La canne c’est le sucre, mais pas seulement -45-

La canne à sucre sous le coup de la menace OGM (suite 2) au Brésil

31 janvier 2015, par Georges Gauvin

Dans Témoignages du mardi 27 janvier, nous avons entretenu nos lecteurs sur la menace OGM pesant sur la canne à sucre. On a évoqué les cas de l’Indonésie et de l’Australie, mais ce ne sont pas les seuls pays du sud qui connaissent une telle situation. D’autres pays gros producteurs de cannes se sont laissés gagner à la contagion des génétiquement modifiés. Sans émettre pour le moment d’opinion arrêtée sur la question proprement dite des organismes génétiquement modifiés, Témoignages invite ses lecteurs à se renseigner avec leurs moyens d’information habituels sur cette question d’importance mondiale qui n’est pas seulement d’ordre philosophique, mais aussi d’importance économique et sociale, avec particulièrement la menace qui pèse sur les petits paysans.

Intéressant peu jusqu’à ces dernières années les grands semenciers mondiaux, la canne à sucre devrait pourtant avoir bientôt sa variante OGM. Le Centre technique de la canne brésilien, financé par plusieurs groupes sucriers, dont la coopérative française Tereos, teste en plein champ une variété génétiquement modifiée. Cet OGM, mis au point dans le plus grand pays sucrier au monde, dispose d’un gène Bt (Bacillus thuringiensis), conférant une résistance à des insectes nuisibles comme la pyrale. Le CTC, qui travaille sur le projet depuis dix ans, estime pouvoir commercialiser sa canne à sucre Bt d’ici à 2017.(extrait Usine nouvelle n°3390)
La multinationale américaine Monsanto a annoncé en novembre 2008 se lancer dans la production de canne à sucre transgénique car d’après l’entreprise « aujourd’hui la canne à sucre fait partie des global commodities (produit exploitable à l’échelle mondiale) comme le soja ou le coton ». C’est un marché mondial très lucratif, ne serait-ce que pour l’éthanol de canne dont la demande mondiale excède déjà largement l’offre… Par ailleurs Monsanto a acheté deux compagnies brésiliennes de biotechnologie, Canavialis SA et Alellyx SA, pionnières dans les modifications génétiques de la canne à sucre. Canavialis est la plus grande entreprise mondiale de semences de canne à sucre et collabore directement avec 46 centres de production au Brésil, ce qui représente 20 % de la production nationale pour une superficie totale de 1,1 million d’hectares. Alellyx est une compagnie de génétique appliquée qui se dédie au développement de la canne à sucre et d’eucalyptus transgéniques. Ces deux entreprises étaient déjà sous contrat avec Monsanto depuis 2007 pour développer une canne à sucre « Roundup Ready » tolérante au Roundup(cela vous dit quelquechose, vous les jardiniers ?). Monsanto affirme vouloir, avec l’aide de ces deux nouvelles entreprises, développer des semences de cannes à sucre avec des rendements améliorés d’ici à l’horizon 2016.

Les superficies plantées en OGM ne cessent d’augmenter

A la lecture de ce qui précède, on en déduit que la canne à sucre n’est pas à l’abri de la culture OGM. Les autres cultures commerciales ont pris de l’avance sur elle mais si l’agriculture OGM devait l’emporter,- ce qui n’est pas à exclure – elle l’emporterait aussi dans le domaine de la canne à sucre. Le nombre de pays cultivant des plantes génétiquement modifiées est en léger recul —27 en 2013. Mais les surfaces OGM mondiales ne cessent d’augmenter, selon un rapport de la Fédération internationale des Amis de la Terre publié mercredi 30 avril. En se fondant sur les chiffres des industriels, avec les données du rapport annuel de l’International Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications (Isaaa), l’ONG compte 28pays cultivateurs d’OGM en 2012, 29 en 2011 et 2010. Certains pays ont arrêté ou suspendu la culture d’OGM en 2013, comme la Pologne et l’Egypte.« Pour 2013, 18millions d’agriculteurs cultivent des produits génétiquement modifiés dans 27 pays, note l’ONG. Cela représente moins de 1 % de la population agricole mondiale. »
(à suivre)

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Messages

  • Pourquoi une canne à sucre Bt qui permettrait de lutter génétiquement contre un insecte nuisible, la pyrale, sans utiliser un insecticide chimique de synthèse, serait elle dangereuse pour les petits agriculteurs ? Si on observe le cotonnier transgénique Bt qui permet de lutter génétiquement contre un insecte nuisible sans utiliser un insecticide, on constate que ce cotonnier Bt est très apprécié par des centaines de milliers de petits agriculteurs en Inde, en Chine, au Burkina Fasso...

  • Parce que chaque cellule de la plante va produire des molécules insecticides dans des quantités au total 10 à 50 fois supérieures à celles qu’aurait épandues l’agriculteur même lorsque la pyrale ne sera pas en quantité dommageables.
    Parce que ces molécules vont restées des mois après la récolte dans le sol et intoxiquer ceux qui y travaillent et leurs ressources en eau potable alors qu’un insecticide de synthèse dosé raisonnablement disparaitra du sol après quelques semaines.
    De plus, les plantes Bt sont loin de satisfaire, comme vous le dites, des centaines de milliers de petits producteurs dans le monde mais bien ceux qui en tire les bénéfices, qui ne vivent jamais bien entendu, sur les zones de production.


Témoignages - 80e année


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