Après le vote de l’ONU condamnant l’occupation britannique, les Chagossiens préparent leur retour au pays

Olivier Bancoult : « Pourquoi pas Noël aux Chagos ? »

31 mai 2019, par Manuel Marchal

La délégation chagossienne composée d’Olivier Bancoult est de Liseby Elysé est arrivée hier matin. Accueillis par Georges Gauvin et Alain Dreneau du Comité de solidarité Chagos-La Réunion, et par Maurice Gironcel, secrétaire général du Parti communiste réunionnais, les Chagossiens se sont rendus à Saint-Denis où ils ont tenu hier après-midi une conférence de presse. Ce fut l’occasion de faire le point sur les conséquences du vote d’une résolution de l’Assemblée générale de l’ONU. Adoptée par 116 voix pour et 6 contre, cette résolution tire les conséquences de l’avis consultatif de la Cour internationale de justice, et donne six mois au Royaume-Uni pour restituer à Maurice l’administration des Chagos, et pour favoriser le retour du peuple chagossien dans son pays natal d’où il fut déporté à cause de la création de la base militaire de Diego Garcia.

Accueil de la délégation chagossienne à l’aéroport : Alain Dreneau, secrétaire du Comité de solidarité Chagos-La Réunion, Liseby Elysé, Olivier Bancoult (président GRC), Georges Gauvin, président du Comité de solidarité Chagos-La Réunion et Maurice Gironcel, secrétaire général du PCR.

Il reste 600 natifs des Chagos dans le monde sur une population de 3000 au moment de la déportation. Plus de 360 sont à Maurice. Avec les natifs et leurs descendants, ce sont 9000 Chagossiens qui veulent revenir vivre dans leur pays, ce que refusent le Royaume-Uni et les États-Unis. Un pays dont ils ont été déportés avec interdiction d’y retourner par les autorités britanniques suite à un accord avec les États-Unis. pour la construction d’une base militaire à Diego Garcia, une des îles de l’archipel des Chagos.

Hier à Saint-Denis, la délégation chagossienne composée d’Olivier Bancoult et de Liseby Elysé, tenait une conférence de presse. Elle était accompagnée de Georges Gauvin, président du Comité de solidarité Chagos-La Réunion, et de Christian Moutama, sympathisant du Mouvement réunionnais pour la paix. Olivier Bancoult a retracé la lutte que mènent les Chagossiens depuis plus de 40 ans pour faire respecter leur droit de vivre dans leur pays. Il y eut notamment des grèves de la faim à Maurice, et la répression. Les Chagossiens choisirent la voie juridique pour faire aboutir leur revendication.

Le premier jugement date du 3 novembre 2000, devant la Haute cour de Londres, qui donnait la première victoire sur le Royaume-Uni. Parallèlement aux procédures devant la justice britannique, les Chagossiens ont eu un accord en 2015 avec Maurice pour que cet État porte l’affaire devant l’ONU. Si les Chagossiens veulent revenir dans leur pays, Maurice revendique la souveraineté sur l’archipel des Chagos occupé par le Royaume-Uni, qui faisait partie de Maurice avant son indépendance.

Christian Moutama, Liseby Elysé, Olivier Bancoult et Georges Gauvin lors de la conférence de presse.

116 États soutiennent les Chagos

En novembre 2016, le gouvernement britannique a fait part de son refus du retour des Chagossiens, alors qu’une étude de faisabilité de KPMG commanditée par ce même gouvernement avait fait part de la possibilité de la réinstallation des Chagossiens, y compris à Diego Garcia dont le tiers seulement de la superficie est occupé par la base. Le résultat de cette étude rendu en janvier 2015 soulignait l’absence d’obstacles politiques au retour des Chagossiens. De plus, une autre étude a affirmé que 98 % des Chagossiens veulent revenir.
En novembre 2016, le Royaume-Uni a proposé de l’argent pour faire taire les revendications. Le Groupe réfugiés Chagos a refusé que la dignité des Chagossiens soit achetée.

En 2017, Maurice a obtenu que la question de l’occupation britannique des Chagos soit soumise à un vote des Nations-Unies. L’assemblée générale de l’ONU, avec 94 pour, 15 contre et 65 abstentions, s’est rangée à la position mauricienne, et a demandé à la Cour internationale de justice de rendre un avis. Du 3 au 6 septembre 2018, l’affaire a été entendue à la Cour internationale de justice. Beaucoup de pays ont soutenu la position de Chagos et de Maurice. En février, la Cour internationale de justice a rendu son avis : il condamne sévèrement le Royaume-Uni, en demandant qu’il fasse cesser au plus tôt son administration sur les Chagos et restitue l’archipel à Maurice. D’emblée, le gouvernement britannique a dit de pas vouloir se conformer à cet avis, consultatif et donc pas contraignant.

Alors Maurice a pris la décision de présenter une résolution demandant à l’Assemblée générale de l’ONU de se prononcer sur l’avis rendu par la Cour internationale de Justice. Cette démarche avait le soutien de l’Union africaine. Le 22 mai à New-York, la résolution est votée par 116 voix pour contre 6 et 56 abstentions. Cette résolution donne une date butoir : dans 6 mois, l’administration des Chagos doit revenir à Maurice. De plus, ce délai doit être mis à profit pour préparer le retour des Chagossiens.

Retour aux Chagos le 22 novembre

Pour les Chagossiens, ce vote est une grande victoire. Ils ont donc décidé de se conformer au vote de l’Assemblée générale de l’ONU en organisant leur retour aux Chagos dès cette année. « Nous nous préparons car Maurice a donné 6 mois au Royaume-Uni pour évacuer et laisser revenir les Chagossiens », a souligné Olivier Bancoult, qui rappelle que la date fixée par l’ONU est le 22 novembre. « Nous avons discuté avec des ingénieurs et spécialistes en relogement. La première tâche sera de réaménager les tombes de nos aïeux », poursuit-il. Le Groupe réfugiés Chagos refuse l’idée britannique de participer à des visites.

« Nous voulons rentrer aux Chagos sans que personne nous le dise, nous le ferons à notre manière. Nous comptons solliciter le Fonds monétaire international pour commencer cette nouvelle vie », précise Olivier Bancoult qui ne manque pas de remercier « tous les camarades qui ont soutenu notre cause ». Olivier Bancoult salue la présence de Liseby Elysé qui avait témoigné devant la CIJ. Il remercie la solidarité des Réunionnais qui s’est manifestée le matin à l’accueil à l’aéroport.
« On ne peut accepter que des personnes qui travaillent dans la base puissent vivre au Chagos, que des croisiéristes puissent séjourner jusqu’à 6 mois et que nous, les fils de la terre, nous ne puissions y vivre », ajoute Olivier Bancoult, « nous venons chercher la solidarité et des idées pour notre réinstallation. Pourquoi pas Noël aux Chagos ».

Après La Réunion, cap ensuite sur Genève à une conférence sur les peuples autochtones. Ce sera l’occasion de prises de contact internationales pour la réinstallation.
La prochaine étape du séjour réunionnais est une conférence à 18 heures à la mairie de Saint-Denis.

M.M.

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