Les raisons de la fondation de “Témoignages” par le Dr Raymond Vergès - 10 -

Fraude électorale et tueries avec De Villeneuve

17 mai 2004

Après Lucien Gasparin, les graves fraudes électorales de la première moitié du siècle mettent en avant le nom d’Alexis de Villeneuve, à l’époque conseiller municipal de Saint-Benoît : lors des législatives de 1936, ce dernier n’hésite pas à demander au service d’ordre de faire feu sur des partisans de René Payet aux abords d’un des trois bureaux qu’il préside, faisant deux morts et plusieurs blessés graves.

Dans un livre paru aux Éditions des Deux Mondes, Eugène Rousse rappelle les nombreuses exactions commises par Alexis de Villeneuve lors des élections de la première moitié du siècle passé. (photo Imaz Press Réunion)

Si la carrière politique de Lucien Gasparin a duré près de 40 ans, celle d’Alexis de Villeneuve - écourtée par sa tragique disparition le 25 mai 1946 devant le portail de la cure de la cathédrale de Saint-Denis - débute en 1934 pour s’achever en 1946.
Né à Saint-Benoît le 16 mai 1906, Alexis Champierre de Villeneuve fait une entrée remarquée sur la scène politique locale. Il n’a que 28 ans lorsque, marchant dans le sillage de son père, il devient conseiller général de Saint-Benoît. Moins d’un an plus tard, le 5 mai 1935, il est élu au Conseil municipal de Saint-Benoît. Il est alors le 2ème adjoint du maire Ferdinand Auber ; le poste de 1er adjoint étant occupé par René Gangnant.
Lors des législatives du 26 avril 1936 qui opposent dans la 1ère circonscription de l’île Lucien Gasparin à l’usinier du Quartier-Français René Payet, Alexis de Villeneuve préside un des trois bureaux de vote de Saint-Benoît, celui du Bourbier, quartier qui l’a vu naître et où il exerce sa profession de "propriétaire terrien". Le jour du scrutin, il prend toutes dispositions pour que Lucien Gasparin, à qui il apporte son total soutien, recueille le maximum de voix dans son bureau.
La présence d’un grand nombre de partisans de René Payet aux abords de ce bureau lui paraissant intolérable, il n’hésite pas à demander au service d’ordre de faire feu sur ces derniers. Le gendarme Pénin, qui a la responsabilité du maintien de l’ordre, exige du président de Villeneuve une réquisition que celui-ci refuse de signer.
Pendant qu’une vive altercation oppose les deux hommes, un autre gendarme tire sur les électeurs. Plusieurs coups de feu font deux morts et plusieurs blessés graves, "tous touchés à la partie supérieure du corps". Des morts dont le président du bureau de vote Bourbier ne s’est pas soucié, puisque le capitaine de gendarmerie Vérines - qui devait mourir en héros lors de la Seconde Guerre mondiale - écrit dans un rapport : "...Deux morts gisaient sur le bord de la route du Bourbier".
Malgré le refus des électeurs de participer au scrutin en signe de protestation, le président de Villeneuve n’éprouve aucune gêne à attribuer 744 voix à Gasparin et 2 voix à René Payet.

(à suivre)

Eugène Rousse

Raymond VergèsLéon de Lépervanche

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