Réforme du régime sucre européen

Une baisse plus importante du prix ?

14 mai 2005

Le calendrier de la mise en œuvre de la réforme de l’organisation communautaire du sucre se précise : un avant-projet pourrait être connu le 13 juin avant la présentation officielle à la Commission de Bruxelles et au Parlement le 22 juin. L’hypothèse d’une baisse du prix plus forte que les 37% prévus dans le projet présenté le 14 juillet dernier est évoquée. L’accélération et l’amplification de la réforme se feront au nom d’une plus grande compétitivité dont le principe est inscrit dans le Traité constitutionnel.

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Après la décision de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) condamnant le système sucrier européen, Mme Fischer-Boel, commissaire chargée de l’agriculture avait exprimé ses regrets tout en déclarant qu’elle tiendra compte du jugement pour rédiger une nouvelle proposition de réforme. Elle avait précisé que son texte serait prêt le 22 juin prochain.
Selon des informations complémentaires, un avant-projet du plan pourrait être connu dès le 13 juin prochain. Ce jour-là, les chefs de Cabinet de l’Union européenne procéderont à un premier examen des propositions de Mme Fischer-Boel en vue d’aboutir autour du 20 à une proposition finale.
Après la présentation à la Commission et au Parlement, le 22 juin, du nouveau projet, une autre étape sera tout aussi décisive : la réunion du conseil des ministres de l’Agriculture de l’UE du 18 juillet consacrée à un examen de la réforme de l’OCM-Sucre. Une seconde réunion ministérielle est programmée pour septembre.
Mme Fischer-Boel compte ainsi boucler le dossier pour novembre afin de pouvoir procéder si nécessaire à d’ultimes négociations avec l’OMC lors de la réunion de l’organisation en décembre à Hong Kong.

De nombreuses réactions

Depuis la décision de l’OMC, les réactions n’ont pas manqué. Nous avons déjà signalé celle du syndicat des betteraviers français qui craignent une baisse de 30% de leur production, la fermeture de plusieurs usines et la mise au chômage de plus de 10.000 personnes.
Dans un communiqué, la FNSEA se dit inquiète et estime que le revenu des producteurs et l’avenir de la production sont remis en cause. Selon l’organisation syndicale, un pan entier de l’économie agricole se trouve menacé. Elle "ne saurait accepter des mesures qui consisteraient seulement à réduire la production communautaire" et propose la mise en place de limitation d’importations "afin d’éviter au secteur sucre de se retrouver dans la situation du textile".
De leur côté, les pays ACP fournisseurs de sucre à l’UE ont adressé un message aux instances européennes. Ils se disent conscients de la nécessité d’une réforme, mais souhaitent qu’elle soit le plus équitable possible. Ils s’inquiètent d’une radicalisation du projet présenté le 14 juillet dernier. Les propos tenus le 10 mars dernier par Mme Fischer-Boel devant le Parlement européen sont, en ce sens, lourds de menaces. S’adressant aux euros-députés, la commissaire à l’agriculture soulignait le caractère inévitable de la réforme et ajoutait que "la question qui se posait était la suivante : jusqu’où faut-il aller et dans quel délai ?" Elle a expliqué qu’"il fallait faire en sorte que le régime du sucre soit compatible avec la réforme de 2003 de la PAC", de manière à "permettre la restructuration nécessaire de notre secteur du sucre qui garantira la viabilité à long terme du secteur dans l’UE. La production du sucre de l’Union européenne a un avenir devant elle, mais elle doit être fondée sur la compétitivité. C’est pourquoi, il faut accepter que la production sucrière soit concentrée dans les régions présentant des perspectives durables". Elle a surtout expliqué que "la réduction proposée de 33 % du prix et celle de 2,8 millions de tonnes sur les contingents étaient le minimum indispensable à une réforme efficace, l’équilibre du marché et le respect de nos obligations sur le plan international". Elle faisait valoir que "plus nous ferons preuve de négligence maintenant, plus les réformes seront indispensables dans un avenir proche". La commissaire Fischer Boel a affirmé que "la proposition de la CE n’inclura pas la notion de révision à mi-parcours dans deux ou trois ans parce qu’une telle approche ne permettrait pas une perspective à long terme pour les agriculteurs".

Une accélération ?

Des propos de Mme Fischer-Boel, on retient l’idée que la réduction de 33 % envisagée dans le projet de réforme de juillet 2004 comme un objectif apparaît désormais comme un début, une étape initiale. Dans un entretien accordé au journal mauricien “l’Express”, Juan Carlos Rey, chef de la délégation de la Commission européenne à Maurice, n’écarte pas l’idée qu’il faudra aller au-delà des 33% : "ce n’est pas un secret que la modification de la politique agraire demandait une réduction de prix. Nous avons proposé de réduire d’environ 30 % d’une façon volontaire. Maintenant nous devons répondre à nos engagements au niveau de l’OMC. Ce n’est agréable ni pour les pays ACP ni pour nous", déclarait-il. Une accélération de la réforme qui n’est pas appréciée par les pays ACP. Le Mauricien du jeudi 12 mai écrit en effet que dans leur message aux autorités de l’UE "les États ACP dénoncent la décision annoncée par Mme Fischer-Boel au sujet d’une réforme plus radicale avec une réduction du prix garanti de plus de 33 %, soit autour de 43 %".
Ces informations expliquent sans doute le communiqué de Dominique Bussereau, Ministre de l’Agriculture, qui conditionne le soutien de la France "aux futures propositions de la Commission sur la réforme de l’organisation commune du marché du sucre", en particulier, "une baisse des quotas et des prix intérieurs du sucre, qui ne serait pas fondée sur le volontariat" et une baisse des revenus des producteurs. "Nous affirmons aux producteurs français de sucre notre volonté de trouver avec eux les solutions pour préserver les perspectives de production, y compris celle des départements d’Outre-mer", écrivait le ministère, le 10 mai. Il est difficile de ne pas lire dans ce communiqué l’expression d’une inquiétude.

J. M.


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