Agriculture

Les planteurs réunionnais : prochaine cible de la mondialisation libérale ?

Projet d’implantation d’une raffinerie de sucre brésilien financée par des Suédois

3 juin 2003

Dimanche lors d’une rencontre avec la presse, la CGPER a évoqué les graves conséquences de la mondialisation libérale pour les planteurs à La Réunion. Elle a cité un exemple précis : le projet de construction d’une raffinerie suédoise qui importera 700.000 tonnes de sucre brésilien dans notre pays. Brutalement, La Réunion deviendrait alors un pays importateur de sucre. Quel avenir pour les milliers de planteurs ?

Au cours d’une conférence de presse à la mairie de Sainte-Suzanne devant une cinquantaine de planteurs du Nord/Est, la CGPER est intervenue dimanche sur le projet d’implantation d’une raffinerie par des Suédois et qui importeront 700.000 tonnes de sucre de canne du Brésil.
Ayant appris cette information, la CGPER a contacté la Direction de l’agriculture et de la forêt (DAF) qui a confirmé l’existence d’un tel projet, avancé à 70%. Après deux tentatives infructueuses, l’implantation de la raffinerie est en voie de recevoir les autorisations nécessaires, annonce la CGPER.
Les syndicalistes regrettent « que ce projet de grandes ampleur soient instruit dans la confidentialité » : « Il est du devoir des autorités d’informer les planteurs sur ce projet et d’apporter les éclaircissements légitimes ».
Selon la CGPER, si une telle installation venait à être construite, La Réunion « dont la principale exportation reste le sucre de canne risque de devenir un département importateur ». Et de préciser : « on parle de développement économique de l’île et tout le monde s’accorde à dire qu’il faut que La Réunion inverse sa balance commerciale ».

Quel avenir pour la filière ?

Si le projet des Suédois venait à se concrétiser, « c’est un tournant historique pour la filière canne et c’est une page de l’Histoire qui risque de se tourner », estime la CGPER qui rappelle « le désengagement des usiniers avec l’installation de Quartier français en Tanzanie où il prévoit de produire à terme 100.000 tonnes de sucre (50% de la production réunionnaise), et à Madagascar où le groupe possède 4 usines sur 5 ». Les raisons : le coût inférieur de la main d’œuvre et les facilités de ces pays à vendre leur produits sur le marché européen en 2007 grâce à l’initiative "tout sauf les armes". « Les planteurs se demandent quel sera l’avenir de la filière canne ? », alerte la CGPER.
Ce projet de raffinerie montre que La Réunion est frappée de plein fouet par la mondialisation et le libre échange, poursuit le syndicat d’agriculteurs, « où des investisseurs européens important du sucre des pays où le coût de main d’œuvre est nulle pour les transformer et les écouler sur le marché européen en bénéficiant des aides de la France : LOOM, défiscalisation, zone franche, exonérations charges sociales, loi-programme ». Et de préciser que « ce projet, c’est la porte ouverte à d’autres pays producteurs de sucre comme le Brésil, l’Australie ou encore l’Inde ».

Loi-programme : « coquille vide »

La CGPER rappelle qu’au cours du colloque sur la canne en septembre dernier, elle avait rappelé la menace de ces pays qui ont des coûts de production dérisoires et qui peuvent ouvrir leurs propres négociations : « à l’époque les usiniers qualifiaient les propos de la CGPER pessimistes et des responsables syndicaux disaient que la CGPER jouaient à faire peur les agriculteurs », rappelle l’organisation syndicale.
Elle demande au gouvernement de tenir compte des enjeux européens et mondiaux à travers la réforme de la PAC, la mondialisation, afin d’éviter une diminution des aides en faveur des agriculteurs. « La loi-programme était l’occasion de consolider l’agriculture réunionnaise et les propositions de la CGPER aurait permis de faire face à ces dangers », regrette la confédération, « mais force est de constater que la loi-programme est une coquille vide pour le secteur agricole ». Pourtant, la CGPER indique que lors de ces 20 dernières années, les planteurs ont fait d’importants efforts pour moderniser leur outil de travail.
« Ce projet est un défi à La Réunion et l’heure n’est plus aux grands discours et aux grandes déclarations mais aux actes », note la CGPER qui conclut en précisant qu’elle « est prêt à débattre avec l’ensemble des partenaires sur l’avenir de la canne »
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