Point de vue de l’ONG Oxfam

La réforme du sucre à l’encontre du développement

28 novembre 2005

De nombreux acteurs concernés par la production du sucre, sa consommation et sa commercialisation en Europe et dans les pays en développement ont exprimé leur désaccord avec la proposition de réforme de la Commission européenne. Un article daté du 24 novembre dernier, extrait du site http://www.oxfamsol.be.

Depuis plusieurs mois, de nombreux acteurs concernés par la production du sucre, sa consommation et sa commercialisation en Europe et dans les pays en développement ont exprimé leur désaccord avec la proposition de réforme mise sur la table par la Commission européenne le 22 juin dernier.
Avec ces acteurs, Oxfam défend une réforme qui :
o réduise le niveau de production de sucre en Europe et mette fin au dumping du sucre.
o améliore l’accès maîtrisé des pays en développement au marché européen à des prix rémunérateurs.
o renforce un secteur de sucre durable en Europe et dans les pays en développement au bénéfice des producteurs familiaux.

Mais la présidence européenne britannique s’obstine dans une réforme où les producteurs européens et ceux des pays en développement seront perdants. Elle maintient quasi intacte la proposition de la Commission. Celle-ci va bien au-delà de ses engagements commerciaux internationaux et ne tient absolument pas compte des recommandations du Parlement européen, du Conseil économique et social ou des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et des pays les plus pauvres (PMA).

Prix plus bas, moins de revenus

En effet, la présidence européenne britannique veut imposer la ligne de conduite qui consiste essentiellement à baisser de manière drastique le prix européen du sucre et celui de la betterave afin de les aligner progressivement aux prix mondiaux.
Ceci impliquera une chute de revenus importante pour tous les producteurs, partiellement compensée en Europe. Pour les pays ACP, un fonds de 40 millions d’euros est censé compenser les pertes chiffrées à près de 500 millions d’euros par an. Cette situation risque de conduire, tant en Europe que dans les pays en développement, à la disparition du secteur sucrier dans de nombreuses régions dépendantes de la production sucrière et qui n’ont souvent pas d’autres alternatives économiquement rentables.
D’autre part, la possibilité d’un accès libre au marché européen pour les pays les moins avancés (PMA) offerte dans le cadre de l’initiative "Tout sauf les Armes" (TSA) bénéficiera plus aux commerçants encouragés à acheter du sucre à bas prix en provenance du Brésil, par exemple, et à le faire transiter vers l’Europe via les PMA.
Malgré les demandes répétées des PMA d’améliorer l’initiative TSA, les objectifs de développement qu’elle prétend soutenir se voient annulés. La Commission prévoit elle-même que suite à la chute de prix drastique, l’augmentation réduite des exportations des PMA leur rapportera moins de revenus !.

Les enjeux : l’emploi, le développement rural et la sécurité alimentaire

Cette proposition de réforme, reposant sur la recherche de compétitivité et des prix les plus bas, va totalement à l’encontre des objectifs d’éradication de la pauvreté et du développement. Elle ne prend pas en considération les enjeux fondamentaux que sont l’emploi, le développement rural et la sécurité alimentaire.
"Malgré les discours, le développement n’a pas été une préoccupation dans la réforme. La pauvreté va s’aggraver dans les pays en développement et, en Europe, un des piliers pour renforcer une agriculture durable et familiale disparaîtra", souligne Thierry Kesteloot d’Oxfam-Solidarité.
"Ces propositions servent de monnaie d’échange dans les négociations de l’Organisation mondiale du commerce qui visent avant tout à déréguler les marchés du sucre au détriment des plus petits producteurs. Les grands bénéficiaires de la réforme seront sans aucun doute les entreprises utilisatrices de sucre et la grande distribution, les commerçants internationaux et quelques grandes plantations dans certains pays en développement", poursuit-il.
Oxfam demande le maintien de prix rémunérateurs pour les producteurs en Europe et dans les pays ACP bénéficiaires du “Protocole Sucre”, bénéfice que l’organisation demande d’élargir à l’ensemble des pays les plus pauvres ou PMA, producteurs de sucre, aux mêmes conditions que les pays ACP.
Oxfam soutient une régulation cohérente de la production européenne et de ses importations. La réforme doit de cette façon fixer un plafond pour la production européenne à un niveau inférieur à sa consommation domestique, permettant ainsi une quantité définie d’importations préférentielles quotas) en provenance des pays ACP et des PMA.
Ce quota d’importations payées à un prix rémunérateur devra renforcer les capacités à répondre à des normes sociales et environnementales. La réforme doit en effet promouvoir des modes de production agricoles durables en Europe, dans les pays développés et en développement

(Source Oxfam)


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