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Filière canne : une crise structurelle - 3 -
15 décembre 2007, par
Confrontés à des difficultés économiques, les grands domaines des usiniers sont démembrés et vendus aux planteurs par l’intermédiaire de la SAFER. Cette réforme agraire aboutit à la situation actuelle : des exploitations cannières d’une superficie moyenne de 5 hectares. Cette parcellisation à l’extrême n’est pas sans conséquence. Elle a transformé du jour au lendemain des ouvriers agricoles en chefs d’entreprise concurrents. Elle diminue le poids économique des planteurs, car avec 5 hectares, il n’y a aucune marge de manœuvre pour diversifier les investissements. Cette structure foncière explique en partie pourquoi les difficultés de la filière sont supportées essentiellement par les planteurs.
En une vingtaine d’années, La Réunion a connu une réforme agraire d’un type particulier. Débutée pendant les années 60, elle trouve son origine dans les conséquences de l’abolition du statut colonial. La loi du 19 mars 1946 a mis fin en droit aux privilèges des plus importants planteurs, qui étaient les usiniers. L’application progressive des lois sociales ainsi que les taxes foncières mettaient les usiniers en difficulté financière. L’abolition du statut colonial s’est donc traduite par une nette diminution de la rentabilité de leur exploitation. Il fallait donc qu’ils vendent leurs terres, ce qui leur permettait d’obtenir des liquidités pour se diversifier. C’est l’Etat qui allait apporter la solution. C’est la création de la SAFER, en 1965.
La SAFER a droit de préemption sur tous les grands domaines mis en vente. Elle joue un rôle d’intermédiaire entre l’usinier et l’acheteur. Ce dernier est en priorité un ancien travailleur de la propriété mise en vente. Avant la vente, la SAFER va découper les grands domaines en petites exploitations d’une superficie moyenne de 5 hectares. Officiellement, l’objectif est de garantir un revenu suffisant (1) pour un planteur et sa famille. Autre intermédiaire : le Crédit Agricole. C’est auprès de cette banque que les planteurs vont s’endetter sur au moins 20 ans pour acheter les terres à cannes, et c’est donc cette banque qui donnera à l’usinier les liquidités issues du produit de la vente de son terrain.
Des milliers d’emplois supprimés
En définitive, c’est le planteur qui s’est endetté pour permettre à l’usinier d’assurer la reconversion de son capital en le diversifiant dans des secteurs bien plus rentables que la terre (2).
Cette réforme agraire a atteint un autre objectif : elle a transféré vers le planteur les charges foncières que l’usinier n’a plus à payer.
L’autre aspect de cette réforme agraire est qu’elle porte la suppression de milliers d’emplois. Conjuguée aux accords de 1969, elle a comprimé de manière radicale les effectifs des planteurs. A l’époque, ils étaient 20.000. En restructurant la sole cannière en exploitations de 5 hectares selon le principe que cette superficie garantissait en 1965 un revenu suffisant pour un planteur et sa famille (voir encadré), la réforme agraire prévoyait dès le départ qu’il ne subsisterait pas plus de 7.000 livreurs de cannes. Rares sont les petits planteurs de l’époque à avoir persisté dans la culture de la canne. Plus de 15.000 familles ont donc dû tenter une reconversion ou ont accompagné dans le chômage les ouvriers d’usine victimes de la fermeture de leur outil de travail. Au terme de la réforme agraire, le nombre de livreurs de cannes est inférieur à 5.000. Ce qui tend à prouver que l’objectif prévu a été atteint.
Au service de la division du travail
Le démembrement des grands domaines en parcelles de 5 hectares a également contribué à déséquilibrer le rapport de force entre usiniers et planteurs. Face à quelques détenteurs du capital industriel, les fournisseurs de matière première sont divisés en milliers d’entreprises concurrentes dont le revenu est à peine suffisant pour vivre. Par contre, l’industriel a la marge de manœuvre financière pour se diversifier, pour faire de la recherche et du développement afin d’améliorer son outil de travail. Cette marge de manœuvre n’existe pas pour le chef d’une exploitation de 5 hectares, qui s’est endetté pendant 20 ans pour acquérir son capital.
La division à l’extrême des anciens grands domaines des usiniers a également abouti à l’émergence d’une nouvelle classe de petits et moyens exploitants. En effet, depuis les accords de 1969, tous les planteurs sont devenus individuellement les fournisseurs de la même matière première.
Maintien d’un rapport de force déséquilibré
Alors que se poursuivait le phénomène de concentration du capital industriel pour déboucher sur le monopole actuel, c’est-à-dire un seul propriétaire pour toutes les usines, le capital foncier est divisé en milliers d’entreprises individuelles, consacrant ainsi le rôle économique, politique et idéologique de l’usinier dans la filière.
La situation aurait été totalement différente si le transfert du capital foncier s’était fait sous la forme de cessions de domaines de centaines d’hectares, exploités en coopérative par les planteurs. Il est incontestable que le regroupement d’une centaine de planteurs pour exploiter une superficie de 500 hectares procure à l’exploitation davantage de trésorerie, et permet des économies de fonctionnement. Une exploitation agricole de 500 hectares permet de dégager suffisamment de marge de manœuvre financière pour faire de la recherche-développement, cela afin de diversifier et de valoriser son capital foncier et ses productions. Par ailleurs, ce type d’organisation permet un rapport de force plus équilibré, car en face de lui, l’usinier n’a qu’un nombre réduit de fournisseurs de matière première, ce qui permet à ces derniers de se rassembler plus facilement pour mieux faire entendre leurs revendications.
En faisant le choix de restructurer la sole cannière en exploitations de 5 hectares, l’Etat, par l’intermédiaire de la SAFER, a interdit cette possibilité aux planteurs. La réforme agraire a permis aux bénéficiaires du système colonial d’avant-guerre de préserver leurs intérêts tout en empêchant le rééquilibrage du rapport de force entre usiniers et planteurs. Loin d’avoir un contenu progressiste comme de nombreuses réformes agraires entreprises dans le monde, celle lancée à La Réunion dans les années 60 est conservatrice, elle reproduit sous une autre forme les inégalités du système colonial. Elle a abouti sur la structure actuelle de la filière canne, accentuant la division du travail afin que l’usinier puisse valoriser au mieux son capital en transférant sur le dos du planteur ses charges d’exploitation les plus lourdes.
Manuel Marchal
(1) Pour se donner une idée, les “Cahiers de l’agriculture” publié par le Conseil général et d’autres acteurs du monde agricole fixent comme objectif un revenu de deux SMIC pour une exploitation d’environ 5 hectares. Deux SMIC à partager entre l’exploitant et son conjoint. De cela, il faut déduire les remboursements d’emprunts et les charges d’exploitation (engrais, irrigation...). Il ne reste plus grand-chose pour investir.
(2) Voir “Témoignages” du 13 décembre 2007.
Le contexte de la réforme foncière
Il faut tenir compte du contexte dans lequel s’est déroulée cette réforme agraire dans les années 60. Elle a eu lieu en plein pendant la mise en œuvre d’une départementalisation au contenu réactionnaire qui visait à refuser aux Réunionnais les droits découlant du fait de l’abolition du statut colonial. Loin de remettre en cause la structure coloniale de la filière canne d’avant 1946, la réforme agraire a permis aux bénéficiaires du système colonial d’avant-guerre de préserver leurs intérêts.
Elle a eu également pour effet de contrecarrer l’émergence d’une classe ouvrière agricole capable par ses luttes de transformer la filière pour aboutir à un plus juste partage des richesses de la canne, l’or vert.
La réforme agraire a donc figé cette classe ouvrière, composée de journaliers et de colons partiaires, dans une fonction de fournisseur de matière première, au prise dès le départ à des difficultés financières liées à l’acquisition de son outil de travail, que l’ancien ouvrier agricole ne peut pas exploiter à sa guise. En effet, la SAFER « a un droit de regard de 15 ans durant lesquels l’agriculteur ne peut modifier la destinée du terrain à vocation agricole, le revendre ou le mettre à disposition sans son autorisation » (“Ruralia” de mai 1999). Dans ce contexte, les conditions d’organisation de la lutte sont nettement plus difficiles.
Si la départementalisation avait eu un contenu progressiste, alors la réforme agraire aurait débouché sur une structuration radicalement différente de la filière canne, au lieu d’accentuer les déséquilibres structurels entre les différents acteurs de la filière.
L’usinier fait pousser des immeubles
Au cours de la réforme agraire, les usiniers n’ont pas vendu toutes leurs terres. Ils ont conservé les moins intéressantes sur le plan agronomique. Ces terres sont aujourd’hui déclassées. Là-dessus, l’usinier investit dans l’immobilier. Cet investissement est largement subventionné par l’Etat par le biais de la défiscalisation. Du fait de la pénurie de foncier à La Réunion, ces anciennes friches valent aujourd’hui beaucoup plus que les terres à cannes. Là aussi, l’usinier a pu valoriser considérablement son capital.
L’évolution du pouvoir d’achat pas prise en compte
La réforme agraire lancée en 1965 avait estimé qu’une superficie de 5 hectares était suffisante pour faire vivre un planteur et sa famille. Elle n’a pas pris en compte l’évolution du pouvoir d’achat. Car il est bien difficile aujourd’hui de faire vivre une famille avec 5 hectares de cannes, malgré les gains de productivité qui peuvent être observés ici ou là. Car depuis 1965, le coût de la vie a considérablement évolué, tout comme les charges d’exploitation. La réforme agraire n’a pas tenu compte de ce contexte mouvant. Et si, en 1965, 5 hectares pouvaient suffire, ce n’est plus le cas aujourd’hui.
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