Future Convention canne à La Réunion

Filière canne : l’Etat doit d’urgence tout mettre sur la table

28 juillet 2014, par Manuel Marchal

François Hollande devait annoncer le 25 juillet si la France allait garantir ou pas la survie de la filière canne après 2017, date de la fin du quota sucrier réunionnais. Il a reporté son déplacement. L’Etat s’est exprimé deux fois depuis vendredi. Il a dit maintenir les subventions jusque 2017, puis hier il a demandé d’urgence des discussions sur la nouvelle convention canne dans la perspective de la fin du quota en 2017. Mais de quoi discuter pour les 6 prochaines années si planteurs et usiniers ne connaissent pas la hauteur de l’engagement de l’Etat pour compenser la fin du quota dans 3 ans ? L’Etat doit donc dire s’il s’engage à augmenter ses subventions de 38 millions, le minimum pour sauver la filière canne. Tout dépend de cette décision politique. François Hollande doit donc s’exprimer maintenant sur ce sujet.

Depuis jeudi, les usines sucrières de La Réunion ne reçoivent plus de cannes à sucre.

La convention canne est un accord entre les planteurs, les usiniers et l’Etat pour fixer le prix de la canne. Sa durée est d’en général 6 ans. Jusqu’à présent, les producteurs de sucre de La Réunion ont toujours pu écouler la totalité de la production sur le marché européen. Cette garantie était le résultat de l’attribution à La Réunion d’un quota de 300.000 tonnes, alors que la production sucrière n’a jamais dépassé 270.000 tonnes. Ces dernières années, avec les deux dernières usines, elle est de 200.000 tonnes. Si les industriels n’arrivent pas à vendre tout le sucre, alors l’Europe est tenue de racheter l’invendu à un prix fixe, suffisamment rémunérateur qui met le producteur à l’abri des aléas du cours mondial.
Mais en 2017, ce système de quotas et de prix garantis est supprimé. Si l’usinier n’arrive pas à vendre tout son sucre, l’Europe ne sera plus là pour intervenir. D’où des incertitudes qui n’ont jamais existé pour la filière, et la menace d’une crise sociale, économique, environnementale et politique sans précédent pour La Réunion. La filière représente en effet 30.000 emplois directs et indirects.

Quelles garanties ?

Dans toutes les négociations de conventions canne, usiniers, planteurs et Etat disposaient en effet d’une donnée qui ne changeait pas pendant toute la durée de la Convention canne, celle du prix garanti. L’usinier ayant la certitude de vendre tout le sucre, il pouvait s’engager à acheter toutes les cannes livrées par les planteurs. Le 6 mai dernier, devant les députés de la délégation des Outre-mer, le responsable de Tereos Océan Indien avait été clair sur ce point : « avant de renouveler la convention « Canne » avec les planteurs (en 2015 NDLR), nous avons besoin d’obtenir des engagements sur le cadre institutionnel de la filière, notamment sur le montant des aides.
Il va de soi que nous ne prendrons pas l’engagement de leur acheter des cannes si nous ne sommes pas certains de vendre le sucre. »
Pour pouvoir vendre le sucre réunionnais, l’usinier demande que l’Etat augmente ses subventions pour compenser le déficit de compétitivité par rapport au sucre de betterave. Cela signifie une hausse des subventions de 38 millions de la part de l’Etat, en plus de ses 90 millions d’euros actuels. Les planteurs demandent également cette augmentation.

Appel à négocier une Convention canne

Pour bien faire comprendre à François Hollande l’urgence de la situation, la CGPER a bloqué toutes les plates-formes et les deux usines sucrières depuis jeudi, la veille de l’arrivée du président de la République. Les rencontres avec les conseillers du président et du gouvernement n’ont pas répondu aux attentes. Les planteurs ont poursuivi leur mouvement, demandant aussi à Tereos de lâcher du lest pour les trois prochaines campagnes.
Depuis vendredi, l’Etat s’est exprimé deux fois.
Vendredi, il a annoncé le maintien de ses subventions à leur niveau actuel jusqu’en 2017. Pour la suite, il a renvoyé la responsabilité sur le président de la République, qui devra s’exprimer à ce sujet lors de sa prochaine visite.
Dimanche, l’Etat a demandé la levée du blocage des usines sucrières et appelé à la négociation : « j’invite les acteurs de la filière canne-sucre à programmer sans attendre les discussions sur le sujet de la future convention canne dans la perspective de la suppression des quotas sucriers prévue en 2017 dans le cadre interprofessionnel obligé que constitue le CPCS », écrit le préfet. La prochaine réunion du CPCS a lieu le 6 août, précise-t-il.
Mais l’Etat n’apporte aucune précision sur un point : quel sera son soutien à la filière canne dans la perspective de la suppression des quotas sucriers ? Planteurs et usiniers ne savent pas si l’Etat va s’engager à relever de 38 millions d’euros sa subvention. Or, seule cette décision peut donner la visibilité nécessaire à des négociations sur une Convention canne 2015-2021. Elle doit donc être rendue sans attendre une hypothétique visite d’un président de la République.
François Hollande devait s’exprimer vendredi sur l’avenir de la filière. Il est difficile de croire qu’il se serait borné uniquement à annoncer le maintien des subventions jusqu’à 2017. Il a tous les éléments, il doit s’exprimer maintenant. L’Etat doit donc d’urgence mettre tous les éléments sur la table.

Manuel Marchal

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