Echéance 2017 : audition du président du Syndicat du sucre de La Réunion à l’Assemblée nationale —6—

« Nous ne prendrons pas l’engagement de leur acheter des cannes si nous ne sommes pas certains de vendre le sucre »

19 juillet 2014

Dans la dernière partie de son audition le 6 mai dernier devant les députés de la Délégation des Outre-mer, le représentant de Téréos Océan Indien a conclu sur la nécessité d’obtenir des garanties, sinon l’usinier n’achètera plus la canne à sucre produite par les planteurs de La Réunion.

Silo à sucre du Port Ouest. Après 2017, la garantie de vente de tout le sucre n’existera plus. (photo Toniox)

Ce que peut faire le chef d’entreprise, en revanche, c’est optimiser au maximum les outils industriels. C’est ce qu’ont fait les sucreries de La Réunion en termes de qualité, de rendement, de réduction de la consommation énergétique, ce qui nous place parmi les deux ou trois pays les plus performants au monde. Les deux plus grands exportateurs mondiaux, les Brésiliens et les Thaïlandais, viennent chez nous pour voir comment fonctionne notre modèle.
Nous allons essayer d’orienter nos ventes vers les pays les plus éloignés du cœur de l’Europe et, avec l’appui du Gouvernement français, tenter d’exclure les sucres spéciaux, vitaux pour notre économie, des accords à venir. Cela ne devrait pas contrarier les autres pays européens car ils ne sont pas producteurs, mais, précisément, parce que cette exclusion ne protégerait que la France, elle n’intéresse guère nos partenaires de l’Union européenne et il nous est difficile de trouver des soutiens.
Nous allons également essayer de vendre une petite part de ces sucres – entre 5.000 et 10.000 tonnes – sur les marchés du Japon et de la Corée, où nous entrerons en concurrence avec des exportateurs déjà implantés. Mais, une partie des aides européennes qui compensent les handicaps de surcoût étant destinées à accompagner la logistique, je ne suis pas certain que l’Union les maintiendra.

« Besoin d’obtenir des engagements »

Nous allons poursuivre nos efforts, mais, avant de renouveler la convention « Canne » avec les planteurs, nous avons besoin d’obtenir des engagements sur le cadre institutionnel de la filière, notamment sur le montant des aides. Certes, grâce au report de la réforme du POSEI, celui-ci ne connaîtra aucune modification pendant deux ans, mais nous attendons de l’État un cadre réglementaire qui nous permette de dire aux exploitants que nous pourrons leur acheter la canne au même prix que précédemment. Il va de soi que nous ne prendrons pas l’engagement de leur acheter des cannes si nous ne sommes pas certains de vendre le sucre.
Notre devoir d’industriel est de moderniser nos équipements, d’utiliser les aides qui nous sont allouées pour payer la canne, d’engager des actions en faveur des planteurs et d’élever le niveau de notre production. Sur tous ces points, nous avons accompli ce qui nous avait été demandé. Face aux nouvelles modifications introduites par l’Europe, nous faisons entendre notre voix, mais notre sucre pèse 200.000 tonnes sur un marché de 16 millions de tonnes. L’État doit exercer une pression sur l’Europe, car la réponse ne peut venir d’un surcroît de performance de nos productions.

Motifs d’espoir

Il nous reste toutefois un certain nombre d’espoirs. Le premier est que l’Europe se trompe dans ses prévisions, ce qui est déjà arrivé…
Lorsque le sucre entrera sur le marché au coût le plus bas, il nous faudra investir dans la qualité de nos produits. Nous l’avons déjà fait par le passé, ce qui nous a valu d’être les premiers bénéficiaires, à La Réunion, de la norme ISO 22.000 sur la sécurité des denrées alimentaires. C’est un gage de qualité recherché par une partie de nos clients.
Je place également beaucoup d’espoir dans la sélection variétale. Nous essayons de trouver des cannes de plus en plus performantes, en termes de rendement et de résistance au manque d’eau – car le territoire de La Réunion, du fait du changement climatique, connaît de plus en plus de périodes de sécheresse – et nous investissons chaque année 5 millions d’euros en recherche et développement.
Nous agissons sur tous les leviers que nous avons à notre disposition, mais nous n’avons pas la main sur tout.
Cela dit, je reste optimiste pour cette filière qui existe depuis deux siècles et a traversé des étapes difficiles. Nous avons réussi, en 2005, à faire valoir nos arguments de façon logique et cohérente. Nous avons piloté la filière au mieux de ses intérêts, en partenariat avec les pouvoirs publics, européens et nationaux. Nous sommes sûrs qu’il continuera à en être de même, après l’échéance de 2017.

Fin

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