La CGPER propose de transformer Tereos Océan Indien en coopérative

Filière canne : les planteurs veulent s’impliquer dans la stratégie de l’industriel

25 juillet 2019, par Manuel Marchal

La proposition de la CGPER montre que des planteurs s’organisent et présentent une alternative innovante pour l’avenir de leur filière. Ces agriculteurs réunionnais veulent aussi être traité à égalité avec les planteurs de betterave, qui sont membres de la coopérative Tereos, propriétaire via Tereos Océan Indien des deux usines sucrières de La Réunion.

Le 18 juillet dernier, le gouvernement a présenté sa position sur la filière canne outre-mer. Il a annoncé tout d’abord le maintien de l’aide compensatoire à la suppression des quotas sucriers ce qui entraînera une nouvelle notification à la Commission européenne. Cette décision s’accompagne de la présentation d’une feuille de route au monde agricole et aux collectivités : présenter d’ici juillet 2020 des propositions pour un modèle agricole conciliant les défis sociaux et climatiques ainsi que l’évolution des marchés.
Le 23 juillet, la CGPER a annoncé une proposition : la transformation de Tereos Océan Indien en coopérative ouverte aux planteurs de La Réunion. Un syndicat d’agriculteurs estime donc que l’avenir de la filière doit s’accompagner d’un plus grand rôle pour les planteurs. Dans la structure actuelle de la filière, ils sont des fournisseurs de matière première à un industriel qui valorise ensuite les différents produits de la canne. Mais à la différence de la France, où les planteurs de betterave sont membres de la coopérative Tereos, les planteurs de La Réunion ne font pas partie de Tereos Océan Indien. Ils n’ont donc pas accès aux comptes, ni au partage des bénéfices tirés de toutes les valorisations et n’ont pas non plus la possibilité d’influer sur la stratégie de l’industriel. C’est ainsi que l’année dernière, des planteurs ont découvert dans la presse un projet de raffinerie suffisamment avancé pour être présenté à un ministre de l’Agriculture en visite à La Réunion.
Or, comme l’avait indiqué en 2013 Dacian Ciolos, commissaire européen à l’Agriculture, l’avenir de la canne à sucre à La Réunion sans la protection du quota sucrier dépend de la stratégie de l’industriel. Des planteurs estiment que cette stratégie ne pourra se faire sans qu’ils soient des co-décideurs, car c’est l’avenir des exploitations cannières qui est en jeu.

Revendication d’égalité

Cette proposition de la CGPER peut être traduite également comme une volonté de prise de responsabilité. Rappelons qu’historiquement, les usiniers étaient des planteurs dont les plus importants ont créé d’importantes sociétés sucrières. Les accords de 1969 ont favorisé la séparation du capital foncier du capital industriel. La concentration s’est poursuivie, parallèlement à un désengagement des usiniers réunionnais. C’est en rachetant les parts de ses partants que Tereos a fini par devenir l’actionnaire majoritaire de Société sucrière de Quartier-Français, prenant ainsi la direction des deux usines de Bois-Rouge et du Gol. Or, un planteur était présent dans le capital de la société sucrière, transformée en Tereos Océan Indien, c’est Société Adrien Bellier. Pourquoi ce qui est possible pour un planteur ne l’est-il pas pour les autres ?
Rappelons également que Tereos est à la base une coopérative de plusieurs milliers de planteurs de betterave. Ces derniers ont donc leur mot à dire dans la stratégie de Tereos, et ont droit au partage des bénéfices issu des activités de Tereos et ses filiales, dont Tereos Océan Indien. Ces planteurs de betterave bénéficient donc du travail des planteurs de La Réunion. L’entrée des livreurs de canne dans Tereos est aussi une question d’égalité.

Responsabilité

Cette prise de position d’un syndicat agricole souligne que face à la crise, des propositions émergent pour faire évoluer la filière. Julie Pontalba a ainsi interpellé les décideurs afin qu’ils s’organisent pour maintenir Ercanne à La Réunion. Ce centre de recherches sur la canne à sucre est reconnu mondialement. Tereos en a hérité au moment du rachat de l’industrie sucrière réunionnaise. Lorsqu’il a menacé de fermer les usines si l’aide de 28 millions n’était pas versée a été rappelée la menace pesant sur Ercanne. Or Ercanne est un patrimoine représentant deux siècles de savoir-faire réunionnais dans la canne à sucre.

M.M.

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