Jumelage entre la ville de Sainte-Suzanne et la ville malgache de Moramanga

« Ce sont des frères avec qui il faut tisser des liens »

20 octobre 2006

La semaine dernière, une délégation de la ville de Sainte-Suzanne se rendait dans la ville de Moramanga, jumelée avec la ville réunionnaise. Restitution de parcours et de projets à monter. Prochainement, à l’occasion des festivités du 20 décembre, des Malgaches de Moramanga seront accueillis au beau Pays.

C’est inopinément que je rencontrais, à Tananarive, l’adjointe au maire de Sainte-Suzanne, Angélina Imira, accompagnée par un technicien de la ville, Pierre Agon. C’était sur l’avenue de l’Indépendance. Plus précisément à Analakely, littéralement “petite forêt”. Ils revenaient de la ville de Moramanga, située sur la province de Tamatave. Pas pour vacances. Cette petite délégation préparait la venue de représentants malgaches, élus et artistes, pour la manifestation sainte-suzannoise du 20 décembre.
Pour l’élue Angélina Imira, il importe de « conforter les liens entre les deux villes jumelées ». Une délégation sainte-suzannoise, constituée d’élus et d’associations, doit d’ailleurs se rendre à Moramanga entre mai et juin 2007, pour célébrer le 60ème anniversaire de la révolte de Moramanga, un événement en lien avec la marche vers l’indépendance malgache. C’est de cette ville, dit-on, que les événements débutèrent, en mars 1947. Les deux villes jumelées sont des acteurs de l’histoire, à Madagascar et à La Réunion. Les deux villes en ont d’ailleurs conscience. Et reprenons le message exprimé par le Maire et Conseiller général de Sainte-Suzanne, Maurice Gironcel, qui notait l’importance de nourrir la coopération entre villes de la zone océan Indien : « Ce sont des frères avec qui il faut tisser des liens ». D’ailleurs, les magazines de la ville de Sainte-Suzanne, “Vanille” et “Kalbanon”, m’assure-t-on, ne manqueront pas de faire l’éloge de la ville de Moramanga.

Agir simplement

Les réalisations entre la ville de Sainte-Suzanne et celle de Moramanga sont diverses, allant de l’échange culturel à l’aide humanitaire. Encore faut-il privilégier les rencontres sportives. « C’est plus un échange humain. Après, nous envisageons l’économique », précise Angélina Imira. Depuis 2004, plusieurs actions ont consolidé les liens entre les deux villes jumelées. Les agriculteurs sainte-suzannois, en visite à Moramanga, ont initié un programme de dératisation, ponctué par des séances de formation pour la création de pièges. La ville de Sainte-Suzanne a fait des gestes solidaires, par l’attribution de lits, de matelas, de médicaments, etc... pour l’hôpital de la ville malgache. Elle a également octroyé des citernes à la ville, à sa bonne gestion, pour l’attribution d’eau potable. Et pour poursuivre cette synergie coopérante, un technicien de la ville, Pierre Agon, définissait sur le terrain malgache les perspectives de projets d’urbanisme sur la ville de Moramanga, notamment en termes de voieries et d’irrigation.
Par ailleurs, la jeunesse sainte-suzannoise sera sollicitée pour une contribution en faveur de la lutte contre le SIDA. La coopération peut-être sanitaire. Mais aussi culturelle. Peut-on seulement envisager que les artistes réunionnais s’inspirent de l’oralité malgache pour leurs œuvres, qu’ils disent traditionnelles ?

Une vision de l’économique

Le jumelage à caractère “seulement” économique néglige souvent la part impérieuse de la culture de la ville partenaire. La commune de Sainte-Suzanne a décidé de faire le chemin inverse. Partir du culturel et de l’historique pour établir un partenariat efficace et pérenne. Et l’élue de dire : « Avec très peu de moyens, on peut faire de la coopération, pour un mieux-vivre. Moi, ce qui m’intéresse, c’est de privilégier le rapport humain ». Elle envisage de soutenir le voyage de la jeunesse sainte-suzannoise à Madagascar, « pour les rappeler à leur histoire, pour qu’ils se construisent eux-mêmes », insiste Angélina Imira. Tout en notant que plusieurs jeunes sainte-suzannois aspirent à devenir travailleurs du progrès.
Pourtant, les modalités de sélection feront qu’ils soient privés de plusieurs opportunités, de découverte, d’enrichissement culturel, d’emploi, de coopération régionale. La raison : qualifiés, mais dépourvus de diplômes. Peut-être que la revue du dispositif pourrait ouvrir la voie à des vocations humanitaires et d’entraide scientifique ! Sûrement que cela aiderait de nombreux jeunes demandeurs d’emploi réunionnais, en quête de découverte, à travailler, même pour maigre pitance. Reste que, chemin inverse : les Malgaches sont confrontés aux rouages corrodés de l’administration française. Quand il s’agit d’obtention d’un visa français, croyez-moi, la file est longue et les admis sont peu nombreux. Comment, encore, faire comprendre qu’un Malgache qui entre sur le territoire réunionnais ne vient pas forcément pour cirer le trottoir et rouler le sac ? Plusieurs sont des artistes talentueux, d’autres des esprits avisés en Mathématiques, en Physique, en Archéologie, et j’en passe. Faut-il encore compter la marmaille naissante en qui il faut espérer. « Il faut trouver des solutions pour que l’échange puisse être réel », déclare Angélina Imira. C’est peu dire, surtout quand on sait la fermeté actuelle du gouvernement. Alors oui, développons le jumelage entre villes réunionnaise et malgache, et à bon entendeur, installons les conditions les plus favorables pour accueillir nos frères de la zone océan Indien.

W.T.


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