L’heure de vérité

11 août 2009

« À beau mentir qui vient de loin ». Cette expression remonte à la fin du 17ème siècle.
Il restait, en cette fin du 17ème siècle, encore bien des contrées inconnues des européens. Époque rêvée pour les mythomanes de toute sorte, colporteurs de gigantesques bobards, opportunistes de la pire étoffe s’attribuant d’invérifiables mérites.
Au fil des siècles, les moyens de communication s’améliorant jusqu’au temps réel, on a pu penser l’humanité débarrassée de ces bonimenteurs. On se trompait.
Depuis près d’une année, La Réunion a pu faire, à son corps défendant, l’expérience de la nocivité de l’un de ces loustics.
Paralysant l’île plusieurs jours de suite, cabotinant devant les télés, cet allié des pétroliers a réussi à manipuler l’opinion publique en faveur de ceux qui les pressurent depuis des années. À ceux qui, complaisamment l’écoutaient bouche bée, il servait une harangue de camelot : si le diesel, si l’essence sont chers, c’est parce la Région refuse de baisser les taxes, haro sur la Région !
Cette hystérie antirégionale ne se trouvait étayée par aucun chiffre. Mongin, c’était du vent. Violent, certes, mais du vent, du vent mauvais et qui pouvait continuer de souffler parce que l’arbitre, le préfet, lui prêtait main-forte.
Pour que la vie économique reprenne, la Région décidait de mettre 2,5 millions d’euros dans la balance tout en sachant que, de faisant, elle n’aidait pas les transporteurs, mais — dans les faits — subventionnait les pétroliers.
Après quelques soubresauts prolongeant cette mauvaise comédie, survint l’épisode de la visite du Premier ministre. M. Mongin, pensant l’instant de son triomphe venu, a précipité ses amis contre le mur vers lequel il roulait sans frein.
Après le choc, le tintamarre cessa. Le gouvernement, dont M. Mongin espérait si fort qu’il le récompenserait pour avoir fait la preuve de son engagement anticommuniste, venait d’opposer une sèche fin de non-recevoir à ses revendications chimériques.
M. Mongin, tout à sa fureur, n’avait pas vu s’approcher l’instant de vérité. Toutes les enquêtes, tous les rapports venaient confirmer ce que la Région ne cessait de répéter depuis novembre 2008 : les pétroliers se sont gavés sur le dos des Réunionnais et, si gazole et super ne sont pas plus chers, c’est parce que la Région prélève des taxes bien moins élevées qu’en métropole.
Part des taxes dans le prix de vente du carburant

Rapport de la commission sénatoriale

01.12. 2008 Réunion Métropole
Supercarburant 50,8 % 72 %
Gazole 35,8 % 59,7 %

Aujourd’hui, Mongin paie le prix de ses mensonges. Ses adhérents constatent qu’il les a trompés, conduits dans une impasse. Le préfet, après avoir bien utilisé ce pantin, songe à se reclasser sous d’autres cieux. Quant à la question de la fixation du prix des carburants — souhaitée à la hausse par les pétroliers * — elle va se poser dans un profond climat de défiance et de tension chez les usagers qu’ils soient transporteurs ou simples particuliers tant ils sont conscients désormais d’avoir été dupés et dépouillés par les pétroliers aidés de Mongin et du préfet.
Tardra-vyindra ! Zordi l’heure de vérité la fine arivé. Aforstan kalbas… !

Jean Saint-Marc

* Rapport de l’Autorité de la concurrence : « Les compagnies pétrolières donnent un prix au préfet qui s’exécute »


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