Réaction après la réforme du système sucrier européen :

La Réunion se distingue

28 novembre 2005

Il y a quelques mois, après l’annonce de la décision de l’OMC à propos de l’organisation européenne du marché du sucre, on indiquait que « La Réunion était épargnée » avant de faire état d’inquiétudes. La décision prise jeudi par le Conseil des ministres européens de l’agriculture a été accueillie avec soulagement sinon optimisme. « La filière souffle » écrit l’un de nos confrères tandis que l’autre affirme : « horizon dégagé pour la canne ». Ces opinions souvent appuyées sur les réactions de la profession tranchent avec la prudence sinon avec l’inquiétude manifestées hors de La Réunion devant ce qu’il convient d’appeler un nouveau partage mondial du marché du sucre.

Dans son communiqué de presse commentant la récente décision décision du conseil des ministres européens de l’Agriculture, le PCR mettait en garde contre "toutes déclarations définitives, surtout lorsqu’elles sont d’un optimisme exagéré". Sans aucun doute, le parti d’Élie Hoarau se souvenait-il d’un précédent : celui de la décision de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) condamnant l’Organisation Communautaire du Marché du Sucre (OMC-Sucre). "La Réunion épargnée" titrait un de nos confrères avant de faire, un peu plus tard, étalage des inquiétudes exprimées par la profession.
C’est presque au même scénario, en tout cas à son début, que nous assistons actuellement. "Horizon dégagé" titrait samedi “le Quotidien” tandis que son dalon du groupe Hersant annonçait - de manière plus soft : "la filière souffle : statu quo jusqu’en 2014".

Sur quelle base ?

Le projet de réforme qui est sorti des négociations entamées la semaine dernière devra être avalisé par le Parlement européen. Il devra surtout être accepté par l’OMC où une cellule spéciale consacrée à la question du sucre devra donner un avis courant mai 2006, selon de récentes déclarations de Mme Fischer-Boel. La plupart des experts pensent qu’il ne devrait guère bouger. Où alors les commentateurs tirent-ils les raisons de leur optimisme pour la filière réunionnaise ? Leur sentiment est d’autant plus étonnant qu’ils ne semblent pas disposer à l’heure actuelle de tous les éléments d’informations sur la réforme.
Sur quoi se basent-ils en effet ? Une baisse du prix du sucre à 36% étalée sur 4 ans, une compensation annoncée à près de 65% pour les betteraviers et la possibilité, pour le gouvernement français de disposer d’une aide nationale de 90 millions d’euros. C’est bien maigre.

Inquiétude ailleurs

Or, l’optimisme réunionnais avec la prudence sinon l’inquiétude manifestée ailleurs. "Conséquence de cette réforme, les pays européens les moins compétitifs devraient cesser la production" écrit par exemple “Le Monde”. "Les pays méditerranéens, et quelques États nordiques, comme la Finlande ou la Pologne, considèrent que la réforme va se faire au détriment de leurs producteurs. La Confédération internationale des betteraviers européens (CIBE), hostile au projet, a regretté jeudi, à Paris, la prochaine disparition de "120 000 planteurs de betteraves et de 80 sucreries" dans les pays les plus exposés, comme l’Italie, l’Espagne, et l’Irlande" ajoute le même journal.
À Maurice, par contre la presse est très sévère : "“Coup de massue !”. “Tragédie !”. “Très grave pour le pays !”. Le sucre mauricien perd 36% de sa valeur sur le marché européen", écrit “l’Express”.
On se prépare à une nouvelle répartition des parts de marché entre gros producteurs. La France et l’Allemagne se voient ouvrir le marché européen. "Sur le marché mondial, ce sont incontestablement les Brésiliens qui seront les plus grands bénéficiaires de la réforme du sucre européen adoptée par les 25 États membres de l’Union. Les Africains habitués au sucre de betterave fourni par l’Europe vont rapidement passer au sucre de canne du Brésil ; le premier producteur et exportateur convoite aussi les marchés de Madagascar et du Sri Lanka, laissant l’Afrique de l’Est et l’Asie du Sud-Est à la Thaïlande et à l’Australie", commente Radio France Internationale.
Il est difficile de penser que La Réunion ne serait pas touchée à un moment où à un autre par ce véritable cyclone.

J.M.


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