Témoignage

Nathalie Dompy : les planteurs en lutte pour survivre

4 juillet 2006

Hier matin sur KOI, Nathalie Dompy a donné son témoignage de planteur sur la convention canne. Voici son intervention.

"Si je vous appelle, c’est pour vous exprimer mon désarroi le plus total. Je ne suis pas amateur de foot, c’est vrai je suis satisfaite de l’équipe de France.
Elle gagne et elle a gagné, étant de nationalité française, c’est le plus normal d’être satisfait. Lorsque j’écoute les informations depuis samedi soir, on ne parle que de cela.
Tout ça c’est joli, mais nous Réunionnais, y rempli pa nout ventr, comme dit créole.
Mais aujourd’hui, lundi, et toute la semaine on entendra que ça. Je ne suis pas contre.
Mais, il y a d’autres préoccupations graves.
Exemple : le cas des planteurs.
Je suis planteur de cannes à Saint-Leu, je me présente, je suis Nathalie Dompy.
Aujourd’hui le problème est si grave qu’il ne devrait pas secouer non seulement le monde des planteurs, mais aussi la population réunionnaise.
On a “Témoignages”, on a la radio KOI et le PCR qui expriment cette solidarité envers le monde agricole.

"Bataille pour subvenir aux besoins de nos familles"

Le PCR, en conférence de presse, a, depuis toujours, demandé un audit sur tous les sous-produits dérivés de la canne.
Pourquoi l’usinier refuse-t-il cet audit ?
Pourquoi ne répond-il pas à la demande des syndicalistes, surtout la CGPER qui depuis toujours mène le combat en notre faveur ?
Sans faire de publicité, mais l’action est visible.
Surtout lorsque, comme à Saint-Leu, on voit que la canne va du battant lames au sommet des montagnes.
Qui d’autre en parle ? Personne, même pas le premier magistrat de cette ville. Il oublie qu’il est le fils d’un petit propriétaire, qui a été dans les premiers touchés par la crise du géranium, et la montée en flèche du chômage à l’époque.
Ceux qui n’en parlent pas, ils savent très bien ce que représente demain la mort de la filière canne, la mort de ces agriculteurs.
Et alors que des solutions sont là pour sauver non seulement la filière, mais tous les métiers indirects qui en découlent grâce à notre travail, nous, planteurs, nous sommes en train de livrer bataille pour pouvoir vivre, pour pouvoir subvenir aux besoins de nos familles.
Je ne sais pas si les personnes qui m’écoutent ont des planteurs dans leur famille, s’ils savent comment sont payés les planteurs.
À l’heure d’aujourd’hui, l’usine de Bois Rouge doit être déjà en fonction et si je prends le cas de l’usine du Gol, l’année dernière elle a ouvert ses portes le 7 juillet.
Samedi 1er juillet a eu lieu la 7ème rencontre entre l’État, la Chambre d’Agriculture, les planteurs et les usiniers : l’accord n’a pas encore été conclu.

De 20.000 planteurs à 3.600

Zot i voi aujourd’hui, dans quel état d’esprit, nous planteurs nou lé.
Et là même si un accord était conclu, la plupart de nos chemins agricoles sont encore dans un état pitoyable, désastreux.
Alors, je dois dire que la moitié de l’économie réunionnaise repose sur notre dos, sur le dos des agriculteurs.
Nous, planteurs, on ne devrait pas être traités ainsi. En plus, notre métier procure 45% de l’énergie aujourd’hui grâce à la canne.
Je dis et le redis, ce n’est pas seulement une histoire de planteurs mais de tous les Réunionnais. Tout le monde doit être concerné.
Si on regarde le côté négatif, de la disparition des planteurs. Pour cela, personne ne pourra me dire le contraire : de 20.000 planteurs, c’est descendu à 12.000 ensuite 6.000 pour arriver à environ 3.600 à la dernière élection de la commission paritaire.

"La moitié de l’économie réunionnaise"

Je dois dire que ces 3.600 planteurs qui restent détiennent la moitié de l’économie réunionnaise.
Si, ces planteurs-là disparaissent, cette disparition aura de lourdes conséquences pour l’économie de La Réunion.
Pour conclure, si la filière canne disparaît, c’est le patrimoine de La Réunion elle-même qui disparaît. Ce sera pour nous ici, à inscrire dans l’histoire de La Réunion : La Réunion l’île morte.
Voilà, nous monde planteur, comment nous sommes traités et avec tant de mépris".

Nathalie Dompy


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