La CGPER et les enseignements du référendum du 29 mai

Le gouvernement face à ses responsabilités

6 juin 2005

De nombreux planteurs avaient répondu hier à l’appel de la CGPER. Le syndicat présidé par Jean-Yves Minatchy faisait hier le point sur les enseignements du référendum du 29 mai prochain, et sur les prochains rendez-vous qui attendent les agriculteurs, dans le cadre de la réforme de l’Organisation communautaire de marché du Sucre.

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C’est le 22 juin prochain que la Commission donnera ses nouvelles propositions, et d’après les différents échos de Bruxelles, il semble que l’on se dirige vers une baisse encore plus importante du prix du sucre, à la suite du rejet de l’appel de l’Union européenne devant l’OMC. Cette dernière instance donnant pour le moment raison au Brésil, à l’Australie et à la Thaïlande, qui dénoncent l’organisation actuelle du marché du Sucre européen.
La commissaire européenne à l’Agriculture veut aller plus loin que son prédécesseur, souligne Jean-Yves Minatchy, et évoque une baisse de prix de 40%. Si une telle mesure est brutalement appliquée, c’est la fin des planteurs à La Réunion, car comment peut-on continuer à exploiter si du jour au lendemain on diminue les revenus du planteur de 40% ?

Test du 22 juin

La CGPER renouvelle son mot d’ordre, qui est une compensation à l’euro près de la baisse de revenu du planteur de cannes. Cette réforme de l’OCM-Sucre sera l’occasion pour le nouveau gouvernement de prouver que ses actes sont en accord avec ses paroles, précise le président de la CGPER.
À la suite du référendum du 29 mai dernier, le nouveau Premier ministre, Dominique de Villepin, a affirmé avec force que l’emploi est la priorité de la nouvelle équipe en place. Le 22 juin, il passera un test décisif : "si le couperet tombe le 22 juin, le Premier ministre va devoir prouver qu’il lutte pour l’emploi".
"Dans un pays avec plus de 30% de chômage, nous n’avons pas le droit à l’erreur", poursuit le dirigeant syndical, "la canne, c’est 5.000 producteurs, 15.000 emplois directs et indirects, 5 millions d’euros d’exportation".
Jean-Yves Minatchy ajoute que si la compensation de la baisse annoncée n’est pas totale, ce sont les petits et moyens planteurs qui sont directement menacés. Or, ce sont ces planteurs qui ont le plus investi ces dernières années, ce sont eux qui font principalement vivre les vendeurs de matériels, et lors de la campagne 2004, "sur 1,9 million de tonnes de canne, 1,6 million ont été livrées par des petits et moyens planteurs, sans eux, les deux usines ferment", indique Jean-Yves Minatchy.

Le droit à la compensation intégrale

La CGPER ne croit pas que la diversification vers le maraîchage ou l’élevage puissent être des solutions durables de reconversion de la sole cannière. "Si on augmente la surface de terres consacrées au maraîchage de 1.000 hectares, c’est la surproduction. 5.000 hectares de superficies supplémentaires pour l’élevage, c’est la fin de la filière", précise Jean-Yves Minatchy.
"Le gouvernement doit mettre en place des mesures compensatoires" si jamais la réforme de l’OCM-Sucre s’applique, d’autant plus que le traité d’Amsterdam reconnaît à La Réunion le droit à des "mesures spécifiques". Un droit à la protection de notre économie fragile, surtout si l’on voit que dans notre région, des pays sont capables de concurrencer les produits de l’agriculture réunionnaise avec des coûts de production beaucoup moins élevés. Ce n’est pas La Réunion qui va menacer le marché mondial du sucre, conclut Jean-Yves Minatchy, "nous voulons vivre dignement de notre travail".

Manuel Marchal


Référendum : une mobilisation et un résultat sans précédents

Au cours de la rencontre d’hier avec les planteurs, le président de la CGPER a tiré les enseignements du scrutin de dimanche dernier, qui a vu les Réunionnais rejeter massivement, à près de 60%, le projet de Traité constitutionnel rédigé sous la direction de Valéry Giscard D’Estaing.
"C’est une mobilisation sans précédent des agriculteurs réunionnais pour un scrutin européen", affirme Jean-Yves Minatchy, qui s’appuie sur les chiffres de participation des communes et des cantons ruraux. "La participation a doublé", précise-t-il.
Autre enseignement : les appels au “oui” de la FDSEA et de la Chambre d’agriculture n’ont pas été suivis. Rappelant que la CGPER n’avait pas donné de consigne de vote, Jean-Yves Minatchy a noté que grâce au pluralisme des médias, les agriculteurs ont pu s’informer sur le texte. Il constate aussi que les arguments des partisans du “oui” pour faire passer le traité n’ont pas été suivis dans le monde agricole : "la donne n’est plus la même, nous ne sommes plus dans les années 60", poursuit le dirigeant syndical.
Pour Jean-Yves Minatchy, un élément concernait particulièrement le monde agricole : la disparition des "mesures spécifiques" dans le paragraphe du texte proposé concernant les régions ultra-périphériques.
La disparition de ce terme qui offre à notre agriculture une protection juridique, surtout dans le contexte de l’élargissement de l’Union européenne alors que le budget alloué aux régions reste constant, "pose un problème pour l’avenir des petits et moyens planteurs". Comment résister à la mondialisation des marchés sans mesures spécifiques en effet.
En conclusion, Jean-Yves Minatchy voit plusieurs éléments positifs à la dernière campagne électorale : "c’est la première fois que l’on parle autant du monde agricole, c’est la première fois que la participation double dans le monde agricole". Quant au résultat, il est sans précédent, avec des pointes à plus de 60% pour le “non” dans des communes rurales, comme par exemple à Bras-Panon, souligne le responsable syndical.


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