Cinq années pour se remettre d’une campagne désastreuse - 7 -

L’impact des accords de 1969

11 décembre 2007, par Manuel Marchal

La fermeture de l’usine du Gol mercredi dernier pénalise de nombreux planteurs. Elle illustre le rapport de force déséquilibré qui caractérise la structure de la filière canne. Depuis les accords de 1969, le planteur est cantonné au rôle de vendeur de matière première, et c’est la logique de l’industriel qui l’emporte.

Mercredi dernier, il restait 10.000 tonnes de cannes à récolter dans le Sud. Depuis le début de la semaine précédant sa fermeture, l’usine du Gol recevait des tonnages supérieurs aux habituelles fin de campagne. Quant à la richesse, elle était en progrès.
Mais l’usine a fermé mercredi alors que la campagne battait encore son plein dans le Sud. Des milliers de tonnes sont donc restées à terre. Ces milliers de tonnes représentent autant d’heures de travail et d’investissements pour les planteurs. Alors que ces cannes pouvaient leur procurer un revenu, elle vont pourrir sur pied.
Fixée par les réunions des Commission mixtes d’usine du Gol et de Bois-Rouge le 26 novembre, la date de fermeture n’a pas été reportée. Pour les représentants des planteurs présents devant la cour de l’usine au moment de la livraison du dernier chargement, le refus de prolonger la campagne vient de l’usinier.
Force est de constater que deux logiques se sont opposées. Pour les planteurs, il fallait continuer les livraisons. C’était un moyen d’effacer une partie des séquelles d’une campagne catastrophique. L’industriel avait une autre logique. Car s’il avait partagé celle des planteurs, il n’aurait pas fermé à la date prévue. C’est la logique de l’usinier qui s’est imposée.
Depuis l’accord de 1969, les différents acteurs de la filière sont répartis selon une division du travail. Le planteur est un fournisseur de matière première. En échange d’un prix fixé, l’usinier devient le propriétaire de la matière première et peut ensuite en tirer tous les bénéfices.
Cette division du travail a eu deux conséquences lourdement payées par les planteurs cette année. En début de campagne, le retard dans l’ouverture des usines a entraîné une perte de revenu pour les planteurs qui devait livrer à cette époque. Pourtant, ils n’étaient en rien responsables de la décision de mettre en production des machines qui n’étaient pas au point à 100%. Mais vu que leur fonction se limite à celle de fournisseur de matière première, ils n’ont pas eu leur mot à dire dans cette décision.
L’autre événement est celui de l’arrêt de la campagne. Là aussi, les planteurs n’ont pas pu peser sur la décision prise par le propriétaire de l’usine.
Dans ces deux cas, c’est la logique de l’industriel qui a pu triompher. Et dans les deux cas, les planteurs sont perdants. Car l’usinier peut se permettre de prendre une décision qui pénalise le planteur sans craindre de devoir indemniser les pertes qu’il provoque chez ceux qui lui vendent leurs cannes.
Cette situation perdurera tant que perdurera la structure de la filière canne qui cantonne les planteurs au rôle de fournisseurs de matière première, sans qu’ils puissent intervenir dans la gestion du procédé industriel qui transforme le fruit de leur travail en différents produits.

Manuel Marchal


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