Kaboul, Port aux princes, Beyrouth, la fin de l’empire

17 août 2021, par David Gauvin

Ces derniers jours, l’actualité est chargée en drame. Chaque situation est différente, mais ces évènements nous montrent à quel point l’empire occidental est mort.

Après des siècles de conquêtes, l’Empire romain d’Occident chute en 476 après J.-C. Les conquêtes militaires de la Rome antique (conquête de l’Italie et guerres puniques, avec la destruction de Carthage par l’armée romaine en 146 avant J.-C.) permirent à la civilisation romaine de dominer le bassin méditerranéen, et donc le monde connu des Européens, pendant plus de 600 ans. Pourtant, l’abdication de l’empereur Romulus Augustule le 4 septembre 476 marque la chute de l’Empire romain d’Occident. Depuis plusieurs décennies déjà, les peuples barbares tentent de faire plier la puissance romaine. En outre, l’Empire romain est grandement sujet à la corruption. Les impôts sont très mal perçus et l’économie donne des signes de grande faiblesse. L’étendue de l’Empire romain d’Occident entraîne des difficultés grandissantes en matière d’administration. De plus, les ennemis attaquent sur tous les fronts : les Vandales conquièrent ainsi l’Afrique du Nord, la Corse et la Sardaigne tandis qu’en Europe continentale, les Wisigoths et les Suèves gagnent de nouveaux territoires. Même si l’empereur Romulus Augustule manque de charisme et n’a aucune capacité à prendre des décisions importantes, c’est l’autoritarisme de ses ancêtres qui a lentement provoqué le déclin de Rome. À cela vient s’ajouter le fait que les autorités romaines souffrent d’un sentiment de supériorité face aux armées barbares qui se trouvent aux frontières de l’Empire.

Ce dimanche 15 août, les talibans ont mis la main sur le dernier bastion du territoire sol afghan, la capitale, Kaboul, après une offensive éclair qui aura duré dix jours et les aura vus s’emparer de Kandahar, la deuxième ville du pays, à peine deux jours plus tôt. Pour la France, il souffle un sentiment de grand fiasco. En treize ans, nous avons eu là-bas quatre-vingt-dix morts français dont 5 Réunionnais. Ce fiasco est la marque du déclin américain et de sa capacité à être le gendarme du monde. L’autre enseignement, c’est que l’Otan ne signifie plus rien. Après la Syrie, aujourd’hui l’Afghanistan, si les Européens n’ont pas compris, c’est qu’ils ne veulent pas comprendre. Le retrait des troupes de l’Otan dans le pays, dans la foulée des troupes américaines, annoncé par le président Joe Biden, a offert aux talibans la possibilité d’accélérer leur retour au pouvoir. Après 20 ans de présence, les forces américaines ont été contraintes de négocier leur retrait avec les talibans qu’elles étaient venues combattre.

Un tremblement de terre de magnitude 7,2 a secoué le sud d’Haiti, samedi 14 août, faisant, selon un bilan provisoire, 1 297 morts et 5 700 blessés. Par dizaines de milliers, les sinistrés vivent dans la terreur des répliques, alors qu’une tempête tropicale pourrait toucher l’île en début de semaine. Quelques semaines auparavant, le Président était assassiné par des barbouzes. Et malgré la forte communauté haïtienne aux États Unis, ils ne font rien. Ils ne le veulent pas ou ils ne le peuvent pas. De même le Liban connaît une crise financière comme nulle part ailleurs en temps de paix. Après neuf mois de vaines négociations avec le président Michel Aoun pour former un gouvernement, le premier ministre libanais Saad Hariri a décidé de jeter l’éponge. Dans un contexte social, économique et sanitaire désastreux, sa démission fait craindre le pire. Les responsabilités de la banque centrale et de son gouverneur dans le naufrage financier du pays sont désormais bien établies. L’étau se resserre autour du puissant gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé. Après la Suisse, la justice française s’intéresse à son tour à son important patrimoine. Le patron de la banque centrale est devenu, au fil de la crise, l’une des personnalités publiques les plus détestées du Liban. Proche du clan de la famille Hariri, il est soupçonné, à l’instar d’autres hauts responsables du pays, d’avoir discrètement transféré d’importantes sommes à l’étranger au moment du soulèvement d’octobre 2019, malgré les restrictions draconiennes adoptées par les banques. Cet ignoble personnage continu de sévir et à détourner avec les grandes familles libanaises l’aide internationale à leur profit personnel, malgré les vaines protestations du Président français.

Ces évènements mis en perspectives avec la chute de l’Empire Romain d’Occident nous démontrent que l’Empire occidental n’est plus en déclin mais en voie d’implosion. La crise sanitaire a accéléré sa déliquescence longue. Si l’Empire ne permet plus de protéger les peuples soumis, il n’a plus de raison d’être et implose par lui même. C’est la l’enseignement de ces évènements, la fin d’un certain monde. Cependant, la fuite de l’occident de ces territoires en danger, laisse des traces sanglantes. N’oublions pas que l’invasion de l’Afghanistan est partie d’un mensonge. Il s’agira aussi de traduire les responsables de ce fiasco devant la Cour Pénale International. Ils portent sur leur main le sang de centaine de milliers d’Afghan, d’Hatien et de Libanais. Nous Réunionnais devons aussi finir par accepter que nous devons nous sauver par nous même car l’Empire n’a plus la capacité de le faire.

« Tout ce qui monte fini par redescendre, et plus on prend de la hauteur, plus la chute est douloureuse » Franck Ntasamara

Nou artrouv’

David Gauvin

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