La filière canne et la réforme de l’OCM-sucre

Un besoin de cohésion et d’unité, sur des bases claires

21 juillet 2005

Les dernières escarmouches, sur le front de la bataille engagée pour le maintien de la filière canne-sucre réunionnaise face à la nouvelle donne européenne, ont fait croire à une rupture de l’union patiemment construite entre les différents acteurs de la filière. Erreur d’appréciation pour les uns ? Calculs pour d’autres ?

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L’union entre des acteurs aux intérêts contradictoires n’étant jamais un long fleuve tranquille, les accrocs font partie de la dialectique unitaire. Il faudrait qu’ils aient tous perdu la tête en même temps pour consumer une rupture dans la période qui nous sépare de la décision du Conseil de l’Europe.
Mais ce que les dernières escarmouches ont révélé est essentiel pour la suite de nos rapports avec Bruxelles : elles ont permis de recentrer la défense de la filière autour de ses principaux soutiens, qui sont la masse des petits et moyens planteurs.
Si certains font d’autres plans - comme certains dirigeants de la FDSEA (Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles) l’ont laissé entrevoir lors de leur dernière Assemblée générale - ils font fausse route et devront nécessairement revenir à des positions plus réalistes. À défaut, ils y seront probablement ramenés d’ici l’année prochaine, riche d’échéances décisives avec une nouvelle convention canne et l’entrée en application du nouveau régime sucrier.

Les petits et moyens planteurs jouent un rôle prépondérant

Comme le souligne le courrier récent que des dirigeants planteurs ont envoyé à la commissaire pour l’Agriculture, Mariann Fischer-Boël, "si les petits et moyens planteurs sont amenés à disparaître, ce sera la fermeture des usines sucrières et la suppression de plusieurs milliers d’emplois ...". Et ce n’est pas faire “cavalier seul” - comme l’ont dit ceux qui ont pris ombrage de cette initiative - que de rappeler à une responsable européenne le rôle prépondérant joué par la masse des petits et moyens planteurs dans notre filière. Lors de la dernière campagne, ils ont fourni 80% de la production cannière et leur syndicat majoritaire ne manque jamais de rappeler que, sur les 10 ou 15 dernières années, ce sont ces petits et moyens planteurs qui ont fait progresser le plus leur productivité à l’hectare. On ne peut pas comparer ce qu’apportent individuellement les petits et moyens planteurs avec ce qu’apporte un gros planteur à l’usine. Mais on peut comparer sur cette période, dans chaque catégorie, les efforts faits et les résultats obtenus par les uns et les autres. "Ceux qui disent qu’une exploitation de 6 ou 7 hectares n’est pas viable devraient d’abord donner l’exemple de la productivité", répond Jean-Yves Minatchy, président de la CGPER, aux dirigeants de la FDSEA. Il faut remarquer le relatif isolement de ce syndicat de gros planteurs dans sa position vis-à-vis de la réforme. Tous ceux qui regroupent des petits ou moyens planteurs ont manifesté leur inquiétude et demandé d’une façon ou d’une autre à Bruxelles de tenir compte des réalités du pays.
Une de ces réalités, politique cette fois, est l’importance des investissements réalisés par la filière avec le soutien des subventions européennes. Mardi soir, jour de l’arrivée du ministre François Baroin dans notre île, un dirigeant du syndicat CDJA interpellait ainsi sur RFO les responsables politiques : "Pourquoi avoir fait tous ces investissements pour une culture qui risque de disparaître ?" La question peut être retournée : “Pourquoi laisser disparaître aujourd’hui une culture pour laquelle l’Union européenne soutient nos investissements depuis plusieurs décennies ?”.

Un besoin de bases et d’objectifs clairs

Par ailleurs, ces accrochages entre syndicats ne sont pas nouveaux et on ne voit pas bien pourquoi il faudrait les dramatiser davantage dans la période actuelle.
Il y aura d’autres occasions, d’ici l’année prochaine, pour la confrontation entre des visions divergentes, voire opposées, de l’avenir.
Ce que l’étape récente vient de rappeler est qu’il n’y aura pas d’avenir à la filière sans les petits et moyens planteurs. C’est donc autour d’eux que devrait se consolider la suite de la bataille, dans sa dimension sociale et politique. Et il n’y a aucune raison pour que le seul rappel de cette réalité sociologique suffise à faire éclater l’union construite pour la défense de la filière. Cela veut seulement dire que cette union a besoin, pour se renforcer, de bases et d’objectifs clairs et d’une conduite transparente.
On en saura un peu plus très prochainement, avec le rendu du Mémorandum actualisé.
Le comité de pilotage de la canne a transmis hier le document à tous les partenaires, qui devront y porter leur appréciation définitive et notamment se prononcer sur la proposition d’audit faite par la Région.
Les propositions et remarques seront débattues lors d’une prochaine Commission paritaire de la canne et du sucre.

P. David


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