Visite officielle du président malgache et d’une forte délégation économique

Grands espaces cherchent partenaires... ou les voies d’une complémentarité

15 avril 2005

Une importante délégation malgache entourant le président Marc Ravalomanana, dont c’est la deuxième visite officielle à La Réunion en 21 mois, est arrivée hier en fin de matinée à la Région Réunion. Elle avait été accueillie à sa descente d’avion par la ministre de l’Outre-mer du gouvernement Raffarin, Brigitte Girardin.

(Pages 8 et 9)

Cette seconde visite officielle à La Réunion du président malgache Marc Ravalomanana - déjà venu en juillet 2003 - s’est faite à l’invitation du président Jacques Chirac, qui a lui-même effectué un voyage officiel à Madagascar en juillet 2004, après avoir reçu deux fois le président malgache à Paris en l’espace de huit mois (septembre 2002-avril 2003).
Ces échanges témoignent du regain de vigueur que, de part et d’autre, les partenaires veulent donner à la coopération franco-malgache d’une part et aux liens renoués entre deux îles historiquement unies par une "histoire commune faite de souffrances, de luttes pour la liberté, et d’un destin longtemps partagé", a rappelé le président de Région, Paul Vergès, en recevant la délégation.

Caractère historique

La visite de deux jours, au programme intensif, revêt un caractère historique par la qualité et le nombre des membres de la délégation : une vingtaine de responsables politiques - dont les ministres des Affaires Étrangères, de la Défense nationale, de l’Agriculture et de l’Industrialisation et les chefs des régions d’Anosy, de Vakinankaratra, de Diana et d’Analanjirofo - et de conseillers techniques, trente-deux acteurs économiques sur les 35 invités, et c’est encore sans compter les membres de la sécurité et les six journalistes des médias malgaches. "Jamais La Réunion n’aura accueilli sur son sol une telle délégation de responsables politiques et d’acteurs économiques", a salué Paul Vergès au début de son allocution de bienvenue.
Cette visite intervient à quelques jours de l’entrée en vigueur de l’accord franco-malgache d’encouragement et de protection réciproque des investissements, signé lors de la visite du président malgache, les 24 et 25 juillet 2003, et aussi à moins de trois mois du sommet des chefs d’État de la Commission de l’océan Indien, à Madagascar.

Puissance émergente

Après avoir évoqué les liens historiques, longtemps puissants puis relâchés, le président de Région a surtout mis l’accent sur les conditions nouvelles permettant d’écrire "une nouvelle page de l’histoire économique entre nos deux îles"...
Dans le contexte de la mondialisation et de ses nouveaux défis, avec une projection démographique qui en fera "dans moins de deux générations (...) le pays le plus peuplé d’Afrique australe et orientale", a poursuivi Paul Vergès, "Madagascar a vocation à devenir une puissance économique émergente".
Le président de la Région a ensuite développé comment "sur de nouvelles bases et dans une vision à long terme", des relations nouvelles de co-développement ont commencé à croiser les potentialités des deux îles : pour un partenariat économique fondé sur nos complémentarités et dans lequel collectivités publiques et acteurs économiques ont chacun leur rôle à jouer.
Après avoir évoqué les exemples d’actions engagées ces deux dernières années pour renouer des liens intenses - dans la formation, la recherche, la production aquacole et sucrière, l’environnement - Paul Vergès a conclu son intervention sur l’évocation de trois dossiers "d’importance stratégique, pour lesquels la volonté politique au niveau intergouvernemental est décisive..." . (voir encadré)

Accords de partenariat économique

La présidente du Conseil général, Nassimah Dindar, est allée de son soutien "à l’amitié franco-malgache", invitant les acteurs présents "à la mettre en œuvre de manière réelle" dans des actions de coopération, comme le Conseil général s’y est lui aussi engagé au travers d’actions pour l’agriculture, la politique sociale et l’éducation. Elle a conclu sa courte intervention en invitant à "trouver une véritable ampleur aux projets existants".
En écho, Éric Magamootoo, président de la CCIR, qui accueille aujourd’hui la délégation à Saint-Pierre, est parti de la réalité des chiffres - à peine 22 millions d’euros d’échanges commerciaux entre les deux îles ("14 millions d’importation, 7 millions à l’exportation") - pour se demander "quels ponts bâtir" ? Il a souligné l’importance des liaisons maritimes et aériennes, et des NTIC pour aborder les préoccupations des entreprises réunionnaises en matière de sécurité économique : sécurité juridique dans les tractations foncières et besoin d’un "espace de médiation pour évacuer les conflits financiers qui peuvent surgir". En concluant avec les Accords de partenariat économique (APE), le président de la Chambre consulaire a souhaité qu’ils permettent d’affirmer nos complémentarités, plutôt que de nous "laisser absorbés par les tendances de la mondialisation".

“Guichet unique”

Venue spécialement de Paris pour accueillir le président malgache et la délégation, la ministre de l’Outre-mer a salué "la politique volontariste de réformes" mise en œuvre depuis trois ans à Madagascar. Ces réformes, auxquelles le président malgache allait lui-même faire longuement écho dans sa réponse, ont porté sur la modernisation de la gestion des finances publiques, l’ouverture aux investissements étrangers, et sous certaines conditions, une garantie d’accès au foncier pour les investisseurs étrangers, ainsi qu’un “guichet unique” pour accueillir toutes les démarches de création d’entreprise.
Ces mesures de “bonne gouvernance” et de décentralisation, rapprochant les pouvoirs publics des citoyens, ont été selon la ministre, à l’origine d’un nouveau contexte économique et social, sur la base duquel peut se développer un nouveau partenariat. Dans cette optique, la ministre a souligné les principaux atouts de La Réunion - son dynamisme économique marqué par une croissance vigoureuse, et des très petites entreprises (TPE) qui marque un intérêt nouveau pour des actions de co-développement et des échanges accrus.

Appel aux entreprises

Le président malgache, quant à lui, venait vérifier que "l’intérêt très fort" qu’il avait senti lors de sa première visite à La Réunion s’était encore accru et que les "gros progrès" accomplis par la Grande Île depuis deux ans allaient permettre de donner un “coup de fouet” aux échanges entre nos îles. Il a évoqué les attentes des Malgaches en matière "d’emploi, énergie, santé, éducation, sécurité et justice" . "Nous avons besoin de tout (capitaux, partenaires...) vous avez besoins de grands espaces... Il est urgent que nous renforcions nos relations, pas seulement officielles mais entre les entreprises, les universités, au plan culturel et citoyen", a-t-il déclaré à l’assemblée. Il est lui aussi parti de la réalité des chiffres - les échanges extérieurs entre les deux pays pèsent moins de 2% ! - pour expliquer les orientations récentes de Madagascar et notamment son ouverture aux investisseurs étrangers (surtout Américains...) et aux structures d’intégration régionale (SADC, COMESA...)
"Ou nous réussirons ensemble ou nous serons entraînés dans des crises sans fin", a-t-il prophétisé. "C’est au monde des entreprises d’ouvrir les chemins", a-t-il ajouté en terminant son allocution aux chefs d’entreprises réunionnais par une exhortation à "doubler le commerce bilatéral" d’ici à la prochaine visite du président malgache dans notre île. Un objectif somme toute bien modeste, à moins que le président malgache n’ait déjà l’intention de revenir l’année prochaine !

P. David



Trois dossiers d’importance stratégique

Le premier dossier crucial évoqué par le président de la Région concerne le raccordement de Madagascar au réseau mondial de communication. "Cela nous semble un enjeu stratégique majeur".
Le second dossier a trait au tourisme, à propos duquel le président de Région a évoqué les liaisons aériennes entre les deux îles, sur un long-courrier vers l’Asie, et "la question récurrente des visas". À la fin de l’année 2004, le gouvernement malgache a réouvert à Saint-Denis un consulat général, confié à Mme Léa Ravololondratavy. Mais les Réunionnais ont beau réclamer "un assouplissement des conditions de délivrance des visas, condition sine qua non pour le développement des échanges économiques et touristiques"... Les encouragements de Brigitte Girardin sont restés muets sur ce point hier.
Enfin, dans le secteur de la pêche, le président de la Région a réaffirmé sa conviction qu’une "grande politique" est possible entre les îles, si elles décident d’unir leurs zones économiques exclusives en se dotant des moyens appropriés (juridiques et logistiques).


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