Colloque sur la mondialisation dans notre région

’Ne pas devenir un consommateur anonyme dans un village global’

11 décembre 2004

Suite et fin hier du colloque consacré à l’océan Indien et à la mondialisation. Un colloque qui a permis de mieux comprendre le phénomène multidimensionnel qu’est la mondialisation, de mieux en comprendre les enjeux, pour ne plus seulement en subir les effets.

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“État des lieux, enjeux et perspectives”, acte 2. Tour à tour, les différents intervenants ont enrichi les débats en abordant des thèmes aussi divers que la mise en place d’une force de la paix en Afrique avec le dispositif “RECAMP”, la problématique de Mayotte, l’intégration ou l’insertion de La Réunion dans son espace ou encore “de la politique de la France dans l’océan Indien à la politique de la France de l’océan indien”.
Des contributions de haute volée, des débats qui ont permis de constater à quel point le sujet est vaste. Un colloque réussi, comme l’ont souligné les différents partenaires à l’origine de cette réflexion.

RECAMP, pour la paix en Afrique

Premier intervenant de la journée, le colonel Rémy Fretille exposait les tenants et aboutissants du dispositif RECAMP (Renforcement de la coopération africaine pour le maintien de la paix). RECAMP, explique l’officier supérieur, c’est une autre vision de la politique africaine de la France qui, certes, ne vient pas se substituer aux accords de défense conclus entre l’ex-puissance coloniale et ses anciennes colonies, mais qui a pour but de mettre en place une force d’intervention au service du maintien de la paix.
Parce qu’une intervention militaire, souligne le colonel Fretille "n’est qu’un moyen d’urgence face à la crise". Avec RECAMP, il ne s’agit plus d’intervenir directement, mais d’agir, sous l’égide de l’ONU et en partenariat avec les pays africains qui contribuent humainement et matériellement à cette force dont ils sont les acteurs essentiels, au service de la paix...
De l’Afrique, la prévention ou le règlement des conflits, Mickaël Roux, du ministère français des Affaires Étrangères, fait passer l’assistance à une toute autre problématique : “Les solutions face aux trafics illicites”.
Car si l’on parle de la mondialisation de l’économie, des échanges, de l’information et de la communication, la criminalité s’est elle aussi mondialisée. Et si, comme le soulignait au premier jour du colloque Serge Svizzero, président de l’université, "la mondialisation est multidimensionnelle", face au danger d’une criminalité transnationale, le salut ne peut venir lui aussi que d’une action multilatérale, incluant dans un même combat forces de police, douanes, marines, qui seraient ainsi le bras armé du politique et de la diplomatie...

Contre la pauvreté pour mieux combattre la criminalité

Bordé par l’Asie, le Moyen-Orient, l’Afrique, l’océan Indien n’est certes pas un foyer d’insécurité, mais n’est pas pour autant vierge de tous trafics. Mickaël Roux évoque, entre autres, les trafics de stupéfiants, la contrefaçon, le pillage des ressources naturelles terrestres ou halieutiques. Et puis, il y a le trafic de migrants, un véritable drame humain qui se joue entre les îles d’Anjouan et de Mayotte. Les “kwassa-kwassa”, fragiles barcasses débarquent clandestinement des personnes malades ou des femmes enceintes qui viennent accoucher à Mayotte. "Sur 160.000 habitants dans cette île, on estime à 55.000 le nombre d’étrangers dont 10.000 en situation irrégulière", rappelle Mickaël Roux.
Quelles solutions pour lutter contre ces trafics ? "Il faut savoir qu’entre 1990 et 2000, les groupes criminels ont su exploiter les disparités entre les législations pour contourner les obstacles légaux". Depuis, la communauté internationale s’est dotée d’outils, mis en place des conventions internationales. Désormais, on travaille d’État à État pour lutter contre le blanchiment d’argent sale. Mais il faut aussi davantage de moyens humains, financiers et matériels. Mais, conclut Mickaël Roux, il faut aussi, en parallèle lutter contre la pauvreté, qui est le véritable terreau de la criminalité.
Membre de la COI, de lndian Ocean Rim, de la SADC, de la COMESA et de l’Union Africaine, Madagascar souhaite tirer bénéfice de la mondialisation.
La Grande Ile, explique Marcel Ranjeva, ministre des Affaires Étrangères, dispose d’atouts que ce soit dans le domaine agricole ou touristique. Le gouvernement s’est lancé dans de grands travaux de réhabilitation des infrastructures.
Pour autant, "nous devons aussi intégrer la dimension culturelle dans cette mondialisation. Nous ne devons pas devenir consommateurs anonymes dans le village global", souligne le ministre malgache des Affaires Étrangères. Une manière de souligner toute la contradiction qu’engendre la mondialisation : comment n’en prendre que les aspects bénéfiques ?

S. D.


Paul Vergès : "Nous voulons prendre notre place"

Intervenant en clôture du colloque, le président de la Région devait, comme il l’avait fait pour l’ouverture, dresser les perspectives et rappeler les grands enjeux qui nous attendent.
"En un temps très court, on a assisté à un accroissement spectaculaire des inégalités. L’économie de marché a atteint l’ensemble du globe et nous en sommes à un marché unique mondial"
, résume le président de la Région.
Et dans un tel contexte, que valent encore les frontières, quand, d’un clic de souris, on a la possibilité d’opérer un transfert massif de capitaux vers une source de profits rapides ?
Les défis qui nous attendent doivent aussi nous conduire à réviser nos critères. Ainsi, l’utilisation de la notion même de PIB pour mesurer la situation d’un pays n’est-elle pas restrictive ? Ne vaudrait-il pas parler plutôt de “critères de développement humain” ? Quant aux échanges qui se multiplient, quelles valeurs de civilisation véhiculent-ils ?
Pour le président de la Région, la question peut se poser sous cette forme : sombrer ou se redresser. Et notre destin est dans nos mains. Qu’il s’agisse de la transition démographique, du réchauffement de la planète, nous devons prendre conscience que "l’homme est la seule créature sur terre à pouvoir tenir dans ses mains le sort de toutes les autres espèces animales ou végétales".
Conclusion optimiste du président de la Région : "il ne suffit plus d’expliquer le monde, il faut le transformer et nous, nous voulons prendre notre place dans cette transformation".


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