Anticipons les accords de partenariat économique pour préparer l’échéance 2013

Construisons une stratégie de co-développement pour les 20 ans à venir

9 avril 2008, par Manuel Marchal

Le séjour de Paul Vergès à Maurice à l’invitation de la Chambre de Commerce de Maurice et le Conseil des ministres de la Commission de l’Océan Indien les 27 et 28 mars derniers sont deux événements qui balisent le chemin vers l’élaboration d’une stratégie régionale de co-développement. Dans un monde marqué par les profondes mutations liées à l’accroissement démographique, la mondialisation libérale des échanges et le réchauffement climatique, les pays de notre région réfléchissent à des solutions pour s’inscrire activement dans ces changements. Les transports maritimes et aériens sont deux axes à l’ordre du jour.

Paul Vergès, Président de la Région, Catherine Gaud et Wilfrid Bertile, vice-présidents de la collectivité, ont présenté hier à la presse le bilan et les perspectives du séjour du président de la Région à Maurice et du Conseil des ministres de la COI. Face à l’ouverture des marchés impulsée par les orientations libérales de l’Organisation mondiale du Commerce, les pays de la région réfléchissent à mettre en place une stratégie de co-développement.
Il s’agit de rechercher les complémentarités entre les membres de la COI, de définir des axes stratégiques et de faire des propositions les 12 et 13 juin prochains lors d’une rencontre à la Région de représentants des Comores, de Maurice, de Madagascar et des Seychelles. Elles seront présentées à la France qui présidera à partir de juillet prochain l’Union européenne pendant six mois. Au terme de cette période, la France présidera la Commission de l’Océan Indien pour l’année 2009. Cette présidence sera marquée par le Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de la COI qui se tient tous les quatre ans.
Autrement dit, l’heure est à l’action et à l’anticipation pour proposer une solution régionale intégrant La Réunion pour répondre aux défis de la mondialisation libérale. Les questions qui ont été discutées lors du dernier Conseil des ministres de la COI sont celle de la création d’une compagnie régionale maritime, du désenclavement des îles de la région.

L’échéance 2013

La mondialisation des échanges orientée par l’Organisation mondiale du commerce vise à faire du monde une vaste zone de libre échange. Cela explique pourquoi les accords préférentiels qui régissaient les relations commerciales entre l’Union européenne et les pays de la région ne sont plus conformes aux règles de l’OMC. La Commission européenne négocie donc au nom des 27 pays de l’Union de nouveaux accords : ce sont les APE. Ils doivent être signé au plus tard le 31 décembre 2008, soit dans huit mois.
D’ores et déjà, les accords intermédiaires préfigurant les APE s’appliquent. Ils portent en eux la création d’une vaste zone de libre-échange entre La Réunion, en tant que région de l’Union européenne, et les pays voisins, en tant que pays ACP.
L’ouverture des marchés aura d’importantes conséquences au moment où La Réunion va connaître plusieurs événements clé. En 2013, ce sont les nouveaux programmes européens. Du fait de l’élargissement de l’Union vers des pays européens dont le PIB moyen est largement inférieur à la moyenne communautaire, les probabilités sont grandes pour que les fonds structurels européens soient moins élevés que lors de la programmation 2007-2013. En 2013, c’est la fin du régime actuel de l’Octroi de mer. Or, cette mesure fiscale est considérée comme entrant en contradiction avec les règles de l’OMC. L’Europe est-elle prête à faire des concessions commerciales pour préserver l’existence d’une spécificité qui ne concerne que quatre départements d’Outre-mer ?
L’autre échéance de 2013, ce sont les négociations du nouveau régime sucrier. Le précédent du Protocole sucre concernant Maurice est instructif. L’île soeur avait droit à un quota de 550.000 tonnes acheté à prix garanti, au-dessus du cours mondial, par l’Europe. Cette dernière a dénoncé ce Protocole l’an passé. Il n’existera plus en 2009 et l’objectif clairement affiché est de faire du prix du marché le prix de référence pour le sucre mauricien au bout de quelques années de transition. Ce précédent ne préfigure-t-il pas le prochain règlement sucrier européen concernant La Réunion ?

Anticiper

A partir de ces différents rendez-vous, il est essentiel d’anticiper pour être préparer à cette ouverture des marchés. Face à ce tournant de l’histoire économique et sociale, c’est une période décisive qui s’ouvre, souligne Paul Vergès. C’est le moment de faire avancer les propositions qui peuvent permettre à La Réunion d’apporter sa contribution au co-développement de la région. C’est notamment la formation qui est au coeur du développement du pays.
Car à La Réunion, des gisements d’emplois sont identifiés. C’est le cas des énergies renouvelables, un secteur capable de créer 25.000 emplois rien que dans le solaire. Ce sont aussi les NTIC, avec 5.000 emplois comme point de départ. Ce sont les infrastructures, avec l’objectif de maintenir 25.000 emplois grâce à une politique de grands travaux. Pour que des Réunionnais puissent occuper ces emplois à créer, il est indispensable de renforcer et d’adapter l’outil de formation aux objectifs du développement. Cet outil peut être mis au service du co-développement. Car comme La Réunion, les pays de la région auront besoin d’infrastructures, de produire de l’énergie sans importer des hydrocarbures ou de renforcer leurs filières TIC.
Paul Vergès rappelle qu’il est important que cette stratégie soit proposée au cours des deux années à venir. Car c’est avec les peuples de la région que notre pays pourra relever le défi de son intégration dans le monde du 21ème siècle.

Manuel Marchal


Maurice se prépare au tournant

Conférencier d’honneur lors du dîner annuel de la Chambre de commerce de Maurice, Paul Vergès était également invité à l’ouverture de la session parlementaire de l’Assemblée législative mauricienne. Il a également été reçu par Navim Rangoolam, Premier ministre mauricien, à la demande de ce dernier.
Ces échanges ont permis de constater que les Mauriciens sont conscients de la fin d’une période et de l’engagement dans un monde nouveau. Cela est dû notamment au démantèlement de l’Accord multifibre qui concerne le textile, et par la modification du Protocole sucrier.
Pour compenser la baisse du prix du sucre, l’Union européenne a versé des crédits pour la restructuration de la filière canne. Cela permet à Maurice d’anticiper sur le rendez-vous avec le prix du marché mondial pour le sucre.
Dans ce contexte de réforme, l’expérience réunionnaise des énergies renouvelables suscite l’intérêt des Mauriciens. L’expert Joël de Rosnay a été nommé pour donner une impulsion à ce secteur, et une délégation mauricienne se rendra prochainement à La Réunion pour amplifier les échanges.


Nous sommes à l’écart des nouvelles routes maritimes de la mondialisation

Créons une compagnie régionale maritime

Des porte-containers géants de la taille des plus gros porte-avions américains, capables de traiter en quelques heures plus de 10.000 containers : c’est le nouveau moyen de transport des marchandises qu’impose la mondialisation des échanges. Mais dans chaque océan, il n’y a que quelques ports qui peuvent accueillir ce type de navire. Les pays de la Commission de l’Océan Indien se trouvent à l’écart des axes de circulation de ces porte-containers géants. Dans un proche avenir, il sera nécessaire d’aller récupérer dans ces ports les marchandises que nous devons importer. Il en sera de même pour les produits d’exportation.
Cela imposera donc de disposer de la maîtrise de navires dont la fonction sera de relier ces grands ports aux îles de l’océan Indien. C’est l’objectif visé par la création d’une compagnie maritime régionale, sujet à l’ordre du jour du dernier Conseil des ministres de la COI les 27 et 28 mars derniers. Aux côtés du nouveau secrétaire d’Etat à la coopération, Paul Vergès, Catherine Gaud et Wilfrid Bertile faisaient partie de la délégation France/Réunion.
Cet exemple cité hier par Paul Vergès illustre le tournant que sont en train de connaître La Réunion et les pays de la région.


Le modèle actuel provoque la hausse des prix

Elevage : imaginons une filière régionale de production d’aliments

Les aliments pour bétail sont produits à partir de maïs et de soja cultivés en Amérique du Sud. Or, avec l’augmentation du prix des engrais, donc des coûts de production, du prix du fret, donc des coûts de transport, le prix de ses aliments ne pourra qu’augmenter si cette filière de production n’est pas adaptée à des réalités telles que la hausse des prix du pétrole et la pénurie des matières premières.
Paul Vergès note que dans le cadre du co-développement, il sera possible d’identifier un pays de la COI capable de produire le maïs et le soja nécessaire à l’alimentation des élevages réunionnais. Cela réduira le coût du transport. Par conséquent, cela diminuera le prix des aliments d’élevage. Cet exemple explique comment le co-développement peut permettre de lutter contre la vie chère en trouvant une solution originale, remettant en cause une structure de production inadaptée aux évolutions du monde.

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