15 à 18 millions d’euros : la note payée par les Réunionnais pour que la Région séduise le pouvoir

10 avril 2018, par J.B.

Après son élection à la présidence de la Région Réunion, Didier Robert avait créé un précédent. En effet, sa majorité a décidé de se substituer à l’État pour financer une des compétences relevant du pouvoir central. C’était l’aide au voyage pour aller en France. Cette aide avait été créée par le gouvernement, et elle était financée par une dotation dite de continuité territoriale. La responsabilité de la Région était de choisir les critères permettant à une personne d’être bénéficiaire de cette aide. Ceci fait, c’est Paris qui présentait à la Commission européenne les critères. Une fois validés, c’est l’État qui se chargeait donc de payer cette aide. Rappelons qu’elle est financée par une taxe payée par les passagers qui empruntent les lignes entre la France et les collectivités situées en dehors du continent européen.

Cette décision était purement politicienne. En effet à cette époque, le gouvernement était du même parti politique que Didier Robert. Tous les moyens étaient bons pour faire battre l’Alliance qui était à la tête de la Région en 2010, y compris en refusant de verser à la Région la somme qui était due pour verser l’aide au voyage aux passagers qui y avaient droit. Cela concernait les familles non-imposables pour tout déplacement en France, ainsi que les personnes qui étaient contraintes de s’y rendre par un cas de force majeure. L’enveloppe s’élevait à 7 millions d’euros par an.

Dans un premier temps, Didier Robert a décidé de mettre 7 millions d’euros du budget de la Région dans l’aide au voyage. Aujourd’hui, cette somme est passée à 30 millions d’euros et concerne même des personnes qui habitent en France et veulent venir à La Réunion. Il est à noter que ce sont tous les Réunionnais qui paient ce qui est en fait une subvention directe aux compagnies aériennes, qu’ils voyagent ou pas.

La même tactique est à l’œuvre pour l’allocation logement accession à la propriété. L’État a décidé de la supprimer à La Réunion. Plutôt que de se battre aux côtés des Réunionnais qui demandent que l’État assume sa responsabilité et revienne donc sur sa décision, Didier Robert a choisi de faire payer les Réunionnais à la place de l’État. En effet, lors de l’assemblée générale de la FRBTP, le président de Région a annoncé que sa collectivité allait contribuer au « déblocage » de 523 dossiers en souffrance. Le coût de cette mesure est compris entre 15 et 18 millions d’euros. Qui plus est, cette annonce a été faite en présence du préfet.

Voilà de quoi encourager le gouvernement à maintenir la suppression de cette mesure sociale, puisqu’il a trouvé à La Réunion une collectivité qui est prête à payer à la place de l’État. Officiellement, il s’agit d’une avance de trésorerie faite par la Région à l’État, à charge à ce dernier de trouver un « véhicule législatif » pour rendre l’argent à la collectivité. Mais rien n’oblige le gouvernement à faire un pareil geste.

Lors de ses vœux pour 2018, Didier Robert s’était montré proche du pouvoir. Il a même brûlé la politesse à Gilbert Annette pour annoncer la visite cette année du Premier ministre. Cette avance de trésorerie sans garantie ressemble beaucoup à la manœuvre de l’aide au voyage. Dans les deux cas, ce n’est qu’une course à la séduction destinée à bien se faire voir du pouvoir en place. Et ce sont les Réunionnais qui paient à tous les coups.

J.B.

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