Malgré les investissements des planteurs

La diminution du rendement à l’hectare

17 décembre 2007, par Manuel Marchal

Malgré tous les efforts faits par les planteurs, le rendement à l’hectare stagne depuis 30 ans. Ce qui veut dire que pour mettre la filière à l’abri d’aléas conjoncturels, il est important d’augmenter la superficie de la sole cannière. Mais se pose la question de savoir qui fera l’effort d’investir dans le foncier. Est-ce au planteur de réparer les conséquences des décisions des usiniers qui, par le passé, ont vendu la totalité de leurs terres à cannes ?

Cannes à sucre : rendement à l’hectare
Evolution des rendements en tonnes de cannes à l’hectare depuis 1978.
Sucre : rendement à l’hectare
Evolution des moyennes quinquennales depuis 1978.

Lors du bilan de la campagne sucrière, l’Interprofession, par la voix du co-président industriel, a souligné en substance que l’augmentation du rendement à l’hectare au cours des 50 dernières années avait permis de limiter en partie les dégâts. Car il faut remonter à 1958 pour trouver une aussi faible récolte. Cette année-là, 1,483 million de tonnes avaient été livrées pour une superficie de 40.000 hectares. En 2007, les deux usines ont réceptionné 1,575 million de tonnes pour une superficie d’environ 26.000 hectares.
En termes de rendement, entre 1958 et 2007, le progrès est certain. On passe de 37 à 61 tonnes de cannes à l’hectare.
Mais la courbe de progression n’est pas linéaire. Après une phase de croissance, elle stagne, voire décroît depuis une trentaine d’années.
Or, depuis 30 ans, les planteurs ont beaucoup investi pour améliorer leur productivité : replantation, mécanisation, irrigation, formation. Cet effort est accompagné par les pouvoirs publics par le biais d’aides et par le financement de grands travaux d’aménagement.

Diminution des surfaces

Les 30 dernières années ont notamment été marquées par la mise en service du périmètre irrigué du Bras de Cilaos et par le début du Basculement, limité actuellement à un transfert des eaux de la Rivière des Galets aux antennes situées sur les territoires de Saint-Paul, Trois-Bassins et Saint-Leu.
Pendant ce temps, les superficies diminuent : plus de 7.000 hectares perdus en 30 ans. Stagnation des rendements et diminution de la sole cannière arrivent à un résultat : la diminution de la production. Une diminution tellement importante que quand des facteurs conjoncturels défavorables se conjuguent, la récolte dépasse à peine 1,5 million de tonnes.
Ceci étant dit, en considérant les rendements actuels, les industriels estiment qu’avec une superficie de sole cannière comparable à celle de la fin des années 70, la récolte aurait été supérieure à 2 millions de tonnes de cannes. Cela correspond aux tonnages de l’époque. Car même après le passage du cyclone Hyacinthe, les planteurs avaient livré, en 1980, 2,14 millions de tonnes, soit 600.000 de plus que cette année.
Pour les industriels, cet écart s’explique par le recul des surfaces.
Mais pour comprendre cette diminution, il faut remonter aux origines de la réforme agraire lancée en 1965.

Qui investira dans 4.000 hectares de foncier ?

L’usinier était propriétaire foncier. Il a vendu ses terres pour investir son capital dans des produits plus performants que le foncier. D’autres décisions prises par les usiniers de l’époque ont pesé lourd : il s’agit de la fermeture des Sucreries. Chaque fermeture s’est accompagnée d’une diminution de la sole cannière. Pour s’en rendre compte, il suffit de constater ce que sont devenues les surfaces qui entouraient les anciennes usines. C’est ce que l’on voit. Or, ces terres cannières appartenaient à l’usinier. La fermeture de chaque usine a aussi entraîné l’abandon de la canne par des petits planteurs situés à proximité des anciens lieux de production. C’est ce que disent les chiffres.
Aujourd’hui, l’Interprofession ambitionne d’augmenter la surface cannière à 30.000 hectares. Qui fera l’effort d’investir pour acquérir et mettre en valeur 4.000 hectares ? Il est clair que c’est le planteur qui sera mis à contribution. Or, chacun sait qu’en vendant toutes leurs terres, les anciens usiniers portent une lourde responsabilité dans le recul de la sole cannière. D’où cette question qui révèle un problème structurel de la filière canne. Est-ce uniquement aux planteurs de réparer les conséquences des décisions prises par les usiniers ?

Manuel Marchal


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