Des moyens et des raisons de vivre, ... ou alors je me tue

6 février 2009, par LB

Dans le cadre des 13èmes "Journées nationales de prévention du suicide", une soirée débat était programmée hier à Saint-Pierre sur le thème "Précarité et suicide", avec la participation du docteur Laurent Denizot, médecin responsable du pôle psychiatrie au Groupe Hospitalier Sud Réunion, de Frédéric Paulus, psychothérapeute, et d’associations comme SOS Solitude. Le thème de cette rencontre était le même qu’en France, où l’Union Nationale pour la Prévention du Suicide craint « une crise sanitaire et humaine sans précédent » car « les Français sont confrontés à la montée de la précarité, à la fois dans l’ordre humain (famille et psychologie) et dans l’ordre relationnel et social (travail) ».

Que dire alors à La Réunion, où le taux de chômage est trois fois supérieur à celui de France, où rien que l’an dernier le nombre de chômeurs a augmenté de 9.000 et où, dans cette société déchirée par des inégalités extrêmes, plus de la moitié de la population survit sous le seuil de pauvreté, tandis qu’une minorité se remplit les poches avec des revenus hyper-indexés ?
Résultat : chez nous, il y a environ deux fois plus de décès par suicide que par accident de la route ; et selon les dernières études publiées à ce sujet, « depuis 1999, le nombre de suicides croît constamment ».

Au chômage massif, à l’exclusion, à la précarité et aux discriminations sociales voire ethniques, s’ajoute l’héritage de 350 ans d’histoire, dont trois siècles vécus par les Réunionnais sous le régime colonial, avec l’esclavage et l’engagisme. L’abolition de ce régime il y a à peine un demi-siècle a-t-elle fait disparaître toutes ces violences, avec le mépris voire la répression envers les Réunionnais qui lèvent la tête ?
Dans ce contexte, l’État, qui est le principal responsable de ces violences sociales, a le devoir de s’occuper des victimes en souffrance mentale. Mais l’idéologie véhiculée par les classes dominantes et leurs médias ne va pas en ce sens, puisqu’elle impose que chacun doit se débrouiller pour gagner sa vie et régler ses problèmes lui-même.

Lorsque des milliers de nos compatriotes surexploités et dominés se sentent tellement rejetés, méprisés, inutiles - voire nuisibles - qu’ils finissent par n’avoir plus qu’une idée, celle de disparaître, que fait-on ? Eh bien, prenons conscience que la priorité est de les aider à donner un sens à leur vie en respectant les droits humains qui leur sont dus. Sinon ils continueront à nous dire dans l’indifférence générale : je veux des moyens et des raisons de vivre, ... ou alors je me tue.

L. B.


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