Co-développement avec notre région

Vers l’intégration régionale d’une zone de 400 millions d’habitants

Visite d’Erastus J.O Mwencha, secrétaire général du COMESA

16 septembre 2003

Le secrétaire général du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA, en anglais), Dr. Erastus Mwencha, arrive dans notre île ce soir pour une visite de deux jours préparée à l’initiative de Brigitte Girardin, ministre de l’Outre-mer.
Un programme de rencontres avec des acteurs économiques, dans des entreprises et dans les principaux pôles de recherche, ainsi qu’avec les deux présidents des collectivités territoriales, devrait permettre au secrétaire général du COMESA de se familiariser avec La Réunion, son potentiel humain et économique et mieux faire connaître en retour à ses interlocuteurs réunionnais une organisation d’intégration économique régionale regroupant vingt pays du Sud et de l’Est africain : Angola, Burundi, Comores, République démocratique du Congo, Djibouti, Égypte, Érythrée, Éthiopie, Kenya, Madagascar, Malawi, Maurice, Namibie, Ouganda, Rwanda, Seychelles, Soudan, Swaziland, Zambie et Zimbabwe. Ce large sous-ensemble, auquel ne s’est pas associée l’Afrique du Sud, membre influent de la SADC (Communauté de développement d’Afrique australe), s’étend sur une superficie de 12 à 13 millions de km2 et regroupe dans une organisation commune près de 400 millions d’habitants, soit un ensemble approchant ce que sera, après mai 2004, l’Europe des 25.
Le siège du COMESA est à Lusaka, en Zambie. Sa présidence est éthiopienne depuis mai 2002 et le secrétariat général est actuellement échu au Dr. Erastus J.O Mwencha, un économiste kenyan élu à cette responsabilité depuis juin 1998, pour un mandat de cinq ans, renouvelable. Le secrétaire général adjoint, Sindiso N. Ngwenya, élu en juin 1998, est d’origine mauricienne. Ils sont chargés de la mise en œuvre des décisions prises par la Conférence et le Conseil des ministres, actuellement sous présidence égyptienne.

Garantir la paix

Le COMESA a été créé en novembre 1993, après le déclin du Preferential Trade Area (PTA) formé quinze ans plus tôt (1978). Le Traité du Common Market for Eastern and Southern Africa a été ratifié lors du sommet de Lilongwe, en décembre 1994. Ses objectifs sont de réaliser l’intégration économique régionale des pays membres en développant le commerce, les infrastructures, en favorisant l’investissement. La promotion de la sécurité et de la paix est un autre des axes majeurs du COMESA, dont certains pays membres ont connu des temps de guerre civile, comme le Burundi, qui a dû déménager pendant un temps le siège de la banque de la Zone d’échange préférentiel (ZEP), revenu depuis à Bujumbura.
Avec un PIB moyen d’environ 170 millions de dollars (US), cette région est l’une des plus pauvres du monde et certains de ses membres comptent parmi les 24 pays les plus pauvres de la planète. L’enjeu d’un tel regroupement est d’abord de garantir la paix au sein des pays membres, seule façon d’œuvrer durablement à la réalisation des objectifs économiques. Les échanges entre les pays du COMESA sont encore faibles (en moyenne : 6,5% des exportations) mais surtout très inégaux. Les pays membres de l’organisation qui ont une économie plus développée semblent mieux tirer parti des échanges. Ainsi, l’Égypte aurait multiplié par six ses exportations vers les pays du COMESA depuis son adhésion au Traité, en 1998. À l’inverse, la Tanzanie - dont la moitié des 35 millions d’habitants vivent sous le seuil de la pauvreté - a quitté le COMESA en août 1999, en partie pour satisfaire la demande de l’Afrique du Sud, qui avait déjà obtenu le départ du Mozambique et du Lesotho deux ans plus tôt, mais aussi parce que ce pays ne voyait pas l’utilité de financer plusieurs organisations sub-régionales dont les objets et les territoires se recoupent. La question alimente les débats au sein de l’organisation, le COMESA faisant valoir au contraire l’importance de la coopération régionale pour surmonter les obstacles du sous-développement.

Réorganiser les transports

Quoi qu’il en soit, les échanges commerciaux se sont accélérés entre les pays membres. Ils représentaient 2,7 milliards de dollars (US) en 1997, contre seulement 834 millions il y a douze ans, selon "Afrique Relance" [1]. Le taux annuel de croissance du commerce avec des pays tiers était de 7,1% en moyenne en 1997, date à laquelle la croissance économique moyenne avait atteint 4,5% - un taux record sur les dix dernières années, selon cette même source.
La Ière Conférence économique régionale du COMESA s’est déroulée au Caire, les 28 et 29 février 2000, pour faire connaître le COMESA au moment où l’organisation préparait la mise en place d’une Zone de Libre échange (ZLE), inaugurée le 31 octobre 2000, à Lusaka et saluée par le secrétaire général des Nations-Unies, Kofi Annan, comme « une promesse de prospérité et de paix ». Cependant, seul neuf des vingt membres ont signé le protocole d’accord créant la ZLE : Djibouti, Egypte, Kenya, Madagascar, Malawi, Maurice, Soudan, Zambie et Zimbabwe.
Le Burundi, L’Érythrée, le Rwanda, les Comores, l’Ouganda et la République démocratique du Congo (RDC) envisageraient de signer à leur tour le protocole d’accord. Une union douanière doit être mise en place en 2004.
Au nombre des programmes de développement du COMESA figure en bonne place une réorganisation des transports, essentiels à la réalisation d’un marché commun. Le programme met l’accent sur les transports routiers et comporte une harmonisation des réglementations socio-économiques et techniques. Bien que le COMESA dispose d’une réseau ferroviaire de plus de 28.000 kilomètres, 80% des marchandises échangées au sein de la Zone sont transportées par la route, les pays membres du COMESA étant reliés les uns aux autres par un réseau routier de 561.000 kilomètres de routes classées.

Des partenariats

Le COMESA entretient des relations avec les autres organisations régionales telles que la Communauté Est-Africaine (EAC), l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), la Commission de l’océan Indien (COI) et la Communauté pour le développement de l’Afrique australe (SADC). Le Marché commun a signé avec ce dernier pays, en 2001, un accord de coopération entre les deux organisations.
Des relations suivies existent aussi avec l’Union européenne, qui a contribué en 1999 au financement de l’harmonisation des systèmes douaniers et des statistiques commerciales des pays du COMESA. Des accords commerciaux existent entre l’UE et le COMESA mais pour beaucoup de pays de cette organisation, un accès au marché européen reste très problématique. Les accords de Cotonou prévoient la conclusion, d’ici 2008, d’accords de partenariat économiques régionaux par lesquels l’UE envisage de pousser plus loin ses relations commerciales avec le COMESA, la SADC, l’EAC et la COI. Des discussions devaient s’ouvrir en ce sens en septembre 2002.
Depuis peu, une coopération renforcée s’est engagée avec la France, qui a reçu en 1999 le secrétaire général du COMESA. La France s’est engagée à soutenir la création d’une société régionale de télécommunications (COMTEL), un des projets du COMESA. Sa coopération est également souhaitée pour la création de l’Union douanière. Les relations bilatérales avec le COMESA comportent un volet de soutien à la francophonie, neuf pays du Marché commun sur vingt étant des États francophones, où le français est langue officielle autant que langue de travail, à parité avec l’anglais. La France a désigné un représentant spécial auprès auprès du COMESA, S.E Jean-Paul Monchau, qui est aussi ambassadeur de France en Zambie et au Malawi.

Un fonds de réserve alimentaire régional

La situation agricole de l’Afrique est un des principaux défis lancés à des actions de coopération et de co-développement. L’an dernier, la région australe et orientale a souffert d’une très grave crise alimentaire qui a touché près de 25 millions d’Africains. Selon une étude réalisée à la demande du secrétariat général du COMESA, les causes des mauvais résultats du secteur agricole ont été attribuées à des facteurs naturels et à l’inadaptation des infrastructures. Investir dans ces dernières et dans la formation des acteurs de la branche agro-alimentaire sont quelques-unes des actions proposées à la coopération entre les organisations de la zone et leurs partenaires. Un protocole a été signé entre les pays membres pour la création d’un fonds de réserve alimentaire régional. D’autres actions à envisager concernent la conception des politiques publiques, la distribution des semences et leur commercialisation.
Autant de domaines dont le Dr. Erastus Mwencha pourra s’entretenir avec ses hôtes pendant sa visite.


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