Afghanistan : derrière la prise de pouvoir des talibans, la guerre des terres rares

20 août 2021, par David Gauvin

En prenant le pouvoir à Kaboul, les talibans ont également débloqué la possibilité de diversifier leurs revenus. L’Afghanistan regorge de minerais essentiels aux technologies d’avenir, dont le lithium, mais encore faut-il pouvoir les exploiter.

Les terres rares désignent 17 métaux : le scandium, l’yttrium, et les quinze lanthanides. Ces matières minérales aux propriétés exceptionnelles sont utilisées dans la fabrication de produits de haute technologie. Avec le boom du numérique et des nouvelles technologies vertes, aujourd’hui, à l’échelle de l’économie mondiale, les terres rares sont considérées comme des métaux stratégiques. Ces matières minérales aux propriétés exceptionnelles sont utilisées dans la fabrication de produits de haute technologie. Avec le boom du numérique et des nouvelles technologies vertes, aujourd’hui, à l’échelle de l’économie mondiale, les terres rares sont considérées comme des métaux stratégiques. Problème : l’extraction et le traitement des terres rares polluent et produisent des déchets toxiques. Ces métaux sont devenus indispensables, car ils sont utilisés dans des fabrications de haute technologie. On retrouve ainsi des terres rares dans les batteries de voitures électriques et hybrides, dans les LED, les puces de smartphone, les écrans d’ordinateurs portables, les panneaux photovoltaïques, les éoliennes… L’industrie de la défense a elle aussi recourt aux terres rares dans la fabrication de capteurs de radars et sonars ou de systèmes d’armes et de ciblage.

La pénurie mondiale de semi-conducteurs n’en finit pas d’avoir d’étranges répercussions, notamment sur le plan géopolitique. De quoi s’agit-il ? Depuis un an, les industriels peinent à se procurer ces puces électroniques qui équipent les appareils du quotidien, de l’ordinateur au grille-pain en passant par la machine à laver et la console de jeux. En mai dernier, un consortium d’entreprises américaines demandait au président sud-coréen l’amnistie de M. Lee Jae-yong, l’ancien président de Samsung, qui purge actuellement une peine de prison ferme pour corruption. Pour pallier la vulnérabilité des États-Unis en matière de puces, Samsung devait concrétiser sans délai ses projets d’investissements de plusieurs milliards de dollars sur le territoire américain. Sa souveraineté électronique en jeu, Washington mettait soudain en sourdine le discours obligé sur l’État de droit et le respect des procédures…

L’Afghanistan possède un des plus gros gisements de lithium, minerai déjà incontournable pour l’industrie, mais aussi des terres rares très recherchées. 1000 milliards de dollars. Voici la richesse minérale sur laquelle sont désormais assis les talibans. Dans une note interne du Pentagone datée de 2010, des militaires et géologues américains avaient ainsi répertorié les vastes réserves de minerais du pays, composées de fer, de cuivre, d’or mais aussi de lithium. Le pays avait même été surnommé « l’Arabie saoudite du lithium » par le Pentagone. Mais on trouve aussi du platine, de la chromite, de l’uranium et surtout des très précieuses terres rares (lanthane, cérium, néodyme…). Autant de matériaux précieux qui donnent une idée du potentiel extraordinaire de cet État, aujourd’hui mieux connu pour sa culture du pavot que pour les richesses de son sol et de son sous-sol. Pourtant, l’exploitation a déjà commencé : il existe une mine de cuivre à Aynak, près de Kaboul, et une autre à Hajigak, qui produit du fer. En réalité, la situation politique instable n’a jamais permis au pays de profiter de cette manne. La corruption a empêché le développement des infrastructures et celles déjà réalisées (routes, voies ferrées…) ont été en partie détruites par la guerre. Le président en fuite, Ashraf Ghani, voyait même les minerais comme une “malédiction”, c’est-à-dire une excellente raison de relancer des conflits armés pour en prendre possession. Aujourd’hui, les cours des matériaux flambent. Et ce n’est qu’un début surtout pour les terres rares et le lithium qui font partie des principaux composants des batteries électriques. Conscients de cette richesse, les Américains ont bien tenté de développer ce secteur industriel, d’une part pour stimuler l’économie afghane gangrenée par l’opium mais aussi pour mettre sur pied un concurrent face à la Chine, numéro 1 incontesté du lithium et des terres rares.

Le monde d’avant voyait les États se battre pour les ressources pétrolières. Mais en faisant une analyse complète, nous pouvons constater que chaque époque connaît des guerres autour des ressources les plus importantes. Il y eut des conflits pour la maîtrise des ressources en sel, puis en sucre, en épice et ensuite en pétrole. La source de conflit est le marqueur de la matière première au centre de l’économie du moment. Aujourd’hui, une nouvelle ère s’est ouverte. La prise de Kaboul par les talibans est pour le coup le premier conflit armé du monde d’après. Les équilibres mondiaux ont changé, les ressources stratégiques aussi. Nous devons donc repenser notre développement à la lumière de ces nouvelles données. La COVID a agi comme un déclencheur pour une nouvelle société décarbonée. Mais ne nous trompons pas, la nouvelle économie verte pollue aussi la planète. En tout état de cause, ces nouveaux équilibres sont une chance pour La Réunion, à condition qu’elle soit capable de faire le saut très vite entre le monde d’avant et le monde d’après. Il faudrait pour cela, que nous puissions maîtriser et choisir l’avenir de notre Pays.

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme » Lavoisier

Nou artrouv’

David Gauvin

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