Un bouleversement historique

Fin du quota = fin du prix garanti

21 novembre 2013

Pour la première fois depuis plus d’un siècle, le sucre produit à La Réunion n’aura pas un accès préférentiel au marché européen, c’est la fin d’une époque.

Le sucre qui sera fabriqué à partir des cannes récoltées en 2017 ne bénéficiera plus d’un prix garanti pour sa commercialisation en Europe. C’est une rupture sans précédent, car jusqu’à présent, le sucre produit à La Réunion avait toujours bénéficié d’un accès protégé au marché le plus solvable du monde.
(photo Toniox)

C’est le changement historique que le Commissaire européen est venu annoncer aux planteurs et aux usiniers de La Réunion. Après 2017, il n’y aura plus de quota dans le marché européen du sucre.

S’il y a de la canne à sucre à La Réunion, c’est pour répondre à la demande d’un marché en Europe. Le système des quotas est l’héritage de celui des contingents d’avant-guerre. Chaque usine avait droit à une partie des 64.000 tonnes de sucre réunionnais exporté sur le marché français. Le surplus devait alors être écoulé ailleurs.

Pour La Réunion, le quota accordé aux usiniers est actuellement de 300.000 tonnes. Ce qui veut dire qu’aujourd’hui, les producteurs de sucre de La Réunion ont la garantie d’écouler jusqu’à 300.000 tonnes de sucre en Europe, y compris à La Réunion. Cela représente la totalité de la production, car ce quota n’a jamais été atteint et ne le sera jamais dans les conditions actuelles.

En dessous de 300.000 tonnes, le sucre ne peut pas être vendu en dessous d’un prix plancher. En effet, le quota implique un prix de référence qui est aujourd’hui de 335,20 euros par tonne.

Si aujourd’hui, l’usinier n’arrive pas à vendre tout son sucre au-dessus de 335,2 euros la tonne, l’Union européenne est obligée d’intervenir pour lui acheter le sucre invendu en fonction d’un prix de référence égal à 335,2 euros la tonne.

Mais tout change avec la fin des quotas en 2017.

Après 2017, l’Union européenne ne sera plus obligée d’acheter à un prix convenu à l’avance les tonnes de sucre invendues. Si l’usinier n’arrive pas à vendre, il devra s’aligner sur le cours mondial qui peut être inférieur à celui de l’actuel prix garanti, actuellement, le cours mondial est de 290 euros la tonne à New York.

Lors de sa visite, Dacian Ciolos a souligné que cette fin des quotas était prévue depuis 2006, date de l’entrée en vigueur du règlement sucrier actuel. Pour se préparer à cette échéance, les usiniers auront reçu depuis 2006 au total 330 millions d’euros au titre d’« aide forfaitaire d’adaptation de l’industrie sucrière des DOM à la réforme de l’OCM sucre ». Depuis 2010, cette aide est égale à un montant annuel de 44 millions d’euros.

Une dotation à rapprocher des 75 millions d’euros de bénéfices déclarés l’an dernier par Tereos Océan Indien, qui regroupe les activités des usines à La Réunion et au Mozambique.

L’usinier a anticipé


L’« aide forfaitaire d’adaptation de l’industrie sucrière des DOM à la réforme de l’OCM sucre » est calculée en fonction d’un manque à gagner résultant de la baisse du prix garanti du sucre qui était de 496,8 euros la tonne en 2006 et qui est aujourd’hui de 335,2 euros la tonne.

Si l’usinier arrive à vendre son sucre au-dessus du prix de 2006 (496,8 euros par tonne), il perçoit malgré tout cette aide de 44,163 millions par an.

Il peut donc faire ce qu’il veut de cet argent, le rapatrier en France ou ailleurs, ou investir ici.

L’usinier a donc pu se préparer, il ne peut pas dire qu’il est pris à la gorge.

En effet, cela explique pourquoi les exportations de sucre ont changé de nature. La marchandise stockée dans le silo du Port-Ouest puis chargée en vrac au prix de référence ne représente plus que la moitié de la production. L’autre moitié est soit vendue sur place, soit exportée en containers sous forme de sucres spéciaux. À l’intérieur des boites chargées sur les bateaux au Port-Est, du sucre qui sera vendu plus cher, ce sont les sucres spéciaux.

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