Début de la campagne sucrière dans le Nord et l’Est

Canne à sucre : tout remettre à plat cette année

5 juillet 2021, par Manuel Marchal

C’est aujourd’hui que commence la coupe avec l’ouverture de l’usine de Bois-Rouge. C’est la dernière campagne sucrière sous le régime de l’actuelle Convention canne, tout devra être renégocié l’année prochaine avec plusieurs problèmes : pas de quota ni de prix garanti et totale dépendance de la filière à la stratégie d’un seul acteur : une coopérative de planteurs de betteraves français. Si le Conseil départemental est compétent en matière d’agriculture, la nouvelle présidente de la Région, Huguette Bello, avait fait part à la CGPER de son accord pour lancer des États généraux de la canne à sucre.

La coupe 2021 commence ce matin dans le Nord et l’Est de La Réunion. L’usine de Bois-Rouge a en effet ouvert ses portes. Les prévisions sont pessimistes, la barre des 2 millions de tonnes récoltées qui était monnaie courante jusque dans les années 1990 ne sera encore sans doute pas atteinte. Il s’agit de la dernière campagne sucrière sous le régime de l’actuelle Convention canne. Découlant de la Politique agricole commune, ce document a fixé le prix de la canne à sucre payé par le seul acheteur, Tereos, ainsi que les aides des pouvoirs publics à Tereos et aux planteurs.
Prévue sur la période 2015-2021, la Convention canne a dû être amendée en 2017 pour tenir compte d’un changement fondamental voulu par la majorité des États de l’Union européenne dont la France : la fin du quota et du prix garanti pour le sucre réunionnais.
En conséquence, le prix découle des contrats obtenus par Tereos pour vendre son sucre, tandis que le résidu éventuel doit être écoulé sur le marché mondial à un prix inférieur à l’ancien prix garanti généralement.

Même structure qu’à l’époque du quota et du prix garanti

Pour compenser la fin du quota et permettre au sucre réunionnais de rester compétitif par rapport à ses concurrents européens, l’Europe a autorisé la France à aider la filière. Sur la base d’un surcoût de production de 300 euros par tonne, la filière a obtenu une aide annuelle de 18 millions d’euros. Or, compte tenu des difficultés déjà observées, il s’avère clairement que pour la France, ce n’est qu’une aide transitoire destinée à accompagner la transformation de la filière canne, et donc pas une aide permanente. Or, depuis 2017, la filière canne n’a pas changé de structure, elle est toujours sous la direction d’une filiale d’une coopérative de planteurs de betteraves, dont sont exclus les planteurs de canne réunionnais qui n’ont pourtant que comme seul client la coopérative Tereos. En conséquence, les planteurs réunionnais sont exclus de toutes les décisions qui engagent leur avenir, puisque selon les règles qui s’appliquent depuis 2017, l’avenir de la filière canne dépend de la stratégie de l’industriel, comme l’avait justement souligné Dacian Ciolos, Commissaire européen à l’Agriculture lors d’une visite à La Réunion peu après le vote en 2013 de la suppression des quotas sucriers.

Une certitude : pas de quota ni de prix garanti

Cela signifie que le maintien de la PAC à son même niveau n’apporte aucune garantie sur l’avenir. La seule garantie aurait été le rétablissement du quota et du prix garanti, mais les deux députés originaires de La Réunion au Parlement européen n’ont manifestement pas été en mesure de l’obtenir, alors que les 200.000 tonnes de sucre produits à La Réunion ne sont pas de nature à déstabiliser un marché européen de plus de 14 millions de tonnes.
Il est incontestable que les planteurs sont assis sur une mine d’or car la canne ce n’est pas que du sucre, mais aussi de multiples utilisations et produits diffusés dans le monde notamment grâce aux travaux menés à Cuba. La marche vers l’interdiction du plastique et des énergies fossiles sont en effet des opportunités pour commercialiser des produits dérivés et augmenter la part de la canne à sucre dans l’autonomie énergétique.
Combien rapporte la canne à sucre, combien pourrait-elle rapporter et pour qui ? Ce sont ces questions concrètes qui vont donc être à l’ordre du jour cette année pour discuter du prix de la canne à sucre qui s’appliquera l’année prochaine. Elles supposent une totale transparence.
Ce débat a lieu au moment où les deux principales collectivités viennent d’être renouvelées. Le Département a la compétence de l’agriculture, et donc des fonds européens afférents. A la Région, la nouvelle présidente, Huguette Bello, a fait part de son accord à la CGPER pour aller vers des États généraux de la canne afin de faire toute la transparence sur ce secteur.
L’ouverture de la campagne sucrière rappelle qu’il ne reste que quelques mois pour agir.

M.M.

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