
Salim Lamrani s’entretient avec le Professeur Bruno Guigue sur la Chine-3
2 juillet, parLa troisième et dernière partie de la causerie sur la Chine réalisée avec Bruno Guigue à l’UNR : https://www.youtube.com/watch?v=GkqvlqFEuOM&t=
Un article de Jean-François Reverzy pour les 60 ans de “Témoignages”
8 juin 2004
L’Union européenne est là : elle a ses instances dirigeantes - le Conseil, la Commission et le Parlement - et bientôt sa Constitution. Voilà un nouveau monde, plein de promesses, bien loin de la sombre réalité du début des années 40, celles qui virent la naissance de “Témoignages” et qui contenaient également plein d’espoir.
Dans le mythe grec qui lui donne son nom, Europe, la fille aux grands yeux, fille du roi de Phénicie, fut aimée de Zeus. Celui-ci se transforma en taureau blanc pour la séduire et s’unit à elle, dans l’île de Crète. Europe était une fille de l’Asie, venue se fixer dans une île. Qui de nos jours incarne Zeus ? Et quelle île unira l’Europe au monde ?
Nous avons commencé notre voyage dans le temps en 1944, pendant la guerre, avec ses dizaines de millions de morts, ses génocides, ses martyrs et ses témoins... Nous sommes parvenus soixante ans plus tard en Europe, une institution certes encore imparfaite, mais qui aura au moins l’apparence de dépasser les nationalismes au nom d’une supposée et apparente démocratie.
À l’heure des élections européennes, comment ne pas évoquer ce mythe actuel et ses réalités ?
Une parenthèse électorale : quel que soit notre transfert sur Paul Vergès - amour, indifférence ou haine -, comment ne pas constater qu’il est de toute évidence le seul candidat d’Outre-mer à présenter une quelconque compétence dans le rôle de député européen des DOM-TOM ?
En soixante ans, nous avons pu sortir de la division du monde née dès avant la guerre. De cette schizophrénie qui fut la maladie du 20ème siècle. Quatre mondes s’affrontaient : l’utopie national-socialiste et fasciste en Europe et en Asie ; les peuples d’Europe, vaincus mais qui ne l’acceptaient pas ; le colonialisme américain ; enfin, l’utopie stalinienne, soit celle d’un communisme qui avait perdu sa légitimité. La guerre froide et ses fronts - les guerres coloniales en particulier - s’ensuivirent, jusqu’aux incertitudes du 21ème siècle.
Quel progrès ! En effet, comme bien d’autres Français, je suis issu de familles qui ont transmis de génération en génération la haine du peuple allemand et le culte des guerres fratricides : les “Boches”, disait-on chez moi, avaient ruiné les deux branches de ma famille maternelle ; en Picardie en 1914, en Lorraine et en Alsace en 1870 et même avant. J’ai été élevé à la lecture des images de Hansi appelant à la reconquête des belles provinces de l’Est, exaltant le courage des soldats français, ridiculisant les soldats au casque à pointe et le physique des occupants d’outre-Rhin.
Au moment de la mobilisation de 1914, mon grand-père paternel, le capitaine Abel Reverzy, grand chasseur dans son Bourbonnais natal, écrivait à son oncle l’abbé Jean Reverzy qui l’avait élevé : "Taïaut...! la chasse est ouverte et le gibier est abondant". C’est le chasseur qui tomba le premier, un an plus tard en Argonne, à l’âge de 33 ans...
D’autres parmi mes proches connurent à cette époque un destin tragique, marqué de malédiction et de mort. Ce fut le cas de ma grande tante Adélaïde qui - comme l’héroïne d’”Hiroshima mon amour” une guerre plus tard - eut le malheur d’aimer un médecin militaire allemand pendant l’occupation de la propriété familiale en 1915. Elle rencontra ensuite cette cruauté implacable, qui est la logique de bien des familles bourgeoises : elle fut exclue, reléguée, dépossédée de l’enfant qui était née de ses amours “coupables” et termina ses jours misérablement durant la seconde guerre mondiale...
L’un de mes oncles, officier lui aussi, à force de baigner dans l’anti-germanisme, résolut son œdipe national en trahissant. Il fut condamné à mort. Dans ma famille, même son nom ne devait plus jamais être prononcé. J’ai admiré et je vénère la mémoire de ce proscrit, de ce condamné. Jean Genet, qui l’admirait, lui rend hommage dans plusieurs de ses ouvrages : “Le journal du voleur” et “Notre dame des fleurs”.
Si j’ai jamais chéri un drapeau rouge, c’est bien la chemise couverte de taches de sang de ce soldat inconnu, que l’on dissimulait dans un placard de la maison et que je découvris un jour avec les minutes du procès. Ce fut celui des miens qui le premier vint à La Réunion, dans les années 30, car jeune enseigne de vaisseau, il faisait un grand voyage avec sa promotion. Embarqué, il savait déjà qu’il avait été découvert et ce qui l’attendait au retour à Brest. J’imagine quelles souffrances et quelle angoisse furent les siennes lors de ce voyage et quand il descendit sur la terre réunionnaise, au port de La Pointe des Galets...
J’eus la chance de connaître, du côté de ma grand-mère maternelle, une ouverture plus lumineuse : anglo-saxonne et océanique. Des pays comme l’Irlande, le Royaume-Uni et le Commonwealth ainsi que la Norvège, où se retrouvait tout un réseau familial irlandais, firent partie de mon espace psychique imaginaire. De même que l’océan que chérissait mon père : Atlantique ou Pacifique, et les îles des mers du Sud.
Le sentiment national ne m’entraîna jamais dans ses leurres. Mais davantage celui d’une citoyenneté européenne ou supra-européenne, tout en étant breton, lorrain ou alsacien, irlandais ou gallois... Il faudrait relire “La cause des peuples”, le roman de cet oublié qui fut célèbre il y a trente ans et qui défendait la même idée : Jean Hedern-Allier.
J’aime aussi contempler la montée de l’Irlande. Il y a soixante ans, c’était l’un des pays les plus pauvres d’Europe, déchiré par la guerre civile, arriéré. Il est devenu, comme le Portugal, l’un des phares européens et préside actuellement l’Union européenne...
Au-delà de l’hommage légitime rendu aux résistants et autres combattants de la liberté en lutte contre le nazisme et le fascisme lors de la seconde guerre mondiale, la commémoration du débarquement allié en Normandie le 6 juin 1944 apparaît comme une mascarade. Celle-ci occulte une opération politico-militaire, dont le bénéfice fut la colonisation américaine de la France et de l’Europe.
Ce débarquement-libération fut aussi une boucherie, où périrent des dizaines de milliers de personnes, avant que le plan Marshall n’asservisse les économies européennes. Bush et Poutine, les bouchers du temps présent, se saisissent du prétexte et se congratulent sous les yeux complices d’un Chirac ou d’un Schröder dans une mythologie douteuse qui sent le simulacre.
Comme on l’a dit plus haut, il y eut certes le combat contre le totalitarisme nazi. Mais un nouveau totalitarisme, plus sournois, plus habile, n’a-t-il pas pris le visage souriant de ces chefs d’État défenseurs de l’économie de marché ou du capitalisme d’État, revu et corrigé ?
Après tout, le premier rêve européen du 20ème siècle fut celui de Mussolini et de Hitler : il suffit de relire la prose de leurs disciples de la collaboration, comme Lucien Rebatet et Drieu par exemple ; un modèle impérial, raciste, pseudo socialiste, au service d’une nation, d’une culture. L’Europe d’aujourd’hui, bancaire plus que populaire, ne serait-elle pas contaminée inconsciemment par ce modèle ? Et ces vieux taureaux blancs tachés de sang se prendraient-ils pour Zeus ? N’oublions pas non plus que cette Europe là fut celle qui bombarda Belgrade et agressa sauvagement une autre nation européenne, la Serbie, il y a cinq ans à peine...
C’est dire que construire une autre Europe, une Union européenne qui accorde une place privilégiée à ses périphéries plus qu’à ses centres, constitue une œuvre politique fondamentale, porteuse de potentiels créateurs et de transformation de l’espace psychique collectif.
En 1944, la France ne fut pas libérée par l’Amérique mais par ses résistants et par les forces vives venues d’outre-mer. Europe, la fille aux grands yeux, serait-elle fille de la Lémurie ? Ne serait-elle donc pas réunionnaise ?
Jean-François Reverzy
La troisième et dernière partie de la causerie sur la Chine réalisée avec Bruno Guigue à l’UNR : https://www.youtube.com/watch?v=GkqvlqFEuOM&t=
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