalité des Réunionnais ont émis soit un vote de sanction, soit exprimé des réserves graves vis à vis de la politique du Gouvernement ;
Considérant qu’il appartient à l’ensemble des responsables des élus, et en l’occurrence du conseil général de tirer les enseignements de ce vote ;
Considérant notamment les déclarations publiques des parlementaires réunionnais :
o les déclarations des députés Huguette Bello et Christophe Payet et du sénateur Paul Vergès, condamnant la politique sociale du gouvernement et demandant le remise en cause de son application à La Réunion ;
o la déclaration du député maire du Tampon demandant au gouvernement “l’infléchissement dans le contenu et dans l’étalement des réformes” ;
o les déclarations des députés René-Paul Victoria et Bertho Audifax s’exprimant dans le même sens ;
o les déclarations du sénateur maire de Saint-André, Jean-Paul Virapoullé, imputant l’échec électoral de la majorité au gouvernement et demandant le départ le plus rapidement possible de la ministre de l’outre-mer, Mme Girardin ;
Les conseillers généraux demandent en conséquence à tous les parlementaires de La Réunion
o d’émettre un vote négatif au projet de loi sur la décentralisation qui sera soumis au vote des députés à l’assemblée nationale le 7 avril prochain et dont les conséquences seront lourdement préjudiciables pour le Département de La Réunion et sa population".

En Commission permanente ?

Maurice Gironcel expliquait très clairement la position de son groupe : il est indispensable que les parlementaires ne votent pas cette loi de décentralisation, qu’ils écoutent "la voix du peuple réunionnais" qui s’est exprimée notamment sur la question du transfert des TOS, ou sur celui des emplois dits aidés.
Une position assez similaire avait été défendue quelques instants auparavant par Philippe Lebreton, pour le groupe socialiste et apparenté, lequel s’inscrira "sans ambiguïté dans l’opposition" lorsque les conseillers généraux défendront la politique ultra libérale du gouvernement. Mais cela ne sera pas une "opposition stérile et incantatoire" puisque les élus socialistes (et apparentés) voteront avec la majorité lorsque les décisions iront "dans le bon sens".
Toujours est-il que, réglementairement parlant, il ne pouvait y avoir de débat à la suite de ces deux déclarations.
Cette demande formulée très explicitement par l’Alliance sera-t-elle prise en compte lors de la première réunion de la Commission permanente du Conseil général, mercredi prochain, à 9 heures ? C’est-à-dire le jour même du vote solennel, à l’Assemblée nationale, du projet de loi sur les “responsabilités locales”.
Ce sera le premier véritable test politique de l’équipe dirigeante du Département : le message lancé par les Réunionnais sera-t-il réellement pris en compte ou sera-t-il “interprété” ?

D. B.


La première présidente du Département n’a pas gagné une sinécure

Quelle sera l’attitude de la présidente sur les grands dossiers de La Réunion ? Aura-t-elle le courage de s’opposer aux orientations ultra-libérales du gouvernement Raffarin3 ? Son discours d’investiture, hier, n’a pas répondu à ces questions.

Les commentateurs ont souligné hier, avec raison, la nouveauté et l’avancée - au moins sur le plan sociétal - que constitue l’élection de Nassimah Dindar, 44 ans, à la présidence du Conseil général. L’élection d’une musulmane est une sorte de pied-de-nez des élus réunionnais à certaine intolérance qui s’est beaucoup fait entendre en France lors du vote de la loi contre le port du voile dans les écoles.
Nassimah Dindar est aussi la première femme élue à cette fonction, après l’élection d’une première députée, puis d’une députée européenne qui fut aussi en son temps - par remplacement - présidente du Conseil régional et enfin d’une sénatrice.
Bon dernier, le Conseil général vient de se mettre à jour - avec panache - ce qui est d’autant plus significatif que cette assemblée, souvent considérée par ironie comme un "syndicat des maires", n’a pas vu depuis des lustres une seule femme élue à la tête d’une municipalité de l’île.
Du coup, cette élection en deviendrait presque suspecte ! Connaissant le grand courage dont sont capables certains élus de la droite réunionnaise, il est légitime de se demander s’ils n’ont pas décidé de mettre une femme en avant pour s’exonérer eux-mêmes d’une tâche qui, dans le contexte de la décentralisation, va s’avérer particulièrement difficile... Il est des situations où il vaut mieux savoir se montrer galant !...
Si nous nous autorisons un peu d’ironie, dans le flot des commentaires sirupeux qui ne vont pas manquer d’accompagner cette élection, c’est en raison des déclarations du sénateur-maire de l’Est, hier au Palais de la Source. Ceux qui se souviennent des injures dont il a couvert la sénatrice du Sud n’ont pu que sourire de ses rodomontades sur le "travail fait à la tête de la Relève".
À l’entendre, c’est lui qui a “fait” l’élection de Nassimah Dindar, lui qui n’est pas conseiller général et dont les deux candidats, à Saint-André, viennent d’être renvoyés dans leurs pénates. Que n’avait-il présenté des femmes ! Peut-être eussent-elles été élues...

“Légine d’avril...”

Plus sérieusement, si l’élection de Nassimah Dindar à la tête du Département est une belle étape franchie par cette vénérable institution, elle ne suffit pas en soi à faire oublier l’important retard pris par la droite réunionnaise ces vingt dernières années. De même qu’une hirondelle ne fait pas le printemps, il faudra plus d’un acte politique pour redresser l’image d’immobilisme et de conservatisme qui s’est attachée à l’UMP-Réunion au fil des ans et des métamorphoses des orphelins de Michel Debré.
Les déclarations fracassantes de Jean-Paul Virapoullé - encore lui... - sur la décision de l’UMP-Réunion de tenir tête au gouvernement Raffarin et de "défendre les Réunionnais" contre les effets de sa politique ont dû, encore une fois, en faire sourire plus d’un. “Légine d’avril...”, diront les facétieux !
Sur le fond, dans les grands dossiers qui attendent la nouvelle présidente et son équipe, rien dans le discours d’investiture de Nassimah Dindar n’est venu apporter une réponse claire à ce que sera le positionnement du Conseil général sur les grandes orientations politiques. Bien au contraire, en évoquant une substitution - même "provisoire" - de la collectivité départementale à l’État dans le règlement de la question de la CMU, la nouvelle présidente ne donne pas un signal clair d’une volonté de résistance à l’ultra-libéralisme qui veut systématiquement faire payer les plus démunis.
Elle n’a pas non plus parlé du partenariat avec les autres collectivités et institutions réunionnaises, notamment dans la mise en œuvre de l’Agenda 21 de La Réunion, dont celles-ci sont toutes signataires.
Les questions restent pendantes aussi concernant le RMI/RMA ou encore le chantier de basculement des eaux, dans lequel a beaucoup pataugé le prédécesseur de Nassimah Dindar. C’est dans le traitement de ces dossiers épineux - auxquels il faut bien sûr ajouter la mise en œuvre de la décentralisation - que la nouvelle présidente fera ou non la preuve de ses capacités politiques. C’est à cela qu’elle sera jugée.

Pascale David


Déclin de Jean-Paul Virapoullé

Camille Sudre, président de Free Dom, a publié hier le communiqué suivant : "À l’occasion du remaniement ministériel, Mme Brigitte Girardin a été reconduite dans ses fonctions de Ministre de l’Outre Mer.
Nous espérons que cette décision ne signifie pas le maintien d’une politique de désengagement de l’Etat vis-à-vis de l’Outre-Mer. Nous jugerons sur pièce.
En attendant, nous ne pouvons retenir une pensée pour Jean-Paul Virapoullé, dont l’influence politique est manifestement sur le déclin".


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