21ème Conseil des ministres de la COI

Nouvelle année sous la présidence malgache

19 janvier 2005

En passant la présidence de la Commission de l’océan Indien au ministre malgache des Affaires étrangères, Paul Vergès a évoqué l’idée d’une spécialisation par île pour faire face aux défis de l’avenir : ’La Réunion pourrait se consacrer à l’étude des effets du changement climatique et au développement des énergies renouvelables’.

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La passation de pouvoir s’est traduite par une passation de parole. Lors de la cérémonie de clôture de ce 21ème Conseil des ministres de la Commission de l’océan Indien, c’est Paul Vergès qui représentait la France-Réunion, en l’absence de Xavier Darcos, ministre délégué à la Coopération.
Avant de laisser le siège de la présidence de la COI à Marcel Ranjeva, ministre des Affaires étrangères de la République de Madagascar, le président du Conseil régional a rappelé combien "c’est un honneur pour La Réunion d’accueillir ce Conseil qui intervient au moment où chacune de nos îles, prises isolément, a à affronter des défis redoutables qui s’imposent à nous avec une acuité particulière".
Ces défis doivent être envisagés, a rappelé Paul Vergès, "compte tenu de la vulnérabilité de nos territoires et de nos économies dans un monde en mutation rapide, marqué par la mondialisation des échanges, la menace des changements climatiques, la récurrence et l’amplification des phénomènes cycloniques ou encore des catastrophes naturelles, qui peuvent frapper notre Région. Nous avons aussi à lutter contre les menaces de la progression des grandes pandémies modernes comme le SIDA qui ravage déjà nos voisins d’Afrique".

Pour un codéveloppement durable

Pour le président de la Région, les axes stratégiques adoptés impulsent "un nouvel élan à la COI" et doivent "faire émerger des solutions concrètes pour un codéveloppement durable". Il annonçait que La Réunion accueillera, du 16 au 18 février, la rencontre internationale du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, ce qui est "une opportunité pour appeler l’attention de la communauté scientifique internationale sur la vulnérabilité particulière de nos territoires face aux conséquences du réchauffement climatique".
Il souhaite que chaque pays de la COI adopte, dans ses politiques de développement, des mesures d’adaptation pour tenter d’en atténuer les méfaits, en faisant ainsi de notre Région une zone d’expérimentation.

Doublement de la population

Les Nations-unies ont confié à la COI la coordination des États insulaires de la région Méditerranée, Atlantique, océan Indien et Sud de la mer de Chine. La COI a déjà évoqué l’idée d’une spécialisation par île, chacune ayant un pôle d’excellence : "Les Comores pourraient ainsi se pencher sur le problème de la lutte contre la pauvreté, Madagascar sur la valorisation de la biodiversité, Maurice sur les effets de la mondialisation sur les petites économies insulaires, et les Seychelles sur l’océanographie. La Réunion pourrait se consacrer à l’étude des effets du changement climatique et au développement des énergies renouvelables". Ceci serait une contribution à la mise en œuvre du plan de Maurice.
Il invitait la Commission à se préparer pour l’horizon 2025 qui connaîtra un doublement de la population actuelle, pour atteindre 35 millions d’habitants et s’est montré confiant en l’avenir : "la communauté de destin qui caractérise nos îles, les liens historiques, culturels et de solidarité qui nous unissent sont autant d’atouts sur lesquels nous consoliderons les bases de la COI au cours des prochaines années".

Joie, fierté, appréhension

Le ministre des Affaires étrangères de la République de Madagascar a pris alors la place de Paul Vergès et s’est dit "heureux d’accepter la présidence du Conseil des ministres de la COI" au nom du gouvernement de la République de Madagascar. Il faisait part de ses sentiments : "joie, fierté, mais aussi appréhension devant les lourdes responsabilités qui attendent notre organisation en cette année 2005".
Au cœur de l’agenda se trouve le sommet des chefs d’État et de gouvernement à Madagascar, dont le thème est “Valoriser notre patrimoine commun et renforcer notre solidarité pour un développement durable”.
Marcel Ranjeva a félicité la présidence française pour les actions engagées durant son mandat ainsi que le secrétaire général de la COI avant de poursuivre : "notre organisation a 21 ans, elle est l’aînée de la plupart des organisations régionales existantes comme le COMESA ou la SADEC. En 2005-2006, elle assurera la maîtrise d’ouvrage d’une vingtaine de programmes actifs pour un montant d’environ 85 millions d’euros, soit plus de la moitié des financements externes drainés durant les quinze années précédentes".
Parmi ces projets se trouvent "les programmes phares, porteurs de notre identité culturelle et de notre ouverture sur le monde" comme l’Université de l’océan Indien, l’organisation touristique des îles de l’océan Indien et le Festival culturel. Ces projets nécessitent selon lui "des structures souples et légères".

"La culture ne se réduit pas à un simple bien commercial"

Après la première participation de la COI au Sommet des Petits États insulaires en développement, organisé par les Nations-unies, il a réaffirmé la volonté commune "d’une plus grande visibilité et d’une meilleure prise en compte de la voix de la COI dans les instances internationales".
Il ajoutait : "Notre spécificité est l’indocéanité, unique au monde. Nous devons la préserver face à l’universalisme libéral ambiant et la tendance au monolithisme. La culture ne se réduit pas à un simple bien commercial. Elle est la clé de l’accès au monde et aux relations avec autrui. Les pouvoirs publics devraient pouvoir intervenir pour sa sauvegarde, tout en favorisant les échanges culturels entre les pays".
Il a orienté son intervention sur la solidarité régionale, la mondialisation et les défis qu’elle nous impose, qualifiant l’élimination des quotas dans le textile de "coup de tonnerre"  : "Nous allons vers une dérégulation générale des marchés financiers et autres. Nous prônons un abaissement ou une élimination des barrières tarifaires. Nous déclarons la fin des zones économiques préférentielles issues de la période post-coloniale. La page du vingtième siècle est donc bien tournée malgré quelques séquelles. Comment sera assuré le pilotage du passage vers cette nouvelle société mondiale ?"
Face à la globalisation, l’intégration régionale est une réponse, quoique partielle et limitée. Les défis immédiats restent d’aboutir à un Accord de partenariat économique avec l’Union européenne et de faire en sorte que la COI défende nos intérêts au sein du groupe ESA ou en Afrique orientale et australe. Autre défi : l’union douanière pour le COMESA et son marché commun en 2012.

Des droits et des devoirs

Marcel Ranjeva estime que "La Réunion est un cas, a priori à part, en tant que Région ultra-périphérique européenne. La COI pourrait permettre une prise en compte de sa présence dans la région dans les négociations APE. Notre organisation est un atout pour l’île-sœur pour une meilleure intégration dans son environnement naturel. Et La Réunion pourrait être aussi un pont entre les îles du Sud-Ouest de l’océan Indien et l’Europe. La solidarité indocéanique implique des droits et des devoirs".
Concernant le tsunami, il annonçait la mise en œuvre d’un système technique de prévention et d’alerte, la COI sera pleinement intégrée dans ce futur réseau.
Il terminait son discours en abordant le thème du développement rural insistant sur la nécessité "d’investir dans les infrastructures rurales pour relancer la compétitivité du secteur agricole des petits pays insulaires. Il y a une quinzaine d’années, ces États étaient autonomes sur le plan alimentaire. Comment pouvons-nous accroître la coopération inter-îles dans le domaine agricole ? Comment faciliter la circulation des produits agricoles ? Quelle place donner à l’agriculture et au développement rural dans les projets COI ?".
Autant de pistes de réflexion pour amorcer cette année de présidence malgache.

Eiffel


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