Jérusalem la trois fois sainte devra être la clé de voute de la solution à deux Etats prévu depuis 1967

24 décembre 2021, par David Gauvin

En cette veille de Noel, il est important de rappeler la place à part dans le monde de la ville de Jerusalem. Capitale de l’Etat d’Israël selon les Israéliens et du futur Etat palestinien selon les Palestiniens, Jérusalem se trouve depuis plus de quatre mille ans au cœur des tempêtes proche-orientales. Yeroushalayim (la Ville de la paix) pour les uns et Al Qods (la Sainte) pour les autres, Jérusalem est une ville sainte pour chacune des trois grandes religions monothéistes.

Jérusalem et la Place des Mosquées avec le Dome du Rocher.

A Jérusalem, les toits de la ville voient se côtoyer l’église du Saint-Sépulcre, le dôme du Rocher, la grande synagogue de Belz. Trois édifices pour trois religions. Trois religions qui ne cohabitent pas toujours en toute harmonie. Un paradoxe pour cette cité dont le nom signifie "ville de la paix" ou "la paix apparaîtra ». Les juifs sont les premiers à remarquer les atouts géographiques de ce lieu. Le roi David décide d’y fonder sa cité au Xe siècle av. J.-C. Son fils Salomon a pour mission d’élever le premier temple de pierre sur la plus haute colline, en l’honneur du Dieu d’Israêl, Yahvé. Mouvementée par les conquêtes grecques puis romaines, la capitale juive s’est trouvée bientôt détruite à partir du Ier siècle av. J.-C. La population juive y est interdite. Elle garde toutefois en mémoire le souvenir d’une ville, berceau de la religion du roi David. Malgré l’absence du temple, les juifs jetés aux portes de la ville bénissent quotidiennement Jérusalem dans leurs prières. En l’attente d’un retour en terre promise huit siècles plus tard. L’année 1947 consacre alors la réapparition du peuple juif en Israël, sur décision de l’ONU, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Du côté des chrétiens, la ville de Jérusalem apparaît à plusieurs reprises dans la Bible, notamment dans l’Evangile de Saint Jean. Jésus s’y rend pour la fête de la Pâque et y vit ses derniers jours sur terre, jusqu’à sa crucifixion et sa résurrection. C’est l’empereur chrétien, Constantin, qui le premier, a érigé les premiers lieux saints en souvenir des derniers jours du Christ. La ville devient alors au IVe siècle une ville de pèlerinage pour les chrétiens. Chez les musulmans, Jérusalem n’est mentionnée qu’en troisième position dans la hiérarchie des villes saintes, après Médine et La Mecque. Avant de se tourner vers La Mecque pour prier, le prophète Mahomet dirigeait ses prières vers Jérusalem. C’est d’ailleurs de là que le prophète aurait effectué son « voyage nocturne » avant de revenir à La Mecque pour raconter cette expérience mystique. Pour les musulmans, Jérusalem représente l’aboutissement de leur spiritualité.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, 5 à 6 millions de Juifs sont exterminés. Le mouvement sioniste tire une nouvelle légitimité de cette tragédie. Au milieu des années 1940, environ les deux tiers des habitants de Palestine sont des arabes, un tiers est juif. En 1947, les Nations Unies votent la création de deux États, l’un juif, l’autre arabe, dans le but de mettre fin aux tensions de plus en plus fortes entre les deux communautés. Jérusalem serait placée sous un régime international. Les pays arabes refusent ce plan de partage. En 1948, le jour où le mandat britannique sur la Palestine expire, le président du Conseil national juif David Ben Gourion proclame l’indépendance de l’Etat d’Israël, sans en référer à ses voisins. Immédiatement éclate une guerre entre Israël et ses voisins arabes. La première d’une longue série. Au niveau politique, Jérusalem cristallise les tensions. Si les juifs la considèrent comme leur capitale historique depuis plus de 3 000 ans, les Palestiniens, eux, revendiquent Jérusalem-Est comme la capitale de l’État auquel ils aspirent. Jérusalem-Est, jusqu’alors sous contrôle de la Jordanie, a été conquise par Israël lors de la guerre des Six-Jours en 1967, puis annexée. Une motion adoptée en juin de la même année à la Knesset proclame la ville "capitale éternelle et indivisible d’Israël et du peuple juif", ce que la "loi fondamentale" de 1980 a confirmé. Au cœur des tensions, l’esplanade des mosquées reste sous la garde de la Jordanie, mais tous les accès en sont contrôlés par les forces israéliennes. Les juifs sont autorisés à la visiter mais pas à y prier. Toutefois, certains essaient régulièrement de défier l’interdiction, provoquant des incidents. Pour les Palestiniens, frustrés d’indépendance, la défense de la ville et d’Al-Aqsa sert d’ultime cri de ralliement. Les Palestiniens craignent que ce qu’ils dénoncent comme des empiètements israéliens sur le site ne finissent par une prise de contrôle totale.

Au cours de son débat annuel sur la question de Palestine et la situation au Moyen-Orient, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté le 1er décembre, par vote, trois résolutions et a entendu plusieurs délégations plaider pour la reprise des pourparlers de paix, afin de parvenir à la solution des deux États que beaucoup ont jugé compromise par l’expansion des colonies israéliennes et les actes des extrémistes des deux bords. Dans le texte sur le règlement pacifique de la question de Palestine, adopté par 148 voix pour, 9 voix contre et 14 abstentions, l’Assemblée générale demande de nouveau qu’une paix globale, juste et durable soit instaurée sans délai au Moyen-Orient sur la base des résolutions pertinentes de l’ONU, notamment la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, du mandat de la Conférence de Madrid, y compris le principe de l’échange de territoires contre la paix, de l’Initiative de paix arabe et de la feuille de route du Quatuor. Elle demande que soit mis fin à l’occupation israélienne et, à cet égard, réaffirme son appui indéfectible au règlement prévoyant deux États, Israël et la Palestine, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité, à l’intérieur de frontières reconnues sur la base de celles d’avant 1967. L’Assemblée demande également qu’une conférence internationale soit organisée à Moscou en temps voulu, comme l’a envisagé le Conseil de sécurité dans sa résolution 1850 (2008), en vue de promouvoir et d’accélérer la conclusion d’un règlement de paix juste, durable et global.

Mais pendant ce temps la, perdure l’organisation Ateret Cohanim. Ateret Cohanim (« Couronne des prêtres"), est une organisation juive israélienne avec une yeshiva située dans le quartier musulman de la vieille ville de Jérusalem. Elle œuvre pour la création d’une majorité juive dans la vieille ville et les quartiers arabes de Jérusalem-Est. Elle n’est pas seulement en conflit avec les arabes, mais aussi avec les chrétiens. Treize Églises chrétiennes de Terre sainte ont publié, lundi 13 décembre, à l’initiative du patriarche grec-orthodoxe Theophilos III, une alerte vis-à-vis de la « menace » qui pèse sur la présence chrétienne à Jérusalem. Elles demandent au gouvernement israélien d’ouvrir au plus tôt un « dialogue » en vue de créer une « zone spéciale de culture et de patrimoine » dans le quartier chrétien de la Vieille Ville. Autrement dit, que le statut spirituel et culturel de ce quartier chrétien soit inscrit dans la loi israélienne, comme c’est le cas pour le quartier juif. Rédactrice en chef de Terre sainte Magazine, Marie-Armelle Beaulieu resitue cet appel dans le contexte de tensions entre le Patriarcat grec-orthodoxe et l’organisation ultranationaliste juive Ateret Cohanim,au sujet de son acquisition controversée de biens immobiliers du patriarcat dans les années 2000. Cette interminable bataille juridique s’inscrit dans la stratégie de l’organisation qui œuvre pour la colonisation israélienne de Jérusalem-Est. Lors de la cérémonie de l’illumination du sapin de Noël, jeudi 9 décembre, le patriarche Theophilos a d’ailleurs appelé à ne pas céder aux intimidations. Pour autant, la pression exercée par Ateret Cohanim ne concerne pas uniquement la communauté grecque-orthodoxe, mais l’ensemble des chrétiens présents à Jérusalem.

« Jérusalem n’appartient ni à une seule nation, ni à un seul peuple, ni à une seule religion » Marie-Armelle Beaulieu

Joyeux Noël à tous

David Gauvin

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